Frère Ahmed Gaïd Salah, le général de corps d’armée, vice-ministre de la Défense nationale et chef d’état-major de l’Armée nationale populaire, il m’est particulièrement désagréable de présenter, à votre honorable personne, mes salutations. Pour être totalement franc avec vous, l’humble citoyen que je suis est très en colère.
Je ne m’adresse pas à vous pour vous présenter des vœux de santé et de prospérité pour la simple raison que ceci ne vous manque pas. Prospère, vous l’êtes surement, avec un budget de plus de 13 milliards de dollars. En bonne santé, vous l’êtes aussi, avec tout le confort dont vous jouissez. Vous n’êtes donc pas à plaindre par rapport à nos milliers de jeunes soldats qui écument, dans des conditions souvent précaires, les fiefs terroristes dans les maquis et nos frontières incertaines.
Je m’adresse à vous parce que, je vous rappelle, qu’en tant que citoyen, j’ai entièrement le droit de m’opposer à vos ingérences répétées dans la vie politique. La sécurité nationale, la professionnalisation de notre armée et sa modernisation ainsi que les conditions d’exercice de nos soldats devraient, en toute logique et conformément aux missions qui vous sont assignées, être vos principales préoccupations. Et cela est déjà considérable! Où avez-vous trouvé le temps pour adresser une lettre si flatteuse à Amar Saâdani, le patron d’un FLN, discrédité et décadent ?
J’aurais aimé que «le Tout-Puissant vous prête son assistance et sa bénédiction» pour que vous demandiez des comptes à ce personnage sur lequel pèsent de lourds soupçons de corruption et de transferts illicites de devises. Trouvez-vous légitime qu’il possède une résidence en France, sans qu’il ne se sente tenu de s’explique sur les origines des fonds ayant permis cette acquisition ? Votre honneur, vos valeurs martiales, votre patriotisme vous autorisent-t-ils à passer sous silence ces agissements immoraux ? Votre engagement pour la défense de votre pays vous permet-il d’encenser un secrétaire général du FLN qui détenteur d’une carte de résidence en France ?
Vous le savez certainement bien avant nous : c’est l’ex Président français Nicolas Sarkozy, lui-même, qui était intervenu pour lui octroyer ce titre de séjour. Avez-vous pensé à Larbi Ben M’hidi, Abane Ramdane et autres héros du FLN, avant d’expédier votre lettre élogieuse au sinistre Amar Saâdani ?
A votre mort, quand dans l’au-delà, vous allez croiser ces illustres personnages, qu’allez-vous leur dire ? Que vous ne saviez pas ? Que vous ignoriez la perfidie de ce personnage ?
Des affaires obscures, une résidence en France, une fortune aux origines suspectes, des magouilles politiciennes peu élégantes, une gouvernance indigne de l’histoire glorieuse du FLN, etc, Saâdani a suffisamment souillé notre pays pour lui livrer, en plus, en pâture notre armée ? L’Algérie a besoin, plus que jamais, de cette «colossale» institution pour se reconstruire et se remettre sur les rails du développement, non pour servir des intérêts de clans.
Vous avez, en tout cas, raison sur un point : «L’Algérie a besoin de sacrifice». La bonne question est de savoir lequel ? Celui de vous interdire de porter atteinte à l’intégrité de notre armée. Celui d’obliger vos services de renseignement, le DRS, rattaché à votre ministère, d’enquêter sur les affaires de corruption, de détournements de fonds et de transfert à l’étranger de nos devises. Celui de protéger notre pays contre ces voleurs et mafieux qui vident les caisses de nos banques. Autant que le terrorisme djihadiste, ces «terroristes du business» compromettent l’avenir de notre pays. Vous n’êtes ni Shakespeare ni Pierre Ambroise François de Laclos. Vous êtes chef d’état-major de l’Armée nationale populaire. Les lettres de félicitation ne relèvent en rien de vos attributions. Sauvegarder l’avenir de l’Algérie est votre mission. Quelque part là-haut, Larbi Ben M’hidi pleure à chaudes larmes la forfaiture que vous venez de commettre au bénéfice d’Amar Saâdani…