Le peuple, seul rempart contre un scénario libyen bis en Algérie

Redaction

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En ratant le coche en Tunisie puis en Egypte, le pouvoir algérien a cru un moment pouvoir compter sur Kadhafi pour stopper le vent des révoltes qui allaient, espérait-il, s’essouffler, ce qui lui permettrait de se refaire une santé et consolider ses bases. Cela a probablement redonné confiance aux tenants du pouvoir algérien. Pour preuve, le retournement de la situation politique de ces derniers jours : quiz des promesses de réformes et d’ouverture annoncées par Bouteflika, et retour à la case départ avec une volonté manifeste de museler la presse, contrôler l’activité politique et syndicale, etc.

Le repli stratégique adopté à la hâte au lendemain des premières victoires du printemps arabe a pour ainsi dire cédé la place à un nouveau calcul de survie. Mais la récente percée fulgurante des rebelles à Tripoli, fortement appuyée par l’Otan, sonne le glas du règne du colonel dont la chute est imminente après six mois de guerre civile. Mauvaise nouvelle pour le pouvoir algérien qui est obligé de revoir sa copie. Perplexe, il cherche une autre voie de sortie, alors que l‘étau se resserre sur lui.

Le CNT fait énormément mal à la diplomatie algérienne, otage des humeurs imprévisibles d’un seul homme, le président Bouteflika en l’occurrence. Et par conséquent le pays, au fur et à mesure, s’isole sur la scène régionale. A l’est, la Tunisie post Ben Ali n’oubliera pas de si tôt la position ambigüe de l’Algérie à un moment où la communuaté internationale compatissait avec Mohamed Bouazizi et les insurgés de Sidi Bouzid. Et la nouvelle Libye annonce déjà la couleur avec l’attaque qui a ciblé uniquement l’ambassade algérienne à Tripoli. A l’ouest, Mohamed VI ne ratera pas une occasion pour faire valoir ses droits sur le Saraha Occidental. Au sud le Sahel est une zone aussi instable que dangereuse.

Peu de cartes à jouer face à Washington et Paris

ô combien fut profitable l’époque de Bush pour les régimes autoritaires arabes qui se permettaient d’opprimer leurs peuples au nom de la sacro-sainte lutte contre le terrorisme. Cette époque est révolue avec l’arrivée de l’administration d’Obama qui ne se gêne pas,elle, d’enrôler un ancien chef terroriste libyen comme leader des rebelles à Tripoli. Fini aussi, le chantage à l’énergie pour la France, qui, grâce à la Libye, pays renfermant la plus grande réserve de pétrole en Afrique, peut tout bonnement se passer du pétrole et du gaz algérien. Cette nouvelle donne ôte au pouvoir algérien des atouts certains qu’il faisait prévaloir dans ses négociations pour son maintien aux commandes du pays.

Le peule, seule planche de salut

Malgré les milliards des réserves de change mis à la disposition des Etats-Unis et de l’Europe, l’Algérie n’est pas à l’abri d’un bouleversement : au mieux, le pouvoir connaîtra le même destin que celui de son voisin tunisien, au pire il vivra un scénario à la libyenne. Dans les deux cas de figure, le pouvoir algérien se verra lâché par ses « alliés » du nord ; Janus à double visages, n’ayant d’amis que leurs intérêts propres, ces derniers en feront leur ennemis comme ce fut le cas pour Ben Ali, Moubarak, aujourd’hui Kadhafi et demain peut-être Bachar El-Assad et d’autres encore.

Tous ces gouvernements qui tombent les uns après les autres ont un point commun : ils sont tous honnis par leurs peuples respectifs. C’est en effet plus facile pour l’Otan ou tout autre force dominatrice de venir à bout d’un régime corrompu et haï par sa population que de renverser un président légitime et patriote aimé par son peuple. Combien de fois, la CIA a essayé de déstabiliser le Venezuela sans succès. Si Chavez est toujours au pouvoir, c’est que tout un peuple se trouve derrière lui pour le soutenir, parce qu’il a sa confiance et sa fidélité.

On ne peut certainement pas en dire autant concernant le pouvoir algérien. Celui-ci ne survit que grâce à l’argent du pétrole et la matraque, il n’est point aimé par les algériens, mais craint pour sa capacité de nuisance. Et c’est cela le plus grand danger qui le guette : le rejet du peuple. Même Bouteflika, qui autrefois pouvait se réclamer d’une certaine sympathie des algériens à son égard, il est désormais identifié au reste de cette caste de dirigeants de l’ombre responsables du drame algérien.

Pour éviter de plonger l’Algérie dans le chaos, il est impératif d’opérer une transition d’un Etat kleptocrate à un Etat de droit, que l’armée retourne à ses casernes, que la justice devienne indépendante, que les richesses du pays profitent à toute la population, que l’activité politique et syndicale soit garantie et libre, que la légitimité se décide enfin dans les urnes et non pas dans les officines de la police militaire.

C’est la seule alternative qui reste au pouvoir algérien, s’il ne veut pas finir tiré de quelque bunker à Tindouf ou d’une résidence secondaire à Genève où il aura trouvé refuge, pour finir lynché par une foule vengeresse quand le tsunami populaire se sera déchaîné.

Redwane N

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