Kamel Benachenhou, l’entrepreneur qui se bat contre les moulins du défaitisme

Redaction

La famille peut vous mener loin en Algérie. Mohamed Kamel Benachenhou en est la preuve. Malgré les épreuves il a toujours tenu à se battre pour son héritage : l’entreprise familiale « Le Moulin ». Gérant actuel de la société spécialisée dans l’agro-alimentaire, Mohamed Kamel a relancé une entreprise minée par la décennie noire. Récit.

« Le Moulin » était leur destin, c’est ce que semble croire Mohamed Kamel. L’entreprise fondée par son père a failli être la victime de l’histoire algérienne, mais la force d’une famille a maintenu leur projet. L’histoire a commencé dans les années 80 pour les Benachenhou, dans un café. « Mon père était assis dans un café et il a vu un tableau avec un moulin et l’idée a germé, il a décidé de se lancer dans l’agro-alimentaire, en se spécialisant dans les produits en poudre ». Le hasard a fait que la vue de ce simple tableau allait influencer les prochaines années de toute une famille. Petit à petit, la société fondée commence à se diversifier, chips, mayonnaise, et enfin les produits en poudre. Le flan, le sucre vanillé, la levure chimique, et enfin le chocolat en poudre, les Benachenhou relèvent le défi d’être les premiers dans ce secteur. Toute la famille s’investit, Mohamed Kamel le premier. «C’était école-travail pour moi, je me suis beaucoup investi dans l’entreprise. J’ai arrêté les loisirs, comme la musique ou le sport », raconte-t-il.

Success-story ralentie

Tout fonctionne à merveille jusqu’à l’arrivée de la décennie noire. Un tournant qui impactera sur l’avenir de l’entreprise « Le Moulin ». « Nous avons commencé à recevoir des menaces, si on ne donnait pas d’argent aux terroristes, on nous menaçait d’incendier l’entreprise. Nous avions tout le temps peur, alors nous avons décidé de fuir Tlemcen et de vendre toutes les machines », confie Mohamed Kamel. A partir des années 95-96,  « Le Moulin » cesse son activité, et cette coupure imposée durera 6 ans, des années durant lesquelles « Le Moulin » n’existe que de nom. L’activité de l’entreprise se meurt et la famille de Mohamed Kamel commence doucement à faire le deuil d’années de travail. En 2002, la famille part s’installer dans la banlieue d’Alger, à Birtouta. Mais finalement cette décision est trop difficile à prendre pour Mohamed Kamel, et en 2011, il décide de relancer l’activité coûte que coûte. « Mes parents m’ont donné du courage et de la volonté. On était les premiers dans ce secteur et on ne pouvait tout simplement pas abandonner tout ça, aussi difficile que ce soit. »

Nouvelle décision, nouvelle vie, Mohamed Kamel qui était aux côtés de son père durant les années 90, sera désormais l’initiateur du « Moulin », nouvelle version. « Au lycée, lorsque je n’ai pas eu mon bac, mon père m’a donné le choix, soit je poursuivais mes études soit c’était le travail. J’ai choisi le travail », explique-t-il, alors ce nouveau départ lui a permis de prouver la promesse qu’il avait faite dans le passé. Le natif de Tlemcen décide d’abord de faire renaître de ses propres cendres l’entreprise familiale à partir d’Alger, et finalement il retourne dans sa ville d’origine. La tâche n’était pas aisée, « lorsque mon père m’a demandé de reprendre l’activité, j’ai réfléchi pendant une semaine. C’était dur car j’étais jeune, je vivais dans une ville qui m’était étrangère », confie-t-il. Et pourtant, il sent que son avenir ne peut se faire sans le rêve de son père et il tente alors l’aventure. Il s’évertue à apprendre les procédés de fabrication auprès de son père et de sociétés étrangères. Mohamed Kamel tente d’y mettre sa touche personnelle sans pour autant renier la marque qui était restée imprimée dans les consciences tlemcéniennes. Il change l’emballage, ajoute des produits, et tient à faire du 100% algérien, de la main-d’œuvre aux matières premières. Mohamed Kamel tente de développer doucement mais sûrement l’entreprise dont il a hérité.

Désormais, la société rencontre du succès, plusieurs employés ont intégré l’entreprise, la production s’est accélérée et est distribuée dans tout l’ouest et le centre du pays, dans les alimentations générales comme dans les grandes surfaces, de type Ardis, ou encore Uno et Family shop. Mohamed Kamel a encore d’autres rêves plus grands et a complètement fait table rase du passé. L’entrepreneur espère toucher toute l’Algérie avec ses produits et pense à l’exportation en Afrique. A 34 ans, l’ambition ne manque pas chez le chef-d’entreprise qui se donne jusqu’à 2015 pour asseoir sa réputation sur tout le continent.

Amina Boumazza – Photos Collectif Makkouk

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