Le 7e art algérien s’est intéressé, depuis ses débuts, aux sujets liés à la situation de la femme, à travers des films à fort contenu social mais réalisés par des hommes. Plusieurs longs métrages ont pu ainsi être consacrés à la condition féminine tels que « Leila et les autres » de Sid Ali Mazif, « Douar en’sa » (Le hameau des femmes) de Mohamed Chouikh, « Une femme pour mon fils » d’Ali Ghanem ou encore « Le harem de madame Osman » de Nadir Moknèche.
C’est seulement durant les années 2000 que des films réalisés par des femmes sont sortis dans les salles, dont « Rachida » de Yamina Chouikh, »Barakat! » (Assez!) de Djamila Sahraoui, « Mel Watni ? » (Qu’arrive-t-il à ma patrie?) de Fatima Belhadj et « Le revers du miroir » de Nadia Cherabi.
Ces films ont marqué en quelque sorte le lancement de la femme dans la réalisation cinématographique, un domaine apparemment toujours réservé aux hommes, du moment que les femmes réalisatrices en Algérie se comptent sur les doigts d’une seule main, contrairement aux autres métiers de cinéma, comme le montage, l’assistanat, le script ou la comédie.
Pas de difficultés propres à la femme réalisatrice
Nadia Cherabi, réalisatrice du film « Le revers du miroir », relève que la femme s’investit plus dans la production de télé-films et feuilletons ou bien dans la réalisation de films documentaires que dans le long métrage.
Reconnaissant qu’il y a peu de femmes cinéastes, Nadia Cherabi souligne toutefois leur « forte » présence dans l’assistanat, le montage et la production, affirmant, par ailleurs, qu’elles ont les mêmes possibilités que les hommes pour réaliser de longs métrages.
« Il est vrai que le nombre de femmes réalisatrices est réduit, mais elles sont très présentes dans les autres domaines du 7e art », a-t-elle dit à l’APS, estimant qu’il n’existait pas de difficultés spécifiques à la femme dans la réalisation et que les exigences étaient « identiques ».
Pour elle, l’essentiel c’est qu’il y ait de « bons scénarios, une grande énergie et une vraie industrie cinématographique ».
« Ce n’est pas en réalisant un seul film que nous pouvons marquer notre passage dans la galaxie cinéma, même si cela n’enlève rien au mérite d’être réalisatrice. Le vrai défi c’est de réaliser d’autres films afin de pouvoir s’affirmer dans ce monde », a-t-elle ajouté.
Les spécialités cinématographiques « ne s’improvisent pas »
De son côté, la réalisatrice du film « Rachida », Yamina Chouikh, estime que le manque de femmes réalisatrices « n’est pas forcément lié aux mentalités ou d’éventuels comportements machistes, mais concerne en premier lieu la formation dans les métiers de cinéma ».
« Cet art ne se limite pas uniquement à la comédie ou à la réalisation. Mis à part le montage, le script ou le maquillage, la femme n’exerce pas les autres métiers de cinéma, comme la réalisation, la prise de vue, le son ou encore le bruitage », a-t-elle dit tout en estimant que cela est dû à l’absence d’établissements de formation spécialisés.
Elle souligne que les spécialités cinématographiques « ne s’improvisent pas », appelant à la création d’écoles de cinéma et d’un baccalauréat « cinéma » pour permettre aux personnes intéressées, hommes ou femmes, de se former dans ce domaine.
Yamina Chouikh, qui s’est mise à la réalisation après une trentaine d’années passées dans le montage de films, pense aussi que s’il n’y a encore que peu de réalisatrices de cinéma en Algérie c’est que les femmes « n’osent pas encore se lancer dans cette aventure ».
Elle préfère terminer sur cette note d’optimisme: « Tant qu’il y a des jeunes filles qui réalisent des courts métrages, je ne désespère pas. Elles finiront bien un jour par produire de longs métrages et s’imposer dans le monde de la réalisation ».
APS