Lutte contre la bureaucratie et la corruption : construction de l’Etat de droit et intégration de la sphère informelle

Redaction

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I – Problématique : Etat de non droit, mauvaise gouvernance et bureaucratie

Le bureau comme l’a montré le grand sociologue Max Weber est nécessaire dans toute économie mais il doit être au service de la société. Il est nécessaire au fonctionnement de toute économie mais non fonctionner comme en Algérie comme pouvoir bureaucratique qui fonctionne en vase clos. Aussi, la lutte contre le terrorisme bureaucratique en Algérie renvoie à la problématique de la sphère informelle, en fait à la construction d’un Etat de droit qui implique une bonne gouvernance et pose la problématique d’une manière générale à la difficile construction de l’économie de marché concurrentielle et de la démocratie tenant compte de notre anthropologie culturelle, l’Algérie étant dans cette interminable transition depuis 1986. Car la sphère informelle, produit de la bureaucratie, contrôle entre 2007/2008 plus de 40% de la masse monétaire en circulation somme colossale, avec une intermédiation financière informelle réduisant la politique financière de l’Etat sans compter toutes les implications socio- politiques et socio- économiques .

Elle ne s’applique pas seulement aux catégories socio-économiques. La rumeur souvent dévastatrice, dont la voie orale est dominante en Algérie, alors que le monde avec la révolution d’Internet devient une maison de verre, n’étant que la traduction de la faiblesse de la gouvernance. Or son intégration est urgente loin des mesures autoritaires (répressives) qui produisent l’effet inverse, et ce, afin de pouvoir favoriser une saine concurrence et l’émergence de la véritable entreprise lieu permanent des richesses et donc favoriser les flux d’investissements nécessaires pour une croissance hors hydrocarbures condition de l’atténuation de la pauvreté et du chômage, la vocation de Sonatrach n’étant pas de créer des emplois. Aussi si l’Algérie du XXIème siècle, veut s’insérer harmonieusement dans le concert des Nations, la politique économique et sociale au sein de l’espace euro méditerranéen et arabo-africain ( par le dialogue fécond des cultures) devra avoir pour fondement la bonne gouvernance liée à la réhabilitation de l’entreprise, au savoir par la maîtrise de la connaissance , la ressource humaine étant l’élément déterminant. Et il n’y aura pas de développement en Algérie sans la réhabilitation du savoir et des couches moyennes productives  base d’ailleurs de tout pouvoir fiable. Le nivellement par le bas (populisme) est source de démotivation et l’antinomie même du développement durable. La marginalisation des compétences et l’exode des cerveaux dont le montant en impacts est plus important que les 138 milliards de dollars de réserve de change chaque cadre formé coûtant plus de 200.000 dollars par unité deviennent inquiétants. Les derniers évènements et mesures biaisées montrent clairement que certains segments des pouvoirs publics (central et local), du fait de l’ancienne culture bureaucratique et administrative, n’ont pas une appréhension claire de l’essence de la sphère informelle. Or le développement durable en Algérie ainsi que les négociations de l’Algérie avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC) achoppent sur la faiblesse des réformes micro-économiques et institutionnelles et sur la nécessité de l’intégration de la sphère informelle qui renvoient à la construction d’un Etat de Droit, base de l’économie de marché et ce, afin de pouvoir favoriser une saine concurrence et attirer les flux d’investissement nécessaires pour une croissance hors hydrocarbures condition de l’atténuation de la pauvreté et du chômage, la vocation de Sonatrach n’étant pas de créer des emplois. Car où en est la réforme de l’école dont la dévalorisation du niveau devient alarmant ? Après les scandales financiers à répétition qui touchent tous les secteurs que dévoile quotidiennement la presse nationale et les importants découverts d’une minorité de monopoleurs rentiers auprès d’autres banques publiques (plus de 50% du montant des crédits alloués en 2008 au secteur privé et 70% aux entreprises publiques sont des créances non performantes)nous assistons à des recapitalisation à répétition des banques publiques qui se chiffrent à plusieurs milliards de dollars US. Ainsi la réforme bancaire doit toucher fondamentalement la nature du système et donc la propriété et pas seulement la rapidité de l’intermédiation financière (aspect purement technique), rapidité qui paradoxalement pourrait faciliter des détournements plus rapidement si l’on ne s‘attaque pas à la racine du mal qui ronge le corps social. Ainsi se pose la question suivante : combien de banques ont-elles une comptabilité décentralisée selon les normes internationales, seules condition d’audits internes sérieux ? Il convient de se poser la question de savoir si l’on peut continuer dans cette voie hasardeuse, situation qui menace le fondement de l’Etat lui-même et la sécurité nationale.

