Hydrocarbures/L’Algérie pourrait ne pas investir 90 milliards de dollars si…

Redaction

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Pour se refaire une santé « financière », l’Algérie cherche à augmenter ses quantités exportables en hydrocarbure. Et pour ce faire, le programme d’investissement du groupe pétrolier Sonatrach sur la période 2015-2019 s’établit à plus de 90,6 milliards de dollars. Un immense budget que l’Algérie doit mobiliser au moment où elle est sévèrement frappée par des tensions financières provoquées par la chute brutale des prix du baril de pétrole. 

En dépit de cette conjoncture défavorable liée notamment aux déficiences constatées dans les recherches de nouveaux gisements exploitables, les autorités algériennes ont décidé de maintenir ce cap en poursuivant ce plan d’investissement qui coûtera très cher au Trésor public. Une stratégie qui ne fait pas l’unanimité parmi les experts et économistes qui doutent de la fiabilité de cette feuille de route. Preuve en est, l’expert en finances et management stratégique, Mohamed Kessal, estime que le gouvernement doit vraiment revoir sa copie à propos de cet investissement massif qui risque de s’avérer inefficace. « Il est clair que l’Algérie doit trouver rapidement des solutions pour capter de la ressource et même en devises pour renforcer les positions devises du pays. L’industrie pétrolière demeure stratégique à cet égard. Mais au lieu d’investir 90 Mds/USD sur fonds propres, ce qui est très risqué et coûteux, l’Algérie doit revenir à la première mouture de la loi sur les hydrocarbures à l’époque de Chakib Khelil d’autant plus que cette loi avait introduit via son article 55 l’obligation à l’investisseur étranger de dépenses ses devises à partir de l’Algérie ce qui aurait permis en ces temps difficiles de réduire le déficit actuel de la balance des paiements en récupérant un cash flow intéressant qui aurait participé à résorber le déficit causé par la baisse des prix des exportations d’hydrocarbures », analyse notre expert.

« Il faut reconnaître une vérité: le  principe du 49/51 n’est pas attractif et n’a pas attiré des investisseurs étrangers dans le secteur des hydrocarbures en Algérie. Le bilan des dix dernières années le démontre parfaitement: même avec un baril à 120 USD,  le ROE (retour sur capital) n’est pas intéressant pour une major du domaine pétrolier », explique Mohamed Kessal qui invite les décideurs algériens à se remettre en cause pour pouvoir repenser leur politique énergétique. « Explorer de nouveaux gisements et installer de nouvelles unités de production coûte dans les environs de cinq milliards de dollars à un investisseur étranger. C’est un investissement lourd qui mobilise des fonds et des moyens logistiques importants. En plus, nos gisements ont la caractéristique d’être des gisements moyens contrairement aux gisements de l’Arabie Saoudite. La quantité exploitable de leurs hydrocarbures ne peut durer en moyenne au-delà de 15 à 20 ans. Si, au final, cet investisseur, à l’image d’une grande compagnie pétrolière, ne peut pas détenir la majorité dans le capital de son projet d’investissement, il ne sera jamais intéressé de venir s’installer en Algérie », décrypte Mohamed Kessal qui a collaboré pendant des années avec des compagnies pétrolières dans le cadre de leurs projets d’investissement en Algérie.

Pour notre interlocuteur, au lieu de doter Sonatrach d’un immense budget de 90 milliards de dollars, qu’il faut d’abord trouver en ces temps de disette financière, il est préférable de « revenir au principe de la souveraineté fiscale (74%) et celle du sous-sol, en acceptant de renoncer à la souveraineté du capital qui ne veut plus rien dire de nos jours dans le secteur énergétique, vu qu’on ne maîtrise plus les prix sur les marchés mondiaux. Le plus important est, surtout, de garder un niveau élevé de la fiscalité pétrolières pour renflouer les caisses de l’Etat ». Notre expert assure qu' »une telle approche permettra de récupérer des IDE stratégiques et pourvoyeurs de devises à l’investissement et en recettes export vu les nouvelles recettes fiscales que l’Algérie peut engranger ». Mais pour ce faire, il faudra lancer un grand débat national sur les lois qui régissent les hydrocarbures dans notre pays. Ce débat doit se poser en termes sains et loin de toute démagogie pour aboutir à la solution la plus indiquée et qui permettra à l’Algérie de devenir un véritable acteur mondial de l’énergie, au lieu de se cantonner dans son petit rôle d’exportateur de gaz et de pétrole.