Exclusif. Des importateurs et trois agences bancaires de l’Arab Gulf Bank impliqués dans le transfert illicite de 400 millions d’euros à l’étranger

Redaction

C’est un scandale qui a remué  tout le gouvernement algérien. Mardi, les douanes algériennes ont reconnu qu’un montant de près de 400 millions d’euros a été transféré de l’Algérie vers l’étranger, en 2013 et 2014, à travers une banque privée à capitaux étrangers activant en Algérie. Or, les douanes n’ont guère voulu révéler le nom exact de cette étrange banque. 

Et pourtant, le scandale va faire couler beaucoup d’encre puisque des opérations illicites « ont été mises au jour suite à une vaste opération de contrôle lancée, en mars de l’année dernière, par les services douaniers dans le cadre de l’apurement des opérations d’importations », avoue aussi la direction générale des douanes dans une déclaration faite à l’APS.  Une révélation qui manque cruellement de plusieurs détails concrets. Algérie-Focus a contacté plusieurs sources proches de la Banque d’Algérie pour connaître les tenants et aboutissants de ce scandale. Selon nos sources, cette fameuse banque privée activant en Algérie est l’Arab Gulf Bank (AGB). Trois agences bancaires de cette Banque à capitaux koweïtiens sont réellement impliquées dans ses opérations de transfert illicite des 400 millions d’euros à l’étranger. Comment cela s’est-il produit ? La manœuvre est, en réalité, très simples. Les trois agences de l’AGB, basées à Blida, Sétif et Alger, travaillaient pendant deux ans, 2013 et 2014, avec un portefeuille clients véreux, à savoir des importateurs qui sont en vérité des importateurs fictifs avec des registres de commerce loués.

Ces dizaines d’importateurs faisaient de fausses déclarations d’importation et importaient des « produits bon à jeter » qui ne prenaient la peine de les récupérer au niveau du Port d’Alger. Il s’agit plus exactement, nous apprennent nos sources, de chaussures déchirées, de vêtements abîmés, de fruits et légumes périmés et de gravats ainsi que de divers déchets. Ces importateurs mafieux recouraient aux services des trois agences de la banque AGB pour réaliser ces opérations frauduleuses. L’AGB leur offrait la domiciliation bancaire et l’ordonnance de paiement du fournisseur sans procéder à la moindre vérification concernant leurs activités douteuses.

« Ces trois banques n’ont pas violé clairement la loi. Mais elles ont été étrangement laxistes puisqu’elles n’ont même pas exigé un document de mise en consommation des produits qui seront importés. Ces banques n’ont pas accompli des visites de terrain pour au moins vérifier si ces importateurs activent réellement comme ils le prétendent », regrettent une source proche d’une grande banque internationale installée en Algérie. D’après une autre source bancaire, les responsables de l’AGB se sont contentés d’exiger juste une facture et le titre de transport à destination exclusive du territoire douanier algérien conformément à l’article 44 du règlement 01 07 de la Banque d’Algérie. Or, par mesure de précaution, l’AGB aurait dû exiger davantage de documents normatifs pour connaître les véritables attentions de ces importateurs véreux. Laxisme ou complicité ? La banque d’Algérie poursuit toujours son enquête. Mais en attendant, les trois agences bancaires de l’AGB ont été privées de leur agrément de commerce extérieur. Elles ne pourront plus réaliser des opérations d’importations domiciliées.

Ceci dit, pour de nombreux acteurs et observateurs du secteur bancaire en Algérie, ces gros scandales risquent de se multiplier encore à l’avenir car la réglementation actuelle de la Banque d’Algérie demeure insuffisante pour empêcher ces opérations frauduleuses puisque les banques dans notre pays ne sont même pas tenues par la loi en vigueur d’effectuer des « visites clients » pour contrôler la fiabilité de ces importateurs qui se présentent dans les agences bancaires pour demander l’ouverture d’un crédit documentaire. Et dans ce contexte, les importateurs mafieux font évader leurs devises sans même pas se présenter aux douanes du port avec des factures domiciliées pour récupérer leurs marchandises. Celles-ci restent abandonnées dans des centaines de containers sur les quais du port jusqu’à ce que l’escroquerie soit découverte par un pur hasard…

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