Les contraintes internationales sont là et face aux mutations mondiales la filière automobile connait des restructurations, des fusions et des délocalisations des grands groupes, avec des capacités de production élevées. Il semble bien que certains des responsables algériens vivent sur une autre planète oubliant que la mondialisation est bien là avec des incidences politiques et économiques voulant perpétuer un modèle de politique industrielle dépassé des années 1970 comme en témoignent tant le manque de visibilité et de cohérence dans la politique économique que les assainissements répétées des anciennes entreprises publiques sans résultats probants.
La presse algérienne s’est fait l’écho récemment d’une usine de voitures Renault en Algérie d’une capacité entre 50.000 et 75.000 voitures par an , après durant cinq années successives, les déclarations officielles d’une voiture à 100% algérienne, italienne, puis une voiture iranienne, puis une voiture chinoise, puis une voiture allemande et puis une voiture sud coréenne et se pose cette question, face aux mutations mondiales , quel est le seuil de rentabilité d’une usine de voitures ? C’est l’objet de cette modeste contribution.
I.-UNE ÉCONOMIE DE PLUS EN PLUS MONDIALISÉE
1.-L’ émergence d’une économie et d’une société mondialisée produit du développement du capitalisme, processus non encore achevé, et la fin de la guerre froide depuis la désintégration de l’empire soviétique, remettent en cause d’une part la capacité des Etats- nations à faire face à ces bouleversements et d’autre part les institutions internationales héritées de l’après-guerre. Ce n’est plus le temps où la richesse d’une Nation s’identifiait aux grandes firmes des Nations , les grandes firmes ayant été calquées sur l’organisation militaire et ayant été décrites dans les mêmes termes : chaîne de commandement –classification des emplois- portée du contrôle avec leurs chefs- procédures opératoires et standards pour guider tous les dossiers. Tous les emplois étaient définis à l’avance par des règles et des responsabilités pré- établis. Comme dans la hiérarchie militaire les organigrammes déterminaient les hiérarchies internes et une grande importance était accordée à la permanence du contrôle, la discipline et l’obéissance.
Cette rigueur était indispensable afin de mettre en œuvre les plans avec exactitude pour bénéficier des économies d’échelle dans la production de masse et pour assurer un contrôle strict des prix sur le marché. Comme dans le fonctionnement de l’armée, la planification stratégique demandait une décision sur l’endroit où vous voulez aller, un suivi par un plan pour mobiliser les ressources et les troupes pour y arriver.
La production était guidée par des objectifs pré- établis et les ventes par des quotas déterminés à l’avance. Les innovations n’étaient pas introduites par petits progrès, mais par des sauts technologiques du fait de la rigidité de l’organisation.
Au sommet de vastes bureaucraties occupaient le rectangle de l’organigramme, au milieu des cadres moyens et en bas les ouvriers L’enseignement , du primaire au supérieur en passant par le secondaire, n’était que le reflet de ce processus, les ordres étant transmis par la hiérarchie, les écoles et universités de grandes tailles pour favoriser également les économies d’échelle.
Actuellement une nouvelle organisation est en train de s’opérer montrant les limites de l’ancienne organisation avec l’émergence d’une dynamique nouvelle des secteurs afin de s’adapter à la nouvelle configuration mondiale. Nous assistons au passage successif de l’organisation dite tayloriste marquée par une intégration poussée, à l’organisation divisionnelle, puis matricielle qui sont des organisations intermédiaires et enfin à l’organisation récente en réseaux où la firme concentre son management stratégique sur trois segments : la recherche développement (cœur de la valeur ajoutée), le marketing et la communication et sous traite l’ensemble des autres composants. Et ce avec des organisations de plus en plus oligopolistiques, quelques firmes contrôlant la production, la finance et la commercialisation tissant des réseaux comme une toile d’araignée.
