Il n’y a pas que les importateurs algériens qui transfèrent illégalement des devises à l’étranger. D’importantes et prestigieuses sociétés internationales établies en Algérie recourent également à ces pratiques qui nuisent à l’économie nationale. Et suite à une mission spécifique de la Banque d’Algérie, qui a duré plus de trois mois, un PV d’infraction a été établi par ses inspecteurs. Un PV qui doit être réglementairement suivi d’un dépôt de plainte contre la filiale algérienne du géant français du transport maritime, CMA CGM Algérie.
La Banque d’Algérie accuse cette grande entreprise française, le troisième groupe mondial du transport maritime, d’avoir transféré des dividendes de résultats financiers non liées à son activité principale, à savoir le transport maritime. En clair, la Banque d’Algérie reproche à CMA CGM d’avoir transféré en France, des recettes en devises qui proviennent d’autres activités commerciales pour lesquelles cette entreprise ne dispose pas d’un registre de commerce. Ce qui constitue une violation de la législation algérienne. Les inspecteurs de la Banque d’Algérie ont donc constaté, au cours de leurs investigations, une infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger.
Mais que reproche-t-on concrètement à la CMA CGM ? Selon des sources proches de la Banque d’Algérie, l’entreprise française aurait transféré des dividendes constituées de résultats de placements financiers dans des banques installées en Algérie et ce, depuis 2013. En réalité, cette multinationale a placé beaucoup d’argent dans des banques notamment l’Arab Gulf Bank (AGB) et après avoir récolté des gains importants, elle a transféré vers la France les intérêts réalisés suite à ces placements bancaires. La CMA CGM a également transféré d’importantes sommes de devises récoltées grâce à la location de plusieurs bureaux de son siège, une grande tour située dans le très prisé quartier des Affaires à Bab Ezzouar, révèlent des sources proches de la Banque d’Algérie.
« Cet argent ne provient pas de services réalisés par cette entreprise. Il s’agit donc de recettes non-transférables à l’étranger, comme l’indique clairement notre législation, car CMA CGM dispose d’un registre de commerce d’armateur et non celui d’une agence immobilière », expliquent nos sources selon lesquelles CMA CGM dispose d’une assise financière considérable en Algérie. Il s’agirait de près de 100 millions de dollars qui seraient bloqués ici et que cette entreprise française cherche à transférer pour renflouer les caisses de la maison-mère, au moment où celle-ci est malmenée par la crise. Contactée par Algérie-Focus, la direction générale de CMA CGM Algérie s’est refusée à tout commentaire. Elle s’est, à peine, contentée de démentir l’existence d’une quelconque plainte ou action menée à son encontre par la Banque d’Algérie. Mais elle a refusé de fournir la moindre explication.
« Je ne peux pas vous révéler les détails confidentiels concernant nos relations avec la Banque d’Algérie. J’ai des contacts à la Banque d’Algérie et dans les douanes algériennes. Mais je ne peux rien vous affirmer ou infirmer », a indiqué le PDG de CMA CGM qui a pris attache avec nous au téléphone, sans vouloir révéler son identité !