La concrétisation du projet déjà ancien de Banque Postale bute aujourd’hui sur une absence de volonté politique. Le projet de loi sur la Poste et les TIC [technologies de l’information et de la communication] qui autorisait sa création a été retiré de l’agenda du gouvernement.
Les performances du système financier national en matière d’inclusion financière de la population algérienne ont fait des progrès notables. C’est ce qu’a souligné le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Laksaci, dans un discours prononcé à l’occasion de la 21e Conférence des gouverneurs des Banques centrales des pays francophones, qui s’est tenue entre le 14 et le 16 mai derniers à Dakar. En Algérie, selon M. Laksaci, le nombre de guichets de banque (y compris les guichets de CCP et Trésor) pour une population de 100 000 personnes est en légère progression : 13,1 agences en 2013 contre 12,7 en 2010.
Mais ce chiffre a été gonflé par l’inclusion des 3000 guichets de bureau de poste, qui permettent à notre pays d’afficher des résultats honorables dans les forums internationaux. La prise en considération des seuls guichets bancaires (environ 1500 agences au niveau national) souligne au contraire le retard persistant accusé par l’Algérie dans ce domaine. C’est sans doute la raison pour laquelle le gouverneur de la Banque d’Algérie a également estimé que “beaucoup reste à faire pour approfondir l’inclusion financière sur le moyen terme”.
Une banque populaire
Sur le chemin qui reste à parcourir, le projet de Banque postale, régulièrement évoqué par les autorités du secteur au cours des dernières années, tarde à se concrétiser. L’idée, mise en œuvre dans beaucoup de pays comparables à l’Algérie (depuis plus de 8 ans par exemple au Maroc), ne manque pourtant pas d’attraits. Il s’agit essentiellement d’exploiter le vaste réseau des agences postales existantes, qui assurent une maillage serré du territoire national, pour faire franchir à la bancarisation de la population algérienne, et spécialement à l’inclusion financière des Algériens à revenus modestes, un palier important.
En juin 2004 déjà, le ministère des Postes et des TIC avait commandé une étude stratégique sur le développement des services financiers de la Poste au bureau d’étude international Ernst et Young. Cette étude examinait pour le développement de la Banque Postale trois scénarios économiques : la création d’une filiale à 100% d’Algérie Poste, le lancement d’une filiale commune avec la CNEP-banque, et le maintien du schéma transactionnel actuel moyennant une amélioration sensible de la qualité des services. Les clientèles « captives », et nombreuses, des fonctionnaires, des retraités et des étudiants, étaient susceptibles d’être les cibles privilégiées de cette banque à vocation populaire .
Effets d’annonce
Depuis cette date, les effet d’annonces ont été nombreux. La Banque postale a d’abord été annoncée pour 2009, puis pour 2012, et on parle maintenant de 2015. Selon nos sources, la concrétisation du projet nécessite une mise à jour du cadre juridique. Pour la loi algérienne, la Poste n’est pas un établissement financier (au sens de la Loi sur Monnaie et le Crédit), et ce malgré près d’une dizaine de millions de comptes CCP auxquels s’ajoutent les ressources collectées pour le compte de la CNEP, sans parler des 6 millions de porteurs de cartes magnétiques estampillées Algérie Poste, qui font de l’opérateur public un des principaux acteurs du développement de la monétique algérienne.
La réforme du début des années 2000 avait créé Algérie Poste en la dotant du statut d’Epic, et séparé les trois fonctions de réglementation, de régulation et d’exploitation. La nouvelle loi sur la Poste et les TIC, en préparation depuis plusieurs années, prévoit expressément la création de la Banque postale. Mais elle ne figure plus à l’agenda du gouvernement depuis septembre 2013.
Dans l’attente d’un feu vert politique
Une décision qui provoque une certaine frustration au sein des équipes qui planchent depuis de nombreuses années sur le projet. Nos sources soulignent que de nombreux chantiers préalables à la création de cette institution ont déjà été lancés. Ils portent sur le modèle économique de la future banque mais aussi sur la mise à niveau des systèmes d’information, la modernisation du réseau et l’adaptation des locaux aux nouvelles fonctions bancaires ainsi que la reconversion des personnels vers les métiers du crédit. Il ne reste plus qu’à obtenir le feu vert politique. Mais dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, particulièrement quand il s’agit de réforme financière, le gouvernement se hâte lentement.
Hassan Haddouche