2- Les firmes ne sont plus nationales, même celles dites petites et moyennes entreprises reliées par des réseaux de sous traitants aux grandes. Les firmes prospères sont passées de la production de masse à la production personnalisée (Reich). Ainsi, les grandes firmes n’exportent plus seulement leurs produits mais leur méthode de marketing, leur savoir faire sous formes d’usines, de points de vente et de publicité. Parallèlement à mesure de l’insertion dans la division internationale du travail, la manipulation de symboles dans les domaines juridiques et financiers s’accroît proportionnellement à cette production personnalisée. Indépendamment du classement officiel de l’emploi, la position compétitive réelle dans l’économie mondiale dépend de la fonction que l’on exerce.
Au fur et à mesure que les coûts de transport baissent, les produits standards et de l’information qui les concernent, la marge de profit sur la production se rétrécit en raison de l’absence de barrières à l’entrée et la production standardisée se dirige inéluctablement là où le travail est compétitif, moins cher et le plus accessible. Mais fait nouveau depuis la fin du XXème siècle, la qualification devient un facteur déterminant. L’éclatement des vieilles bureaucraties industrielles en réseaux mondiaux leur a fait perdre leur pouvoir de négociation expliquant également la crise de l’Etat providence (avec le surendettement des Etats) et de l’ancien modèle social démocrate qui se trouve confronté à la dure réalité de la gestion gouvernementale. Ce qui explique que certains pays du Tiers Monde qui tirent la locomotive de l’économie mondiale se spécialisent de plus en plus dans ces segments nouveaux, préfigurant horizon 2020 de profonds bouleversements géostratégiques recomposant le pouvoir économique mondial avec la percée de la Chine , de l’Inde , du Brésil , de la Russie et de certains pays émergents expliquant le passage d’ailleurs du G8 au 20 dans les grandes réunions économiques internationales. Les emplois dans la production courante tendent à disparaître comme les agents de maîtrise et d’encadrement impliquant une mobilité des travailleurs, la généralisation de l’emploi temporaire, et donc une flexibilité permanente du marché du travail avec des recyclages de formation permanents étant appelés à l’avenir à changer plusieurs fois d’emplois dans notre vie.
Ainsi, apparaissent en force d’autres emplois dont la percée des producteurs de symboles dont la valeur conceptuelle est plus élevée par rapport à la valeur ajoutée tirée des économies d’échelle classiques, remettant en cause les anciennes théories et politiques économiques héritées de l’époque de l’ère mécanique comme l’ancienne politique des industries industrialisantes calquée sur le modèle de l’ancien empire soviétique alors que le XXIème siècle est caractérisée par la dynamisme des grandes firmes mais surtout les PMI/PME reliés en réseaux à ces grandes firmes. Avec la prédominance des services qui ont un caractère de plus en plus marchand contribuant à l’accroissement de la valeur ajoutée, la firme se transforme en réseau mondial, et impossible de distinguer les individus concernés par leurs activités, qui deviennent un groupe vaste, diffus, répartis dans le monde. Cela a des incidences sur le futur système d’organisation à tous les niveaux, politique, économique et social.
II- UN MARCHE MONDIAL OLIGOPLISTIQUE DE PRODUCTION DE VOITURES
1.- Le constat , bien que la situation est évolutive, est que le marché de voitures est un marché oligopolistique , fonction du pouvoir d’achat, des infrastructures et de la possibilité de substitution d’autres modes de transport notamment le collectif spécifique à chaque pays selon sa politique de transport, ayant connu depuis la crise d’octobre 2008 d’importants bouleversements.
