Les relations Afrique Chine (Interview)

Redaction

Interview pour Radio Algérie Internationale le 15 février 2009.

Question 1- Quelle est la situation de la Chine actuellement par rapport à la crise mondiale ?

Après l’Allemagne premier exportateur mondial de marchandises au titre de 2008, avec près de 1.500 milliards de dollars (1.148 milliards d’euros) exportés, selon l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et avant les Etats d’Amérique, contre 204 milliards d’exportations de biens et services, en 1978, les exportations chinoises ont atteint en 2006 989 milliards de dollars en 2006, ayant dépassées les 1000 milliards de dollars en 2007. Mais du fait de la crise , les échanges (importations et exportations) ont été en baisse en 2008 de 29%. La forte contraction des importations reflète le ralentissement des investissements intérieurs et de la demande de biens intermédiaires, et signale vraisemblablement la poursuite de la faiblesse des exportations à l’avenir témoignant de la détérioration des fondamentaux, la Chine risquant de privilégier l’énergie interne, de développer les énergies renouvelables puisqu’elle possède le savoir faire technologique, et le charbon puisqu’elle représente 13% des réserves mondiales de charbon. Car la crise commence à se faire sentir. En 2008, 15,3% des 130 millions de ruraux qui migrent pour travailler, ont perdu leur emploi ou n’en ont pas trouvé, a affirmé le 3 février 2009 Chen Xiwen, responsable gouvernemental chargé de planification rural soit plus de 20 millions ont perdu leurs emplois courant 2008, du fait que plus de 670 000 petites entreprises ont fermé en 2008 et ce n’est que le début. Ce pays qui par le passé a tiré la croissance de l’économie mondiale, les prévisions sont à la fois contradictoires et pessimistes, la Banque mondiale ayant revu à la baisse le taux de croissance de la Chine en le ramenant à tout juste 7,5 pour cent, son niveau le plus bas en près de 20 ans, inférieur au niveau de référence de 8 pour cent qui est généralement considéré par les responsables chinois comme étant le minimum indispensable pour créer suffisamment d’emplois et maintenir ainsi la stabilité sociale. Selon les estimations de Macquarie Securities, l’on s’attend à ce que l’industrie du bâtiment de la Chine, qui représente un quart des investissements dans l’immobilisation fixe et qui emploie 77 millions de travailleurs, se contracte de 30 pour cent en 2009, mettant en doute la croissance même de la Chine même à 7,5%, certains experts avançant un taux de croissance inférieur à 5% en 2009,. Par ailleurs le magazine économique Caijing de novembre 2008 a estimé que 2,3 millions d’emplois seront supprimés dans les industries exportatrices étant donné que la production était réduite en fonction de la baisse de la demande extérieure, la croissance des exportations chinoises ayant presque baissé de moitié en passant d’un taux annuel de 20 pour cent au début de 2008 à 11,1 pour cent au cours de ces trois derniers trimestres 2008. Il est utile de noter qu’un autre pays émergent , l’Inde (les deux pays représentant plus du un tiers de la population mondiale ) ayant tirés par le passé l’économie mondiale, la croissance de l’économie indienne devrait ralentir pour ressortir à 7,1% au titre de l’exercice 2008-2009, son niveau le plus bas en près de six ans, contre 9,0% l’année précédente L’Inde n’est donc pas épargnée par le ralentissement économique mondial qui fait chuter la demande et affecte des secteurs clef de son économie. Selon le bureau central des statistiques, la croissance de la production de l’industrie manufacturière devrait s’établir à 4,1%, soit moitié moins qu’en 2007-2008.

Question 2. Les relations commerciales de la Chine avec l’Afrique ? Commerce avec l’Afrique

La Chine, qui a décuplé ses échanges commerciaux avec l’Afrique depuis le début de la décennie, a enregistré en 2008 un léger déficit avec le continent en raison de la flambée des cours des matières premières, selon des statistiques officielles chinoises. Le géant asiatique a enregistré un déficit de 5,16 milliards de dollars en 2008, après un excédent de 940 millions de dollars en 2007, ont annoncé les Douanes chinoises dans un communiqué publié sur leur site internet. Le commerce bilatéral a atteint 106,84 milliards de dollars en progression de 45,1% sur un an. Les exportations chinoises vers l’Afrique ont représenté 50,84 milliards de dollars, en hausse de 36,3% par rapport à 2007. Les importations, principalement des matières premières et, surtout, du pétrole, ont totalisé 56 milliards de dollars, soit +54% en glissement annuel. L’Angola, est son premier partenaire en Afrique et son principal fournisseur de pétrole sur le continent, suivi du Soudan pour le pétrole expliquant la position de ,la Chine au niveau du Darfour , les échanges ont crû de 79,3% (25,31 mds USD), portés par une hausse de 73,7% des importations (22,38 mds USD) notamment . Les importations de minerai de fer qui ont progressé en volume de 22,5% et en valeur de 92,9%. La Chine, de son côté, vend à l’Afrique des machines et des appareils électriques, représentant la moitié (51%) de ses exportations vers le continent, de l’acier, du textile et des chaussures et étant un important fournisseur d’armes avec les USA, la Russie et la France. Ses exportations de machines et d’appareils électriques — catégorie comprenant voitures et deux-roues ont augmenté de 50,5% sur un an en 2008, et totalisé 25,91 milliards de dollars. Le deuxième partenaire africain de la Chine est l’Afrique du Sud. D’après la Banque mondiale, l’Afrique exporte à présent 27 % de ses produits vers l’Asie contre 14 % en 2000.

