« Les régimes arabes sont à changer radicalement »

Redaction

Pour le poète et critique littéraire syrien Ali Ahmed Saïd Esber, alias Adonis, «les régimes arabes sont à changer radicalement ». Dans une interview accordée au quotidien suisse le Temps hier lundi, le poète revient sur l’importance de refonder la société et d’imposer la laïcité afin de renforcer la citoyenneté.

« Les régimes arabes sont à changer radicalement, c’est indiscutable. Mais s’il s’agit de les remplacer par des gens qui partagent la même culture politique et les mêmes idéaux, nous sommes devant un simple conflit d’intérêts pour le pouvoir et non d’une révolution. Le problème, c’est de refonder la société, de changer la culture, les mentalités, dans l’horizon de la citoyenneté, de la laïcité, du respect de l’autre. Or cela n’a jamais été posé de cette manière », a déclaré Adonis dans une interview accordée au quotidien suisse le Temps.

L’auteur de La Prière et l’Épée, considéré comme l’un des plus grands poètes arabes vivants s’est insurgé contre la place de la religion « institutionnalisée». Reconnaissant l’échec des révolutions arabes qui n’ont entraîné selon lui aucun changement étant donné que « ceux qui sont arrivés au pouvoir sont des «gens qui sont en quelque sorte l’autre face des régimes précédents. Ce sont les mêmes discours, les mêmes références, les mêmes comportements qui sont à l’œuvre ». Pour le célèbre poète, né en 1930, il est impossible d’imaginer une révolution arabe si «le statut de la femme et sa libération de la loi islamique ne sont pas placés au centre ». Adonis évoque également la délicate question de «l’indépendance vis-à-vis de l’extérieur », comme étant un critère indispensable pour réussir une révolution.

Sur un autre plan, le poète met l’accent sur la nécessité d’adopter une éthique différente, en séparant notamment la mosquée et l’État. Or, sur tous ces plans là, rien ne s’est produit. Regrettant le fait que le monde arabe tend à perdre son identité en ne s’identifiant qu’à un seul point commun qu’est la religion, le critique littéraire affirme que «la religion n’est pas productrice d’identité. C’est en créant sa propre œuvre que l’être humain crée son identité particulière. On n’hérite pas d’une identité, on la crée. La religion vient du passé, tandis que l’identité est dans l’avenir». Adonis ne manque pas également de critiquer l’influence du monde occidental sur le monde arabe. Il estime que le premier défi des Arabes est de se libérer des Occidentaux pour enfin espérer construire leur propre identité.

Nourhane. S.

Quitter la version mobile