Les fusions se succèdent avec des prises de participation diverses et à l’heure actuelle, les plus grandes multinationales sont General Motors et qui vient de nouveau en novembre 2010 d’être recoté en bourse après s’être retirée pour une profonde restructuration, Volkswagen et Nissan, qui depuis son alliance avec le constructeur français Renault, Chrysler, FIAT , Honda, Mitsubishi et Mazda. Les six premiers constructeurs mondiaux ont une capacité de production supérieure à quatre millions de véhicules, représentent 61 pour cent du marché mondial de l’automobile, suivi des sociétés sud coréennes Hyundai, Daewoo, Kia, Ssang Young et Samsung qui ont rejoint les rangs des constructeurs indépendants, capables de financer, de concevoir et de produire leurs propres véhicules. Les sociétés européennes multinationales sont les plus importants fabricants de pièces détachées et les plus grands constructeurs de camions, parmi lesquels Mercedes-Benz et Volvo. La plupart des constructeurs automobiles sont des filiales de constructeurs américains, japonais et européens. En Malaisie, Chine et Inde, la production est gérée par des sociétés locales, mais toujours avec l’appui de grands groupes étrangers.
2- Nous observons deux tendances opposées qui sont en train de se produire en même temps: la localisation de la production sur certaines zones géographiques et sur certains pays et la délocalisation ; et pour ce qui est de la localisation de la production automobile mondiale, elle se concentre régionalement sur trois zones: l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie. De plus, sur chacune d’entre elles la fabrication est localisée sur certains pays; ainsi, en Europe, les principaux fabricants sont l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l’Italie, appartenant tous à l’Union Européenne.
En Amérique du Nord, la production se concentre majoritairement sur les États- Unis, et en Asie elle se trouve au Japon et en Corée du Sud et que pour les exportations mondiales d’automobiles, la concentration est encore plus élevée, puisqu’elle est limitée principalement à deux zones: l’Europe et l’Asie. Et que dans un futur proche avec la perte de compétitivité de certains pays au profit de certains pays émergents (Russie ,Inde, Chine, Brésil) nous devrions assister à la réorganisation de la production mondiale de véhicules en rapport avec les niveaux de formation des effectifs des usines et avec la recherche que réalisent les entreprises automobiles et en toute évidence, les usines qui se maintiendront sur chaque pays seront les plus compétitives, les priorités des dirigeants des constructeurs automobiles étant donc : technologie et innovation,(robotisation,)surtout au Japon dont le coût de la main d’œuvre est dix fois environ supérieur à celui de la Chine, approche collaborative, meilleures stratégies de succès et environnement.
3.- Le nombre de voiture en circulation sur la planète a atteint environ 1 milliard en 2010, contre 900 millions d’unités en 2007 , les experts du Fond Monétaire International (FMI) prévoyant un parc mondial de 2,9 milliards de voitures particulières à l’horizon 2050, cette vision partant de l’hypothèse d’une élévation du revenu des ménages surtout des pays émergents la population comme la Russie, l’Inde ou la Chine représentant des marchés à fort potentiel pour l’industrie automobile devant assister à une renversement de tendance des ratios actuels où on dénombre 600 voitures pour 1 000 habitants pour l’union européenne , cette proportion étant de 200 pour 1000 en Russie et de seulement 27 pour 1000 en Chine, et qu’au sein du parc automobile mondial, près de 70% seraient dus aux pays actuellement peu motorisés comme la Chine ou l’Inde. Toujours selon cette étude, le continent asiatique (Japon, Chine, Inde essentiellement) devrait représenter 23% de la production mondiale automobile à l’échéance de 2011 pour une production annuelle approchant 80 millions d’unités contre 72 millions moyenne 2007/2008 et 42 millions d’unités en 2002. Les usines nippones, connues pour leur qualité et leur flexibilité, stimulées en outre par une forte demande étrangère, aurait produit en moyenne 2007/2008 un total de 10,7 millions de véhicules contre 10,5 millions de véhicules aux USA se concentrant sur un segment clef l’importance au design grâce aux grands de bureau de style spécialisés.
