Etre un dirigeant en Algérie : rien de moins impossible. Il suffit de faire de l’humiliation, sa gloire. Ce n’est guère une exagération, mais la triste réalité à laquelle nous sommes confrontés depuis des années. Et à chaque visite politique de nos décideurs en France, cette vérité nous est confirmée encore davantage par la servilité sans limite de notre élite au pouvoir. Sinon, comment peut-on interpréter l’incroyable sortie médiatique de Sellal le magnifique qui donne des nouvelles de notre Président, oui le nôtre, aux français et à la France d’abord et avant tout.
Quant à nous, pauvres sujets ignorés, méprisés, détestés, il n’en a absolument pas conscience de la légitimité de notre droit de lui exiger des comptes. Les explications, notre Premier ministre les fournit aux français, aux dirigeants de la France à qu’il confirme qu’Abdelaziz Bouteflika, notre Chef de l’Etat, a été bel et bien hospitalisé à Grenoble il y a de cela quelques semaines. Oui, mesdames et messieurs, c’est devant les français que Sellal s’est senti obligé de s’expliquer sur l’état de santé de notre propre Président de la République. C’est à ces mêmes français qu’il adresse toutes ses assurances sur le fonctionnement corporel et cérébral de Bouteflika. C’est à ces mêmes français que Sellal parle avec sourire, gentillesse et toute disponibilité sur le bien-fondé de maintenir au pouvoir un Président fantomatique. C’est à ces français, ah cette main étrangère tellement diabolisée en Algérie, que Sellal lance l’invitation de venir jusqu’à Alger pour voir de leur propre yeux que Bouteflika se porte bien.
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«J’ai insisté moi-même auprès du Président Hollande pour qu’il vienne lui rendre visite à Alger. Ça lui permet de constater par lui-même l’évolution correcte de l’état de santé du Président Algérien». Celui qui a prononcé cette phrase n’est pas l’ambassadeur français en poste à Alger. Non, pis encore, c’est le Premier ministre algérien en chair et en os. Sellal lui-même a formulé ce vœu devant toutes les caméras des télévisions françaises. Sellal lui-même a plié l’échine devant une puissance étrangère pour lui demander de venir jusqu’à notre pays afin de nous délivrer le certificat de légitimité de notre propre Président. Cela se déroule sous nos yeux en 2014. Au même moment, ces mêmes dirigeants osent nous parler de théorie de complot, de souveraineté nationale menacée par la main étrangère, de patriotisme et de nationalisme béat alors qu’ils partent à Paris se vautrer dans les compromissions les plus infâmes.
Citez nous un seul, oui un seul, dirigeant politique turc, brésilien, sud-africain, indien, chinois, ou de n’importe quel autre pays aussi corrompu et ridicule dans le monde, dont les dirigeants se déplacent à l’étranger pour inviter les souverains à venir vérifier «l’évolution correcte de l’état de santé» de leur propre Président ! Donnez-moi l’exemple d’un seul pays où les dirigeants cultivent à ce point l’hypocrisie et le mensonge avec leur propre peuple. Un peuple auquel ils vendent le mythe d’une stabilité acquise par la défense de la souveraineté nationale alors qu’à l’étranger, ils s’agenouillent pour supplier qu’on les accepte sans rechigner sur l’échiquier politique international. A ce rythme, il va falloir que l’on soit définitivement franc avec les Algériens : qui dirige réellement notre pays ? Abdelaziz Bouteflika, Abdelmalek Sellal ou les conseillers de l’Elysée et ses relais médiatiques ? Comment s’appelle notre Chef de l’Etat ? François Sellal ou Abdelaziz Hollande ? A qui doit s’adresser l’opinion publique algérienne ? El-Mouradia ou Matignon ? Avons-nous plus de chance de trouver une oreille attentive du côté des Champs Elysées qu’au boulevard des Martyrs ?