Question 3- Qu’en est l’aide de la Chine à l’Afrique qui serait d’environ de 5 milliards de dollars ?

Plus de 40 pays africains représentés, 24 chefs d’Etat présents à Pékin, le premier Sommet Chine Afrique le 4 novembre 2006 dans la capitale chinoise marque un tournant dans les relations diplomatiques et économiques de l’Afrique. Le ministre assistant chinois des Affaires étrangères, Zhai Jun, a annoncé lors d’une conférence de presse tenue le 6 février 2009 à Pékin, que les aides et les investissements en Afrique seraient maintenus malgré la dégradation de la conjoncture économique et financière mondiale. Cette annonce, qui précède la tournée africaine du président Hu Jintao, s’inscrit dans le cadre des recommandations issues du sommet China-Afrique tenu à Pékin en 2006. Depuis 2007, la Chine a signé des accords de partenariats bilatéraux avec 48 pays africains et des accords de prêt avec 22 pays du continent. La Chine envisage que son aide à l’Afrique augmente de 200% en valeur en 2009, par rapport à 2006, appliquant ainsi les multiples recommandations de la communauté internationale à l’égard des pays riches pour le renforcement de l’APD aux pays africains en temps de crise.

Sur le volet des investissements, le gouvernement chinois a créé un Fonds spécial Chine-Afrique d’un montant initial d’un milliard de dollars pour inciter les entreprises chinoises à investir en Afrique. A la fin de l’exercice 2008, ce fonds avait investi environ 400 millions de dollars dans 20 projets en Afrique, portant l’investissement cumulé par les entreprises chinoises en Afrique à environ 2 milliards de dollars. Mais il es tutile de rappeler que le montant promis es tune somme dérisoire face à l’injjection plusieurs centaines de milliards de dollars de liquidités sur les marchés par les banques centrales comme le plan américain Paulson de 700 milliards de dollars en 2008 qui seront déboursés en plusieurs tranches, mais qui s ‘avèrera insuffisant puisque selon le Wall Street Journal de la mi janvier 2009, les autorités américaines seraient en train d’élargir leur plan de sauvetage au secteur financier en débloquant, éventuellement, 1000 à 2000 milliards de dollars de plus. Selon les dernières prévisions du Bureau du budget du Congrès (CBO), le déficit budgétaire pour 2008-2009 devrait atteindre le montant exceptionnel de 1.200 milliards de dollars, soit 8,3% du produit intérieur brut, sans compter les 780 milliards de dollars prévus par le Congrès US le 7 février 2009 dont 66% pour l’ investissement et 34% comme allégements fiscaux qui devraient créer 3 millions d’emplois surtout dans le secteur privé durant les trois à quatre prochaines années mais qui pourraient s’avérer également insuffisant. Et également l’initiative européenne où les différents dirigeants du fait de l’ampleur de la crise commencent à avoir une vision commune comme en témoigne les 1800 milliards d’euros soit 2300 milliards de dollars pour garantir les prêts interbancaires et les dépôts des épargnants : soit au total USA/ Europe plus de 3000 milliards de dollars , en plus des 200 milliards d’ euros (Europe) pour soutenir l’activité économique ,et les 550 milliards de dollars du gouvernement chinois, montant insuffisant qui risquent de doubler . Que représentent donc ces 5 milliards de dollars face à ces montants d’autant plus que la crise mondiale affecter les pays les plus pauvres et notamment l’Afrique subsaharienne. Car, le plus important est de se demander si la présence chinoise favorise un partenariat gagnant /gagnant permettant l’accumulation du savoir faire technologique et organisationnel seule condition avec la bonne gouvernance qui est une des plus discutable en Afrique, d’un développement durable et d’une lutte efficace contre le chômage et la pauvreté. Pour l’instant du fait de la présence chinoise en Afrique, le bilan n’a pas encore été réalisé. Tout au plus les dirigeants africains s’accommodent de la présence chinoise car contrairement aux américains ou européens, ils ne posent pas des conditions de démocratie, d’Etat de droit ou de lutte contre la corruption. La Chine investit partout dans le monde (agriculture en Amérique Latine) minerais, pétrole en Afrique qui constituera un enjeu vital du XXIème siècle du fait de ses potentialités (richesses naturelles et humaines avec plus de 1,5 milliard d’âmes horizon 2020.. Certes la crise mondiale est structurelle et non conjoncturelle et pourrait durer au-delà de 2013/2014, mais la Chine tout en diminuant sensiblement ses investissements en Afrique, par des actions et investissements symboliques comme les infrastructures,( cas Algérie) anticipe l’avenir en privilégiant le business , et surtout les intérêts chinois avant tout, résolvera t-elle le problème du développement de l’Afrique : le problème est posé. Mais l’Afrique doit compter avant tout sur elle-même.

Abderrahmane MEBTOUL Expert International

Interview réalisée par Melle Brahimi radio internationale

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