4- Nous assisterons entre 2010/2020 à des perspectives technologiques futures tenant compte du nouveau défi écologique, (voitures hybrides, électriques ) et du nouveau modèle de consommation énergétique qui se met lentement en place , la crise d’octobre 2008 préfigurant d’importants bouleversements géo stratégiques et économiques, la Chine étant en passe de devenir le leader mondial des voitures propres toutes catégories profitant ainsi au premier chef des plans de relance « verts » des Etats-Unis, de l’Europe et du Japon.. Les experts avancent deux scénarios.
Le premier scénario est l’optimalisation du fonctionnement des moteurs à essence et diesel, avec une réduction de 20/30% horizon 2015, de la consommation, car pour ce scénario , les ressources en lithium pour les fameuses batteries lithium-ion sont limitées et que les moteurs électriques nécessitent des aimants que l’on fabrique aussi avec des métaux rares, un marché de 70/80 millions de véhicules par an ne pouvant absorber de gros volumes en voitures électriques et que pendant encore dix ans, les moteurs hybrides et classiques devraient rester majoritaires. Le second scénario ne partage pas ce point de vue, les nano-technologies( la recherche dans l’infiniment petit) pouvant révolutionner le stockage de l’énergie devant explorer parallèlement le flex fuel et de penser à l’hydrogène , l’avenir appartenant au moteur alimenté par de l’hydrogène gazeux ou au solaire ce qui révolutionnera tous les réseaux de distribution . Quel est donc l’avenir de notre planète où selon certains analystes, la taille du marché automobile chinois, sans parler de l’Inde, si l’on reste dans l’actuel modèle de consommation, devrait être multipliée par dix horizon 2030 se traduisant par une hausse de dégagement de CO2, alors que la Chine a déjà dépassé les USA comme principal pays producteur de gaz à effet de serre?
III- LE MARCHE ALGERIEN DE VOITURES, INSTABLE FONCTION DU POUVOIR D’ACHAT
1- Il y a lieu de tenir compte que la majorité de la société algérienne est irriguée par la rente des hydrocarbures (98% des exportations totales) dont l’évolution des cours déterminent fondamentalement le pouvoir d’achat des Algériens et que depuis fin 2006, l’inflation est de retour avec la détérioration du pouvoir d’achat et les statistiques de l’ONS surtout pour le second semestre 2010 semblent être déconnectées de la réalité . Le revenu global d’augmentation de 31% entre 2000/2008 annoncé par le Ministère du travail doit être corrigé devant tenir compte de la répartition du revenu et du modèle de consommation par couches sociales, un agrégat global ayant peu de significations. Se pose cette question : le gouvernement algérien ne sera t –il pas contraint d’avoir au recours à nouveau au crédit à la consommation du fait de la détérioration du pouvoir d’achat des ménages ?
C’est que plus de 80% de la population active algérienne touche un revenu moyen inférieur à 25.000 dinars, certes devant être corrigé par la crise du logement et les transferts sociaux via la rente qui permettent un regroupement des revenus. Qu’en sera-t-il avec l’épuisement inéluctable des hydrocarbures en termes de rentabilité économique et non de découvertes physiques ? Dans ce cas par rapport au pouvoir d’achat réel qui a glissé de 65% pour les biens essentiels début 2005/2006, (alimentaires, habillement notamment plus les frais de loyer et téléphone) à plus de 85% entre 2008/2010 et avec le nivellement par le bas des couches moyennes, que reste –il en termes de pouvoir d’achat réel pour acheter une voiture ?
Le coût est fonction certes des gammes de voitures, mais surtout des capacités de production, et la vente fonction de la structuration des revenus et du modèle de consommation par couches sociales : pour l’Algérie entre 2009/2010 l’on pourrait avoir cette structuration : voiture de moins de 500.000 dinars TTC pour les bas revenus, de 700.000/1.000.000 dinars pour les revenus moyens et au delà de 2.000.000 dinars pour les revenus élevés.