Dans ce cadre, la sphère informelle est le produit historique du trop d’Etat et de l’extension de la bureaucratie rentière qui tire sa puissance de l’existence même de cette sphère tissant des réseaux diffus de corruption n’est que la traduction de la faiblesse de la démocratisation du système économique et politique, donnant d’ailleurs du pouvoir à ceux qui contrôlent l’information(Transparency International dans ses rapports 2004/2007 classe l’Algérie parmi les pays qui connaît un taux de corruption élevé . Ainsi les surfacturations et l’utilisation de la distorsion du taux de change permettent la fuite de capitaux (la méthode résiduelle de la Banque Mondiale l’évalue à plus de 50 milliards de dollars entre 1972 -2OO7 avec d’importants mouvements pour certaines périodes 1973-1978-1979-1986-1991 à 1998- fonction de la situation politique et socio-économique) et des produits hors des frontières fonction de la distorsion des prix intérieurs et internationaux . L’intégration de la sphère informelle selon une vision cohérente, dont la délivrance facile des titres de propriété doit aller de pair avec par une participation plus citoyenne de la société civile et devrait favoriser la légitimité de tout Etat du fait qu’elle permettra à la fois de diminuer le poids de la corruption à travers les réseaux diffus et informels et le paiement des impôts directs qui constituent le signe évident d’une plus grande citoyenneté.

II- Les deux éléments fondamentaux caractérisent le fonctionnement de l’Etat de droit et l’économie de marché concurrentielle

Premier élément la confiance est à la base des échanges : des interviews précises réalisées par De SOTO un des plus grand spécialistes dans ce domaine montrent qu’à une question en Suède : « Est-ce que vous faites confiance aux autres Suédois ? La réponse est que 65% des Suédois disent « oui, je fais confiance à un autre Suédois », Aux Etats Unis presque 54% des Américains disent oui, je fais confiance aux autres Nord-américains. Quand on arrive au Brésil, c’est seulement 8% qui font confiance aux autres Brésiliens. Quand on arrive au Pérou, c’est 6% et les Argentins, entre 1 et 2%. Qu’en est-il en Algérie où le cash prédomine dans toutes les transactions internes ? Dans les pays développés, la carte de crédit donne un droit de transaction alors que dans la plupart des pays en voie de développement est exigé souvent le liquide avec une intermédiation informelle qui traduit la faiblesse de toute politique monétaire interne de l’Etat . Et là, on revient à la confiance.

