La saison touristique tire à sa fin, l’heure pour les touristes algériens de retrouver les chemins des aéroports va bientôt sonné. Une période de fortes affluences décisive pour Air Algérie, la compagnie aérienne nationale, dans la tourmente depuis le crash du vol AH 5017. Interrogé par la rédaction d’Algérie-Focus, Omar Aït Mokhtar, président du Mouvement citoyen algérien en France (MCAF), estime que la direction d’Air Algérie est victime d’un « sabotage en interne ». Interview.
Propos recueillis par Djamila Ould Khettab
Vous avez récemment voyagé avec Air Algérie entre Paris et Alger. Comment s’est déroulé le vol ?
Bien. Seulement, à l’atterrissage à Alger, on a attendu plus de 45 minutes le bus. Ce n’est pas normal, le commandant de bord a dû commandé ce bus auprès de la direction de l’aéroport. Pourquoi ce retard ? La chaîne complète ne fonctionne pas, en fait ! Le capitaine de l’avion aurait dû faire un rapport et dénoncer ce retard. Au lieu de cela, les équipages ne se plaignent jamais. Et dans ce genre de situation, les pilotes d’Air Algérie n’informe jamais les passagers de ce qui se passe. Le retard des bus dans les aéroports ne relèvent pas de leur compétence mais étant donné qu’ils ne communiquent pas avec les passagers, ces derniers accusent systématiquement Air Algérie.
La compagnie étatique a multiplié les couacs ces dernières semaines, notamment les disparitions d’un enfant et des bagages dans un vol reliant Sétif à Lyon …
Une partie des bagages des voyageurs qui se rendaient à Lyon a effectivement été égarée le 18 août dernier. Ce n’est pas un cas isolé. J’ai déjà été moi-même victime de vol de bagages, c’est même devenu ma phobie. Depuis, je ne mets jamais de bagage en soute. A Roissy-Charles-de-Gaulle, les Algériens ont même le record de nombre de litiges concernant la perte ou le vol de bagage. Quand un bagage en provenance d’Algérie est perdu ça signifie tout bonnement qu’il a été volé.
Il y a également eu la sortie de piste évitée de justesse à Lille…
C’est incompréhensible. Le roulage est une opération très simple d’un point de vue technique, il suffit d’avoir les manettes de l’avion bien en mains. Soit le capitaine de cet avion s’est endormi, soit il a fait exprès, ce n’est pas possible autrement. Il y a une confrontation en interne chez Air Algérie et une volonté de sabotage de certains.
Des éléments de la compagnie nationale chercheraient à nuire à leur propre entreprise, selon vous…
Oui, l’équipe dirigeante est visée. Mohamed Salah Boultif ne plaît pas à certains. Et pourtant c’est un PDG qui connaît bien l’aérien, il bénéficie également d’une expérience à l’étranger.
Qu’est-ce qui vous fait penser cela ?
Le communiqué du syndicats des pilotes d’Air Algérie diffusé au lendemain du crash, qui avertit des lacunes de la sécurité de cette compagnie. C’est une trahison, ça n’aurait pas dû se faire à ce moment. C’est bien avant qu’il fallait prévenir.
A votre avis, Air Algérie a-t-elle bien géré l’affaire du crash du vol AH 5017 ?
Oui, elle a bien réagi en annulant tous les vols des trois avions, du même modèle que celui qui s’est écrasé le 24 juillet, affrétés auprès de la compagnie espagnole Swiftair. Mais cette annulation a forcément entraîné des retards voire des reprogrammations de vols au pire moment, en pleine saison touristique et avec les départs pour le hadj. Mais c’était la meilleure solution. Imaginez un autre crash d’Air Algérie, ça aurait été la catastrophe. En revanche ce qui manque cruellement à Air Algérie c’est une bonne communication !
Air Algérie s’est construite une bonne réputation à l’échelle planétaire ces dernières années, réussissant ainsi à intégrer le Top 100 des meilleures compagnies internationales. Comment peut-elle préserver sa bonne image ?
Il lui faudra bien négocier les trois prochaines semaines, celles du retour des voyageurs algériens en Algérie et du retour des immigrés en France et dans leur pays de résidence. Cela signifie : informer ses clients des retards et de tous les problèmes auxquels font face les équipages.
Sur l’aspect technique, les équipages d’Air Algérie n’ont pas à rougir. C’est une compagnie fiable, qui assure la sécurité de ses passagers mais la communication de l’entreprise reste défaillante.
Votre combat au sein du MCAF porte avant tout sur la cherté des billets d’avion entre la France et l’Algérie. Du mieux à ce niveau ?
Depuis avril, on a effectivement constaté une baisse des prix mais il reste encore des offres à 700 euros en été, ce qui n’est ni justifié ni supportable pour les immigrés de France. Outre la stabilité des prix, notre association revendique l’augmentation du trafic entre les deux pays, il devrait y avoir plus de vol. Nice-Alger ou Paris-Alger devraient être des navettes avec des vols toutes les heures à prix raisonnable.
Depuis l’élection présidentielle, je remarque qu’on est de plus en plus écouté. Le cabinet du ministre des Transports Amar Ghoul nous a reçus deux fois depuis avril et nous avons également discuté avec le PDG d’Air Algérie, Mohamed Salah Boultif. Le dialogue est enfin établi, avant leurs portes nous étaient fermées. Mais il faut encore plus de transparence !