Le président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), Réda Hamiani, ne tarit plus d’éloges sur le nouveau gouvernement. Au début de la semaine , il faisait encore un compte rendu quasi dithyrambique de la récente rencontre de son organisation avec Abdelmalek Sellal.
«Nous avons trouvé auprès du Premier ministre toute la disponibilité et la sollicitude que nécessite la construction d’une proximité entre le public et le privé», s’est félicité M.Hamiani. Selon lui, M. Sellal a manifesté « une grande capacité d’écoute à l’exposé de tous les plaidoyers de la délégation du FCE s’intéressant plus particulièrement aux propositions opérationnelles devant déboucher sur des solutions concrètes». Pour faire bonne mesure, le FCE a réitéré par la voix de son président son «adhésion à la politique actuelle en matière économique conduite par les pouvoirs publics et confirme sa disponibilité à travailler sans relâche à son succès»
Le message des patrons algériens
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Il faut dire que dans la période la plus récente, Les pouvoirs publics ne sont pas restés insensibles aux soucis exprimés par les représentants des patrons algériens. Après avoir surtout profité dans une première étape aux fonctionnaires puis aux micro-entreprises, à travers la série de mesures adoptées par un célèbre Conseil des ministres de février 2011, les largesses financières de l’Etat se sont étendues plus récemment aux PME algériennes.
La plupart des représentants du patronat algérien s’étaient d’abord montrés très réservés vis-à-vis des mesures adoptées en faveur de la micro entreprise. Les décisions prises dans le sillage des émeutes de janvier 2011 ont un caractère «purement social», avait estimé Reda Hamiani. De son côté, Zaim Bensaci, président du Conseil national de la PME avait déploré le fait que l’Etat cherche à créer de nouvelles PME alors qu’il ne fait pas assez pour aider les entreprises privées déjà existantes et qui sont en difficulté. « Le patronat algérien veut sa part de la rente » commentait de façon désabusée Abderrrahmane Hadj Nacer à l’occasion d’une table ronde organisée l’année dernière. Le message des patrons algériens semble en tous cas avoir été reçu 5sur 5 par les pouvoirs publics. Il s’est traduit essentiellement par la mise en place de deux dispositifs de rééchelonnement des dettes des entreprises privées décidés à la faveur des réunions tripartites organisées en mai et septembre 2011.
Dettes bancaires : 200 milliards de dinars à rééchelonner
Le rééchelonnement des dettes bancaires des PME en situation de difficulté financière a été la première des mesures annoncées au profit des entreprises privées. Selon M. Karim Djoudi, le dispositif devrait concerner, au total, près de 3 000 PME et traiter un volume de dettes de 200 milliards de dinars ; 80 milliards d’agios étant pris en charge par le Trésor public.
Fin novembre dernier le ministre des Finances indiquait que cette opération a atteint « un niveau de traitement de près de 70%, soit près de 127 milliards de DA » .Selon M. Djoudi, l’annulation des « agios » pour les entreprises bénéficiaires du rééchelonnement a déjà coûté au Trésor public 35 milliards de DA depuis l’entrée en vigueur du dispositif. Cet aspect «subventionnel» des décisions adoptées par les pouvoirs publics représente une très généreuse bouffée d’oxygène consentie à des entreprises défaillantes .Il a été très bien accueilli par plusieurs organisations patronales qui se félicitait encore récemment de son bon degré d’avancement. Commentaire d’un expert financier : « Dans les faits, outre l’allongement de la période de remboursement, le dispositif de rééchelonnement offre la possibilité aux entreprises en difficulté de retrouver des équilibres et d’améliorer leurs performances durant une période de cinq ans au cours de laquelle le fardeau de leur endettement est entièrement supporté par le contribuable. Sur le papier, la démarche semble intéressante. A la condition que tous les acteurs jouent le jeu et que les banques, au cœur du dispositif, acceptent de soutenir de manière proactive des entreprises dont les difficultés financières sont le plus souvent la traduction de criantes lacunes managériales ».
Des « excès » dans le rééchelonnement des dettes fiscales
Les résultats obtenus dans le cadre du dispositif de rééchelonnement des dettes fiscales des PME, opérationnel seulement depuis le mois d’avril 2012 , sont plus mitigés. La procédure concerne théoriquement l’ensemble des entreprises qui en font la demande, à l’exclusion de celles qui ont fait l’objet d’un dépôt de plainte par l’Administration fiscale pour manœuvres frauduleuses. Toujours dans son bilan d’étape dressé à fin novembre dernier Karim Djoudi reconnaissait que l’opération « avance moins bien et moins rapidement que dans le domaine bancaire » .Le ministre des finances précisait quand même qu’elle a déjà touché plus de 17.000 entreprises « pour près de 92 milliards de DA traités ». De l’aveu même des hauts fonctionnaires du ministère des finances , ce sont des « excès » constatés dans la mise en œuvre de ce dispositif qui ont été à l’origine de son freinage à l’automne dernier .
5 milliards de dollars pour la mise à niveau des PME
A cet effort financier déjà très respectable , il faut ajouter un programme national de mise à niveau des PME pour lequel L’Etat algérien a mis la barre très haut en se montrant disposé à engager ,au cours de la période 2010-2014 , plus de 380 milliards de dinars (près de 5 milliards de dollars) de ressources publiques avec un objectif de mise à niveau de 20 000 PME destiné, à « préparer les entreprises nationales à affronter la compétition internationale et à permettre la diversification de nos exportations ». Dans ce domaine aussi le nouveau gouvernement se montre très réceptif aux suggestions des patrons et le ministre de l’industrie M.Chérif Rahmani annonçait récemment un recentrage du dispositif destiné, dans le prolongement des propositions formulées par le FCE, à concentrer les aides sur un nombre plus réduit d’entreprises, pour renforcer son efficacité et favoriser l’émergence de «champions nationaux». Oui, décidément depuis quelques temps le courant passe bien avec le gouvernement et les patrons algériens n’ont pas trop à se plaindre….