L’Etat Algérien, grand thésaurisateur et mauvais gestionnaire par Hassan Haddouche

Redaction

Le fossé  se creuse entre le classement de notre pays en matière de constitution de réserves de changes voire de réserves d’or et ses performances dans les domaines de la croissance économique ou du climat des affaires. Dans le premier cas, l’Algérie figure depuis plusieurs années dans le peloton de tête des pays qui épargnent. Dans le second, elle s’enfonce chaque année un peu plus dans les profondeurs des classements internationaux, quand elle ne fait pas carrément figure de mauvais élève.

Si on en juge par les différents rapports, études et classements publiés par les institutions financières internationales, l’Algérie est parvenue depuis une dizaine d’année à constituer d’importantes réserves qui lui permettent de se positionner en créancier  du système financier international. Les mêmes études montrent que notre pays n’a pas été capable en revanche de transformer cette aisance financière en croissance économique et encore moins en capacité d’attraction de l’investissement privé. Grand thésaurisateur et épargnant éventuellement avisé, l’Etat algérien apparaît également comme un piètre gestionnaire.

Des Algériens cousus d’or

Un rapport récent du Conseil mondial de l’or classe l’Algérie à la 24e place mondiale des pays détenteurs de réserves officielles en or. Avec des réserves estimées à plus de 173 tonnes d’or en 2012, notre pays détient plus de 4% des réserves mondiales et occupe le premier rang en Afrique où il devance la Libye et même l’Afrique du Sud. Dans le monde arabe, l’Algérie n’est précédée que par l’Arabie Saoudite et le Liban qui manifestent la même inclination que notre pays pour le précieux métal. Ils ne sont d’ailleurs pas seuls dans ce cas. Les principaux pays industrialisés, Etats-Unis en tête , qui en détiennent près de 8 000 tonnes, ainsi que l’Allemagne, la France  et l’Italie occupent la tête de ce classement et ont accumulé des stocks colossaux de la relique barbare.

Dans le “top ten” des réserves de changes

C’est en matière de constitution de réserves de changes que les classements de l’Algérie sont les plus flatteurs. Au train où vont les choses, elle pourrait même bientôt figurer dans ce domaine parmi les dix premiers pays de la planète. En 2012, les 190 milliards de dollars de réserves de notre pays lui permettent de pointer en 11e position juste derrière l’Allemagne mais devant des pays industrialisés comme la France, l’Italie et le Royaume-Uni.

C’est la Chine qui est la championne des réserves de changes avec le montant faramineux de 1800 milliards de dollars devant le Japon, la Russie et l’Inde. L’Algérie est en tête des pays africains mais aussi des pays arabes qui pour nombre d’entre eux disposent pourtant de revenus plus importants que les nôtres. Cette situation est le résultat d’un arbitrage des autorités financières algériennes qui singularise notre pays par rapport aux autres pays arabes exportateurs de pétrole.

Réserves de changes contre fonds souverains

La plupart de ces derniers ont en effet opté depuis des années pour la constitution de fonds souverains pour abriter une part importante de leurs réserves financières. C’est pour cette raison qu’on les retrouve en tête des palmarès établis dans ce domaine. Le numéro un est le Fonds d’Abou Dhabi qui gère près de 900 milliards de dollars, devant un Fonds saoudien et le Government Pension Fund norvégien qui disposent chacun de plus de 400 milliards de dollars. Les fonds koweitiens, émiratis, libyens et qataris figurent également en tête de ce classement. Le Fonds de régulation des recettes algérien apparaît également dans ces classements internationaux où il pointe en 13e position.

La priorité donnée à la constitution de réserves de changes par l’Algérie a eu dans la période récente deux conséquences notables. Elle a tout d’abord permis à notre pays d’éviter les conséquences de la dernière crise des marchés financiers  qui a frappé durement ( mais provisoirement) les pays ayant constitué des fonds souverains importants.

Elle place également notre pays dans une position de partenaire à ménager par les institutions financières internationales. La “bonne santé” financière de notre pays fait ainsi régulièrement l’objet d’une appréciation élogieuse de leur part. C’est ce que confirmeront encore  la semaine prochaine  les réunions de printemps des institutions de Bretton woods. Les   rapports  du FMI sur les perspectives de l’économie mondiale ne manqueront pas d’annoncer des excédents conséquents ( bien qu’en diminution sensible) de la balance des paiements algériens en 2013 et 2014 et donc une poursuite de l’accumulation de réserves de changes. Une situation qui place l’Algérie en position de créancier net d’un système financier international dont les principaux gestionnaires se félicitent des placements réalisés par notre pays en bons de Trésor des principaux pays développés confrontés aujourd’hui à d’importants déficits budgétaires. Pourvu que ça dure….