Il est toujours affublé d’un kamis ou d’une aâbaya. Il prêche la bonne parole en public et tente de convertir ses voisins, ses amis ou même ses ennemis à la prière et aux valeurs spirituelles du Ramadhan. Chaque soir, il fait la queue afin d’être en pôle position à la mosquée pour la prière des Tarawih. Il fait tout pour nous faire croire qu’il est le musulman parfait dont l’Algérie a besoin pour libérer son âme des ténèbres du mal. Et pourtant, ce «musulman modèle» fait exactement le contraire de ce que lui dicte sa religion tout le reste de l’année.
Dans l’administration où il exerce, il rackette le citoyen. Il le fait attendre lorsque, lui, gère son business au téléphone. Dans la rue, il harcèle les femmes. Qu’elles soient voilées ou en jean moulant. Au début, il utilise le vocable «gazelle» pour les amadouer. Mais dès que sa cible rejette ses avances, la «gazelle» se transforme aussitôt en ânesse (Hmara) ou Kalba (chienne) ! Et pourtant, pendant le Ramadhan, lors de la prière des Tarawih, il acquiesce et applaudit lorsque l’imam parle de bonne éducation, de respect de l’autre, de la nécessaire gentillesse dans les rapports sociaux et de la sacralité de la cordialité. Civilisé pendant le Ramadhan, barbare le reste de l’année ? Hypocrisie quand tu nous tient!
Le soir, il prie et glorifie Allah et s’agenouille pour lui exprimer son amour. Mais le jour, ce même bon musulman pollue son quartier, sa Houma, balançant ses ordures par la fenêtre, urinant dans les rues ou détruisant faune et flore. « La saleté est l’apanage du diable, la propreté est celle du croyant ». Il s’enthousiasme quand il entend ce commandement de notre religion le soir à la mosquée. Mais, le jour, il est le premier à le bafouer. Hypocrisie quand tu nous tient!
La journée, il dort jusqu’à l’heure du f’tour, séchant le travail sous prétexte de maladie. Il prétend être engagé et sérieux dans son jeûne. Un engagement qu’il exprime en dormant toute la journée après avoir veillé le soir en jouant aux dominos avec du thé et du qalb ellouz. L’entreprise où il travaille est pénalisée. La productivité baisse et l’économie de son pays entre en hibernation. Il triche avec son travail,et avec son pays, en instrumentalisant le Ramadhan. Est-ce digne des valeurs de l’Islam pour lesquelles il se dit prêt à se sacrifier ? Hypocrisie quand tu nous tient!
La nuit, il s’extasie à la mosquée lorsque l’imam lui parle de droiture et d’honnêteté. Le jour, il arnaque sans vergogne, dans son commerce, les pauvres citoyens déjà laminés par un pouvoir d’achat rachitique. Il modifie les paramètres de sa balance. Il change les prix quand et comme bon lui semble. Il augmente ses marges au détriment des laissés pour compte. Il pille leurs modestes bourses modestes pour engraisser la sienne. Hypocrisie quand tu nous tient!
Le soir, il hoche frénétiquement de la tête en signe d’acquiescement lorsque l’imam disserte sur l’incontournable place de la générosité dans la foi musulmane. Le jour, il passe devant des familles nécessiteuses en les reluquant dédaigneusement. Il snobe le mendiant. Il n’offre aucune pitence à ses voisins pauvres. Il fait de sa maison un bunker pour que nul n’aperçoive son opulence. Il s’énerve contre les vieilles femmes frêles qui réclament son aide et insulte le père de famille qui n’a pas de quoi nourrir ses enfants. Hypocrisie quand tu nous tient!
Voyez comment je prie, mais ne me demandez ce que je fais après ma prière. L’hypocrisie d’un grand nombre de ces conservateurs algériens n’a point d’égale. Dieu merci, le Ramadhan ne leur suffira jamais pour abuser de notre crédulité. Ces « mounafiquoun » ne serons jamais des nôtres. Nous ne serons jamais des leurs.