« L’Algérie va faire un bond de 10 ans dans le temps avec l’arrivée de la 3G »

Redaction

3G. Nous n’avons que ce mot à la bouche ces derniers temps, mais savons-nous réellement ce qu’elle représente et à quoi elle sert ? Des questions simples aux réponses complexes, auxquelles Jean-Michel Huet, Directeur associé et chargé du Développement International au sein du cabinet de conseil BearingPoint répond. Ce dernier a notamment développé des expertises dans le domaine des télécoms en Afrique, connaît bien cette problématique. Il explique à Algérie-Focus, les bouleversements que va provoquer l’arrivée de la 3G. 

Pourriez-vous définir en quoi consiste la 3G. A quoi sert-elle, et quelle est la différence entre la 2G et la 3G ? 

La 3G est le nom grand public de la 3ème génération de téléphonie mobile. La première était le Radiocom 2000 dans les années 80, la seconde (2G) est le GSM que nous connaissons tous. Depuis 2000, une nouvelle norme, l’UMTS, a été développée par les équipementiers télécoms. C’est elle que l’on nomme communément la 3G. La différence majeure avec le GSM (et les niveaux intermédiaires type GPRS ou EDGE appelés eux 2,5G et 2,75 G) est de permettre un accès rapide pour l’utilisateur à de la « donnée ». Je m’explique. Jusqu’à ce jour, la 2G permet essentiellement l’accès à la voix (le service de base des télécoms) et à quelques services textuels comme les SMS ou l’USSD. La 3G, avec des débits de connexion plus élevés, permet de franchir une étape nouvelle et de donner accès à plus de données. Par données on entend les données informatiques numérisées soit les pages web, la musique, la vidéo, etc. L’application typique est l’internet mobile puisque la 3G permet l’accès rapide aux sites web mais aussi aux webTV, à la géolocalisation.

Que va réellement apporter la 3G à notre pays ?

C’est un bond dans le temps de 10 ans que va faire d’un coup l’Algérie en passant à la 3G. Cela permettra à chaque algérien d’avoir Internet dans sa poche. Le GPRS ou l’EDGE le permettait déjà mais à des débits d’une lenteur insupportable alors que la 3G va permettre un vrai accès rapide. J’étais à Alger en début d’année et je peux garantir que chacun verra la différence. La 3G c’est la démocratisation de l’accès à Internet et donc l’accès à des services et des contenus nouveaux.

Comment voyez-vous l’installation de la 3G en Algérie. Sera-t-elle efficace  et rapide dès ses débuts? A votre avis, quel prix serait légitime pour accéder à cette nouvelle technologie ?

Cela dépend de l’investissement des opérateurs télécoms dans le réseau et de la qualité de service associée. Cependant, il faut noter d’expérience que l’accès à des vidéos, à des contenus seront fortement demandés. Ceci sous-tend deux conditions en sus. D’une part, une excellente interconnexion des réseaux algériens avec ceux des autres pays du monde. D’autre part, l’existence de production de contenu au niveau local, en Algérie même, tant sur le fond de la production que sur le stockage des données. Quant au prix c’est un équilibre complexe entre un montant qui permet la démocratisation de l’Internet mobile et un montant qui permet aux opérateurs de gagner de l’argent pour préparer les prochains investissements.

La 3G va-t-elle créer de l’emploi en Algérie ?

De l’exemple des autres pays, oui, sous réserve que la 3G rencontre un succès populaire – on revient à votre question précédente. Je suis optimiste sur l’impact positif de la 3G sur l’emploi algérien, en dehors des aspects ingénierie des premiers mois pour construire le réseau. D’une part, car cela va accroître au global le succès des télécoms et donc les emplois associés (vendeurs de carte à gratter, logisticiens, maintenance des antennes, services clients des opérateurs, etc.). D’autre part, pour que la 3G soit un succès il faut le développement d’un écosystème de services, de contenus à fort dominante locale. La 3G a montré que la culture locale des pays est un enjeu important pour les habitants. Si la 3G permet l’accès à la culture américaine, coréenne ou française, elle permet aussi et surtout l’accès à des contenus très ancrés dans le territoire. Il  y aura donc des emplois créés dans le domaine des contenus, de l’art, des services, etc.

La 3G n’a pas encore été introduite, et pourtant on évoque déjà la possibilité de mettre en place rapidement la 4G. Serait-ce la prochaine étape pour l’Algérie ? Peut-elle espérer l’adopter très prochainement ?

Parmi les grands pays, soyons honnêtes, l’Algérie est un des derniers à adopter la 3G. Il y aura donc un temps d’absorption des investissements associés au déploiement de ce réseau. La 4G est donc la 4ème génération (LTE en nom technique), à ce jour, surtout déployée aux Etats-Unis et en Asie. Elle prendra son sens en Algérie sous trois conditions : que les opérateurs actuels aient amortis leur investissement actuel en 3G ; que l’usage de l’accès à Internet et ses contenus ait pris une vraie ampleur nécessitant toujours plus de débit d’accès et enfin que le marché algérien des télécoms s’ouvre à des acteurs internationaux reconnus.