2.- Le deuxième constat est que faute d’unités industrielles spécialisées, la plus grande part des pièces de rechange (parties et accessoires de véhicules automobiles) est importée. Les importations de véhicules ont connu une baisse sensible depuis la promulgation de la loi de finances complémentaire 2009 et la suppression du crédit à la consommation, l’Algérie ayant importé 269.018 véhicules en 2009, contre 352.315 unités en 2008, soit une baisse de 23,64%, encore que les statistiques douanières du second semestre 2010 mettent un accroissement des importations globalement allant selon le rapport du FMI d’octobre 2010 à plus de 50 milliards de dollars prévision 2011, la production locale étant insignifiante et selon le site maghrebemergent en date du 05 décembre 2010 « les adaptations du marché ont été multiples, face au crédit documentaire ( Crédoc) et l’interdiction du crédit automobile, les banques ayant proposé le leasing à des clients professionnels de plus en plus nombreux à s’équiper selon ce détour et les importations pourraient bien boucler l’année 2010 en hausse avec une prévision de clôture de 302 000 véhicules importés », démontrant que les mesures gouvernementales du fait de la faiblesse de la production locale ont eu une portée limitée.
3- Le troisième constat est que le parc automobile en Algérie dépasse en 2010 quatre millions de véhicules (statistiques officielle de 2008 dont plus de 60% véhicules de touristes) possédant le deuxième parc le plus important d’Afrique après l’Afrique du Sud et le premier rang des pays maghrébins connaissant certes un rajeunissement, bien que l’âge moyen du parc reste cependant élevé: 77 % des véhicules ont plus de 10 ans d’âge( dans ce cas avec la prépondérance des marques françaises, en 2009, Renault ayant vendu 56.000 véhicules en Algérie) et seulement 17 % ont moins de 5 ans d’âge , la participation des banques avec le crédit- véhicule étant supprimé ayant participé à cette démocratisation de la voiture, notamment au profit des couches moyennes .
IV. QUELLE EST LA FAISABILITÉ DU PROJET D’UNE USINE DE VOITURES ?
1.- Quel est donc le seuil de rentabilité pour avoir un cout compétitif par rapport aux normes internationales, aux nouvelles mutations de cette filière aux impacts de la crise d’octobre 2009, (les constructeurs automobiles européens ayant produit en 2009 25% de voitures de moins qu’en 2008) telle est la question stratégique pour tout projet fiable à moyen et long terme. En produisant entre 50.000 et 75.000 voitures en misant uniquement sur le marché intérieur algérien l’Algérie sera t –elle compétitive d’autant plus que tous les inputs seront presque importés devant inclure le cout de transport, également la formation adaptée aux nouvelles technologies et les couts salariaux par rapport aux pays concurrents et donc la productivité du travail qui selon l’OCDE est une des plus faible au niveau du bassin méditerranéen ? Par ailleurs, les normes internationales, du seuil des capacités se situe entre 200.000 et 400.000 voitures an minimum, évolutives avec les grandes concentrations depuis 2009 devant certainement dépasser la barre de 500.000 entre 2013/2015.
A titre d’exemple Mitsubishi a produit 794 681 voitures en 2009, Honda a prévu pour 2009/2010, un investissement de 630 millions de dollars (429 millions d’euros) pour une production de 200.000 unités, employant 2000 travailleurs, par contre Suzuki 1,7 milliard de dollars (0,86 milliard d’euros) pour 260.000 unités. Le constructeur Renault-Nissan a projeté d’investir 600 millions d’euros près de Tanger, au nord du Maroc, pour créer une usine capable d’assembler 400 000 unités par an,( 170.000 prévues en 2012) dont viendront s’ajouter les investissements spécifiques aux véhicules qui seront assemblés dans ce site, qui seront compris entre 200 et 400 millions d’euros donc dépassant le milliard d’euros ( plus de 1,3 milliard de dollars), projet rentrant dans le cadre de l’internationalisation de cette firme, destiné pour une grande part à l’exportation. Cette usine devrait employer 6 000 personnes directement (en phase de croisière) et 30 000 emplois indirects avec des coûts de mains d’œuvre équivalents à ceux de la Roumanie, à savoir presque huit fois moins élevés qu’en France, des formations spécialisées de marocains étant prévus.
