Hassen Khelifati, PDG d’Alliance Assurances livre son analyse du marché de l’assurance et réagit sur l’entrée d’AXA

Redaction

Algerie-Focus a interviewé le pdg d’Alliance Assurances, Hassen Khelifati, spécialiste du secteur de l’assurance en Algérie et l’un des leaders du marché.

Alliance est une compagnie privée spécialisée dans les assurances qui a vu le jour le 4 décembre 2004. Agrée officiellement le 31 juillet 2005, l’entreprise signe son premier contrat le 1 janvier 2006, c’est alors qu’elle va gravir petit à petit les échelons puis s’imposer en tant qu’acteur clé du marché des assurances en Algérie puisque depuis les trois dernières années elle occupe en terme de chiffre d’affaires la deuxième place dans le secteur privé des assurances en Algérie  et la septième  tous secteurs confondus. Avec 210 points de contacts à travers le territoire algérien et ses 420 employés, l’entreprise a enregistré une croissance de 15% au niveau du chiffre d’affaires au cours de l’année 2011, ce qui correspond à une « avancée historique » dans le secteur des assurances en Algérie. Malgré la perte de certains portefeuilles, elle atteint un chiffre d’affaires de 3.9 milliards DZD.

Alliance Assurances est composée de deux filiales, la première nommée ORAFINA spécialisée dans l’engineering informatique qui, « grâce à des talents et des compétences algériennes », a conçu le premier logiciel intégré d’assurance qui porte le nom d’IRIS et qui aspire à s’étendre au-delà des frontières algériennes notamment au reste du Maghreb et en Afrique. L’entreprise a également lancé un service d’assistance qui est précurseur en Algérie, cette filiale a été lancée au cours de l’année 2006, et est devenue  leader sur le marché avec plusieurs partenariats notables comme ceux de la CAAR et de la CNMA.
Alliance Assurances continue son ascension puisqu’elle a fait le pari de s’introduire à la bourse d’Alger et de lever des fonds, un pari qualifier de « réussite historique et extraordinaire » de la part des observateurs, puisque elle la première compagnie privée à avoir réaliser une telle démarche.
Si la compagnie d’assurance connaît le succès en Algérie, c’est parce qu’elle a atteint plusieurs de ses objectifs comme : rétablir la confiance dans le secteur privé en Algérie, lever des fonds, relancer le marché financier en Algérie.

 

Les enjeux du secteur de l’Assurance

Pour Hassen Khelifati  le marché des assurances en Algérie fait face aujourd’hui  à de nombreux paradoxes et à de nombreuses problématiques.

A cause d’une sous-tarification imposée par les compagnies historiques du secteur public, les primes baissent alors que les accidents et les sinistres ne cessent d’augmenter, par exemple l’Algérie est le quatrième pays au monde au niveau des accidents de voitures. La concurrence des entreprises publiques dans les assurances est déloyale, car elles imposent des tarifs faibles sur le marché, par conséquent les entreprises privés doivent s’adapter et s’aligner sur ces prix ce qui leur fait perdre de l’argent. Si ces entreprises arrivent à imposer de tels tarifs c’est parce qu’elles ne remboursent pas toutes leurs obligations envers leurs clients contrairement aux entreprises privés. C’est pour cela qu’elles vont rentrer dans une très grande problématique étant donné que toutes les compagnies ont reçu une lettre du ministère des finances  stipulant l’obligation de rembourser tous les sinistres d’avant 2010 d’avant juin 2012, une obligation qui ne semble pas poser problème à Alliance Assurances.
La crainte du Pdg d’Alliance n’est autre que ces entreprises publiques puissent être bénéficiaires d’une protection de l’État et du trésor qui pourrait apporter des subventions aux entreprises publiques pour ces échéances, une subvention qui serait alors déloyale pour les entreprises privées qui demanderaient le même traitement. Mais ce n’est pas ce que demande Alliance. Hassen Khelifati aimerait que « le marché subissent la réalité des prix, qu’il y ait des règles, un arbitre indépendant, et que l’on demande des comptes sur la qualité du service et la qualité du remboursement ». En d’autres termes que le marché soit régulé.

Le principal problème du marché des assurances est donc cette sous-tarification déloyale des entreprises publiques algériennes, et c’est ce qui lèse les assureurs privés puisqu’ils ont un manque à gagner . A l’heure où le Maroc approche des 4 milliards USD de chiffre d’affaires dans le domaine des assurances et que la Tunisie s’approche  des 1.5 milliards, l’Algérie peine à atteindre le 1 milliard. Là encore, la sous-tarification imposée par les entreprises publiques creuse ce manque à gagner.

L’introduction d’AXA Assurance sur le marché algérien est une opportunité
La multinationale française spécialisée dans les assurances a bénéficié pour son entrée dans le marché algérien d’un avantage significatif puisqu’elle s’est associée à une banque publique algérienne et donc bénéficie d’emblée dans le marché d’un réseau de plus « 200 d’agences ainsi qu’un portefeuille clients extraordinaires ». Aujourd’hui ce qu’espère le pdg d’Alliance c’est qu’il n’y ait pas « d’avantages cachés » afin que « tout le monde soit sur un pied d’égalité ». Il espère également que AXA Assurance ne reproduira pas la même stratégie qu’elle a pu adopter dans d’autres marchés c’est à dire d’imposer une « sous-tarification chronique qui tuerait tous ses concurrents ». Mais selon Hassen Khelifati, l’introduction de ce concurrent dans le marché algérien reste positive. En effet, l’entreprise française pourrait apporter une stimulation de la concurrence, de nouveaux produits ainsi qu’une formation; elle pourrait également contribuer à la « lutte » pour aider à réformer le marché et à le rendre plus « rationnel« .
Le marché des assurances en Algérie est donc en plein croissance mais le bilan dressé par Alliance Assurances sonne l’alerte : le secteur privé souffre en Algérie, les acteurs publics ne jouent pas le jeu, des réformes pour réguler le marché deviennent urgentes à mettre en place, des réformes qui pourrait relancer le marché et combler ce manque à gagner.

 

R.H.