Le paiement par chèque demeure une chimère en Algérie

Redaction

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Le débat autour de l’application de la mesure relative au paiement par chèque des transactions commerciales, du moins celles dont le montant est supérieur à 500 000 dinars (50 millions de centimes), refait encore une fois surface. Lundi 13 mai, lors d’une conférence de presse, le Ministre du Commerce, Mustapha Benbada, a indiqué que «des propositions ont été transmises au Ministère de finance» afin de mettre en application cette mesure.

 «Nous avons présenté au ministère des Finances des propositions opérationnelles pour instaurer le recours au paiement par chèque pour les montants égaux ou supérieurs à 500.000 dinars dans certaines transactions commerciales pour ne pas perturber le marché et le bon fonctionnement de l’économie nationale», a-t-il déclaré.

Jamais un pays n’a trouvé autant de difficultés pour imposer le paiement par chèques lorsqu’il s’agit des grandes sommes. Le décret en question est prêt depuis quelques années. Mais à chaque fois son application est remise en cause pour différentes raisons. «Ce sera une occasion pour vérifier si le système financier est prêt à prendre en charge les retombées de l’application d’une telle mesure», a ajouté le Ministre.

La dernière fois que cette mesure allait être appliquée remonte 2010, lorsque le gouvernement avait pris la décision de mettre en application le décret 10-81 «fixant le seuil applicable aux opérations de paiements devant être effectuées par les moyens de paiement à travers les circuits bancaires et financiers». Son entrée en vigueur était programmée pour le 31 mars 2011. Seulement voilà : début janvier, des émeutes éclatent à travers plusieurs villes du pays. Des manifestations qui ont coïncidé avec la hausse des prix de certains produits de première nécessité comme le sucre et l’huile. Si certains ont estimé que ces émeutes sont dues essentiellement à cette hausse, d’autres ont évoqué le marasme dans lequel évolue une bonne partie de la jeunesse algérienne. Néanmoins, certains analystes ont « flairé» une manipulation de la part des grossistes qui étaient fortement réticents à la mise en application du règlement par chèque. D’ailleurs, à la veille de son entrée en vigueur, le gouvernement avait décidé de la mettre en berne. Le chèque n’était finalement pas exigé et tout est «rentré dans l’ordre». Etant donné que les mêmes causes produisent les mêmes effets, il est à se demander pourquoi le Ministre du commerce revient en ce moment précis à la charge, même s’il évoque une application «partielle» de la mesure.

Les autorités publiques ont  déjà du mal à «calmer» les jeunes chômeurs du Sud. Ainsi, ils multiplient les initiatives «d’apaisement» à leur endroit.  L’Etat va-t-il  donc prendre le risque de se lancer dans un bras de fer contre les barons du marché informel de gros ? Rien ne l’indique pour l’heure à moins que ça ne soit que de la démagogie bienveillante étant donné que la conférence de presse durant laquelle le Ministre a fait ces déclarations concernait entre autre la lutte contre le commerce informel. De l’avis de plusieurs observateurs avertis, il est clair que le gouvernement n’entreprendra aucune initiative qui risque de provoquer des émeutes, d’autant plus que le pays est à moins d’une année d’un rendez-vous politique majeure, à savoir  l’élection présidentielle de 2014. Connaissant la «facilité» avec laquelle l’Etat cède devant l’informel, un secteur qui emploie un grand nombre d’algériens, l’obligation de l’utilisation du chèque dans les transactions commerciales n’est pour l’instant qu’une chimère.

Elyas Nour