Le deuxième élément est la relations dialectique entre économie de marché, Etat de Droit est l’ existence des titres de propriété. La question qu’il y a lieu de se poser est la suivante : s’il y a des actifs immatériels et physiques en Algérie, combien de ceux-là ont un titre reconnu par l’Etat ? C’est toute la problématique de la construction de l’économie de marché et d’une manière générale, la construction de l’Etat qui est posée. Là aussi les enquêtes de Hernando De Soto peuvent être des indicateurs importants pour réorienter la politique économique et sociale algérienne. En Egypte, objet d’enquêtes précises de l’auteur pour le Gouvernement de ce pays, de la période de Nasser à 2004, les entrepreneurs ont créé quatre millions sept cent mille bâtiments sur des terrains agricoles illégalement. Donc, ces 4 700 000 bâtiments sans titres sont du capital mort bien qu’ils représentent une valeur estimée par l’auteur à 50 milliards de dollars de 2004 sans pouvoir les hypothéquer ni les utiliser comme garantie, sans que les banquiers ne sachent à qui ils peuvent prêter. Selon les estimations de l’auteur , 92% de la construction en Egypte est hors la loi, et 88% de la production industrielle se trouve dans la sphère informelle avec un capital mort estimé à environ 245 milliards de dollars US. C’est 55 fois plus grand que tout l’investissement privé de tout l’Egypte depuis le temps de Napoléon, y inclus le canal de Suez et le barrage de Aswan, 30 fois plus grand que la Bourse de valeur du Caire. Cela a des incidences sur la gestion de l’Etat qui ne sait plus planifier les besoins en eau potable, en électricité- gaz, téléphone, conduite d’évacuation et autres prestations de services.

Autre élément significatif des enquêtes de l’auteur combien de temps ça prend si vous voulez acheter les droits, c’est-à-dire la délivrance des titres de propriété. Si vous devez respecter le cheminement de tous les circuits (à cela s’ajoutant la faiblesse de la culture économique et politique du simple citoyen ainsi que l’amoncellement de tous les dossiers en litiges au niveau des institutions du pays qui souvent ne sont pas informatisées) l’ensemble des démarches (longs circuits) pour avoir un titre légal prend 17 années en Egypte, 21 années au Pérou et pour les Philippines 25 ans. Il y a lieu, également, de mesurer le temps pris en moyenne pour éviter la destruction et donc marchander avec la bureaucratie (corruption). Ainsi, un Egyptien passe entre 3 et 6 années de sa vie dans ce marchandage. Il serait intéressant que nos sociologues fassent une enquête pour le cas Algérie.

En conclusion, il faut éviter toute vision illusionniste. Car reformer le droit de propriété n’est pas une question de registre foncier. Il faut intégrer toutes les procédures, y compris celles du droit coutumier, car existant des codifications au sein de cette sphère informelle. Dans la plupart des pays, ce sont des notables qui établissent des actes non reconnus, certes, par l’Etat mais qui ont valeur de transaction au sein de cette sphère informelle. On peut émettre l’hypothèse que c’est l’Etat qui est en retard par rapport à la société qui enfante des règles qui lui permettent de fonctionner. En fait, l’importance de cette sphère informelle pose tout un problème politique. Car, où est la crédibilité d’un Etat qui ne contrôle que 30 à 40% des activités économiques ? Cela n’explique t-il pas la difficulté de construire un Etat de droit. Cela ne signifie pas à travers les expériences historiques qu’il ne peut y avoir d’économie de marché sans Démocratie. En effet nous avons assisté à une économie de marché très forte en Amérique Latine notamment celle du Chili, venue à travers Pinochet et actuellement en Chine. Il en est de même en Asie à Singapour ou en Corée du Sud. Mais dans la plupart des cas, cela été l’échec en raison notamment de la corruption généralisée du fait de la faiblesse de contrepoids démocratiques. Aussi la majorité des pays (avec des variantes options libérales ou social- démocrates et régimes présidentiels ou parlementaires ) a opté pour des régimes démocratiques,avec une participation plus active de la femme , comme l’Occident, l’Asie récemment la plupart des pays de l’ex camp soviétique et depuis une décennie la plupart des pays Amérique latine, les pays arabes et surtout d’Afrique étant les plus en retard, ( la Chine,la Russie étant une exception allant vers une libéralisation progressive maîtrisée). Ainsi je reste persuadé à travers les expériences historiques que la vision autoritaire n’est pas soutenable sans la démocratie. Car avec le temps, et du fait des mutations mondiales, la dynamique socio-économique engendrera de nouvelles forces sociales avec de nouvelles exigences donc plus de liberté et de participation à la gestion de la Cité. AM