Le modèle économique algérien de ces 15 dernières années, basé sur la rente et la dépense publique, doit radicalement évoluer. C’est le constat que dresse Rachid Sekak, ex-directeur de dette extérieure de la Banque d’Algérie et ex-directeur général de HSBC Algérie.
Dans une conférence à Londres, le 8 octobre en cours, ainsi que dans un article publié sur Orient XXI, en mars dernier, la banquier algérien dresse un bilan de la situation économique actuelle et établit une liste des remèdes que l’Algérie doit s’administrer d’urgence. Il reste optimiste et pense que cette période d’instabilité financière doit être une opportunité à saisir par le gouvernement et la société algérienne. Comme d’autres économistes, à l’instar de Mihoub Mezouaghi, que nous citions récemment, M. Sekak relève qu’il faut profiter de la crise qui se profile pour diversifier l’économie algérienne et donc, se tourner vers d’autres industries que celle du pétrole. Le niveau actuel de la dette algérienne, plutôt faible, et les importantes réserves de changes offrent au gouvernement un biais idéal pour ouvrir un grand programme de réformes. Il s’appuie sur des axes primordiaux : une croissance économique forte et durable, une économie compétitive et une économie diversifiée (grâce à une meilleure production locale et à plus d’exportations). Cette stratégie doit être entretenue par une forte politique de création d’emplois. Mais comment mettre en place ces axes ? Rachid Sekak fait part au gouvernement algérien de recommandations très claires.
Une nouvelle gestion des finances publiques
D’abord, plaide-t-il, il faut revoir complètement la gestion des finances publiques, améliorer l’efficacité de l’investissement public et avoir une approche plus disciplinée de la gestion des dépenses. Il faut que le climat des affaires soit plus ouvert, plus coopératif. Rachid Sekak note que le gouvernement a depuis quelques temps réalisé que cela devenait une priorité. Des secteurs privés plus forts et plus diversifiés doivent émerger, et cela passe par des crédits plus importants accordés aux petites et moyennes entreprises ainsi que par un support plus général à l’entrepreneuriat.
Enfin, la politique énergétique doit être revue dans son intégralité car la consommation domestique nationale doit devenir plus diversifiée. Le cadre institutionnel d’investissement dans ce secteur doit devenir plus attractif.
Pour M. Sekak, l’optimisme doit être de rigueur en raison du consensus politique autour de la nécessité de ces réformes. La société algérienne souhaite un changement imminent, et le dialogue avec le secteur privé est bien meilleur qu’auparavant.
Le mode de gouvernance doit lui aussi évoluer. Dans l’article publié en mars pour Orient XXI, l’ancien banquier d’HSBC Algérie a fait la promotion d’un nouveau type d’administration « recentrée sur les exigences du terrain et pour laquelle écoute, accompagnement, information et communication sont les maîtres mots ». Dans un tel cadre, il a précisé que « le texte réglementaire n’interdit plus mais trace des manières de faire, promeut les innovations et les initiatives ».
Dans ce même article, l’expert algérien a également évoqué la nécessité de la mise en place d’un « plan national de l’emploi » et d’une « politique consciente et organisée de formation professionnelle ». Enfin, la régulation de l’économie informelle et un cadre institutionnel qui limite la corruption aux plus hauts niveaux sont aussi abordés comme autant de preuves imminentes d’un gaspillage d’argent mal ou peu contrôlé. Une fonction publique plus efficace, un secteur privé plus compétitif, un climat d’affaire attractif, une diversification du secteur productif, une économie informelle régulée : autant de chantiers que l’Etat algérien peut enfin prendre en main face à la situation financière peu alléchante qui s’ouvre à lui. La société algérienne espère qu’il sera au rendez-vous de ces défis de l’avenir.