2- Aussi, toute étude de marché sérieuse, si l’on veut le gaspillage des ressources financières, évitons la précipitation pour des raisons de prestige, l’Algérie étant une petite nation et soyons pragmatique, suppose que l’on réponde au moins à ces quelques questions : aussi, construit -on actuellement une usine de voitures pour un marché local alors que l’objectif du management stratégique de toute entreprise n’est –il pas ou régional, voir mondial afin de garantir la rentabilité financière face à la concurrence internationale et cette filière n’est –elle pas internationalisée des sous segments s’imbriquant au niveau mondial ?
3.- La comptabilité analytique distingue les coûts fixes des coûts variables A quels coûts hors taxes , l’Algérie produira cette voiture et en tendance lorsque le dégrèvement tarifaire allant vers zéro selon les Accord qui la lie à l’Union européenne seront appliqués et dans ce cas quelle est la valeur ajoutée interne créé par rapport au vecteur prix international ( balance devises tenant compte des inputs importés et de l’amortissement tous deux en devises) ? La carcasse représentant moins de 20/30% du coût total c’est comme un ordinateur, le coût ce n’est pas la carcasse (vision mécanique du passé), les logiciels représentant 70/80% et ne pouvant interdire l’importation , la production locale sera-t-elle concurrentielle en termes du couple coûts/qualité dans le cadre de la logique des valeurs internationales ?
4- C’est comme un parfum ou un habit griffé, le consommateur achète également la marque : comment s’appellera la voiture algérienne ? Et cette industrie étant devenue capitalistique, (les tours à programmation numérique éliminant les emplois intermédiaires) quel est le nombre d’emplois directs et indirects créés, puisque qu’un certain nombre d’empois indirects restent les mêmes (garages, magasins) et avons nous la qualification nécessaire tenant compte des nouvelles technologies appliquées à l’automobile. Ces voitures fonctionneront-ils à l’essence, au diesel, au GPL ? Seront –elles hybride ou au solaire, quel seront le prix de cession de ces carburants et la stratégie des réseaux de distribution pour s’adapter à ces mutations technologiques?
V.- En conclusion, il s’agit d’être pragmatique et de tenir compte de la réalité des mutations mondiales. La théorie de l’intelligence économique héritage de certains segments des services de renseignements, qui peut être défini comme la maitrise de l’information liée au pouvoir économique afin de faire face à la concurrence et accroitre les parts de marché, met nettement en relief ces différentes étapes en insistant sur le fait que c’est plutôt l’intelligence collective (IC) et non individuelle qui est à privilégier. Il s’agit de favoriser l’émergence et l’interaction positive des différentes parties prenantes composant les organisations, que ces parties prenantes soient internes (salariés, managers) ou externes (fournisseurs, clients), du fait que l’économie est de plus en plus ouverte et que les firmes travaillent avec des parties prenantes éparpillées à travers le monde.
D’où l’importance du management des connaissances (knowledge management ou KM) qui requiert plus que jamais la maîtrise appropriée de technologies de l’information et de la communication (TIC).
Dans cette perspective dynamique, d’adaptation à ces mutations, les réponses apportées doivent être caractérisées par le rapprochement au niveau régional entre les entreprises, les individus et le savoir , les évolutions récentes de la politique régionale, de la politique des sciences/technologie et de la politique industrielle des entreprises, afin de favoriser les pôles d’activités compétitifs et dynamiques.
Docteur Abderrahmane MEBTOUL, économiste, expert International
(1)- Docteur Abderrahmane MEBTOUL est Professeur d’Université Docteur d’Etat Economie (1974) et Expert comptable diplômé de l’Institut supérieur de gestion de Lille (France 1973).