Livre. « Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère » d’Asma Guenifi est une œuvre bouleversante !

Redaction

L’auteur est un témoin des années noires en Algérie. 150 000 morts, victimes du terrorisme. Son frère aîné, Hichem est tué. Il avait vint ans. Ce livre n’est pas seulement un récit personnel, Asma Guenifi analyse les événements de cette tragédie historique. Elle dissipe un grand nombre de questions restées sans réponses, en invoquant des faits passés dans sa cité près d’Alger. A quatorze ans, elle voit s’ourdir la descente aux enfers de tout un peuple.

Elle raconte tout d’abord la naissance de son père, un miraculé, qui a survécu à des bombardements en 1956. Asma raconte la crucifixion de son grand-père par les français; mains et pieds cloués au mur. La force prudente de son père rescapé de la guerre. Ce dernier, devenu cinéaste, il se marie à la modern et a trois enfants : Hichem, le plus âgé, Asma et Rafik. La famille emménage à Bachdjarah, cité construite en 1970. Hichem aime la lecture et la musique. Il est « souriant et blagueur », « il a une telle sensibilité que tout le monde l’appelait le chat. ». Puis, le 5 octobre 1988 vient ternir l’atmosphère de l’enfance d’Asma.

Elle fait un bref rappel historique : l’accession au pouvoir du gouvernement Chadli, l’atomisation des entreprises étattiques, les montée du FIS, puis elle revient sur le changement soudain d’attitude de ses voisins ou amies lycéennes. Asma est la seule fille qui ne porte pas le foulard. Les hurlements chargent la cité de curieuses vapeurs d’insécurité.

Un vendredi, « un nuage ressemblant vaguement à l’écriture arabe apparut dans le ciel, on crut y voir inscrit le nom d’Allah(…) La télévision démontra que ce nom avait été obtenu par un moyen optique. Pour le prouver, on projeta dans le ciel, au-dessus du port, ces mots en arabe : « AAMEE SAID » (Bonne année). » écrit-elle.

Après l’assassinat de son frère, sa famille s’installe en France, connaît le racisme, et s’aperçoit des déformations des institutions et des médias français. Asma Guenifi découvre une autre version de l’histoire. Son « professeur d’histoire affirmait que c’était De Gaulle qui avait accordé l’indépendance à l’Algérie sans rien dire sur la guerre « et les morts algériens. « D’habitude je n’interviens jamais en classe, mais là c’était plus fort que moi. Je demandai au professeur pourquoi elle n’avait pas parlé des massacres de Sétif en 1945 et ceux du 17 octobre 1961 à Paris, de la torture pendant la guerre. J’ai ajouté qu’il était faux d’affirmer que De Gaulle avait bien voulu nous accorder l’indépendance, bien au contraire, nous l’avions obtenues grâce à notre long et dur combat et à des milliers de martyrs. Elle me répondit avec mépris que j’étais une nationaliste algérienne, et, en riant, que je venais d’un pays où les habitants voyagent à dos de chameaux et vivent sous les tentes ! »

Il existe des actes impardonnables, qui dépassent l’entendement humain et l’imagination. Asma ne pardonne pas aux assassins de son frère qu’elle nomme, qu’elle dénonce et qui ont entraîné son exil.

La révolte et l’indignation est préférable au silence. Il est toujours temps de parler pour exprimer sa colère contre l’innommable cruauté des hommes. Le combat d’Asma se poursuit. Elle a crée l’Association des Femmes Euro Méditerranéennes contre les Intégrismes. Asma Guenifi est psychologue clinicienne psychanalyste et féministe.

Fadéla Hebbadj

Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère, Editions Riveneuve, 216 page, 12 euros.