Les journées du film engagé d’Alger se sont ouvertes le 12 décembre avec un documentaire sur la cause saharaouie, « Les enfants des nuages ». Si ce festival international né il y a 5 ans met à l’honneur des films de tous les continents, il reste une tribune pour des réalisatrices et réalisateurs algériens, comme Bahia Bencheikh El Fegoun qui y présentait son documentaire « Nous dehors » samedi dernier.
Tapis rouge et lumière chaleureuse, le cinéma El Mouggar d’Alger était bondé vendredi soir pour l’ouverture de la cinquième édition des Journées du film engagé. Le documentaire « Les enfants des nuages » d’Alvaro Longoria, sur l’immobilisme de la communauté internationale devant la situation du Sahara occidental, a ouvert le festival, durant lequel 16 films seront projetés jusqu’à jeudi prochain.
Un principe commun : la défense de la dignité humaine
Au programme, des documentaires et des fictions qui racontent des histoires d’hommes et témoignent de combats menés ou à mener pour faire aboutir un engagement au service du bien commun. Place de la femme dans l’espace public, gaz de schiste, désindustrialisation, apartheid : la programmation du festival est riche et hétéroclite cette année. Elle laisse aussi bien la place à des films salués par la critique comme Timbuktu du mauritanien Abderrahmane Sissako qu’à des moyens-métrage moins connus comme Loubia Hamra de l’algérienne Narimane Mari.
Au risque de s’y perdre ? « Nous choisissons d’abord les films pour leur qualité. Après, nous avons des critères d’équilibre. La sélection est basée sur le cinéma algérien, le cinéma africain, et le cinéma arabe, mais nous choisissons aussi des films d’autres horizons » explique Ahmed Bedjaoui, membre du comité de sélection depuis la première édition des Journées du Film engagé. « Nous essayons de composer un véritable festival international en posant un regard sur des situations différentes, mais avec toujours un principe commun : la défense de la dignité humaine ».
Le cinéma algérien et ses combats
Sur les 16 films projetés, 3 ont été réalisés par des algériens ou des franco-algériens. Loubia Hamra, de Narimane Mari, Enemy way de Rachid Bouchareb (même si la production est franco-américaine) et Nous dehors (H’na Barra) de la réalisatrice Bahia Bencheikh El Fegoun.
Cette dernière nous parle de son documentaire, projeté samedi, qu’elle a réalisé avec Meriem Achour Bouakkaz. En prenant le voile comme point de départ, les deux réalisatrices évoquent la place de la femme dans l’espace public, un thème encore tabou en Algérie. « Au départ, nous étions partie pour parler du voile en Algérie, puis de fil en aiguille on en est arrivé à faire un film sur ce que c’est d’être une femme dans l’espace public en Algérie » explique Bahia Bencheikh. Les deux réalisatrices suivent le parcours d’une jeune femme voilée qui hésite à enlever son hijab. Le spectateur assiste à ses discussions avec des Algériennes, voilées et non voilées, qui, par leurs histoires, mettent en lumière la violence quotidienne qui s’exerce contre elles. « Dans ce film je ne me positionne ni pour ni contre le voile, car il n’est pas question de porter un jugement sur le choix des unes ou des autres. La question que je pose c’est : jusqu’à quel point est-ce un choix ? » précise Bahia Bencheikh. Avec ce film, les deux réalisatrices entendent éveiller les consciences et faire réfléchir le public sur la condition de la femme algérienne. « Nous sommes dans une société où le groupe pèse énormément, et où l’on préfère se plier aux codes sociaux que de faire des choix ».
Interpeller et faire réfléchir le spectateur. C’est la mission que se sont données les Journées du film engagé depuis cinq ans. Une recette qui fonctionne, à en croire Ahmed Bedjaoui. « Le public est le seul à juger de la qualité de la sélection. Et les salles sont pleines ! L’adhésion du public, sa fidélité, son ENGAGEMENT prouve que le cinéma engagé est encore susceptible d’intéresser aujourd’hui ».