Le «viol électoral» en Algérie : On nous dit enfin la vérité Par Abdou Semmar

Redaction

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Une première en Algérie ! Un ancien haut commis de l’Etat reconnait publiquement avoir participé et contribué à la fraude électorale. L’ancien wali d’Oran, Bachir Frik a expliqué en direct sur le plateau d’une chaîne de télévision privée, Echorouk TV, qu’il a été instruit durant toute sa carrière par les autorités sécuritaires et militaires pour favoriser le «candidat du système». En 1995, cet ancien wali a tout fait pour faire gagner Liamine Zeroual, avoue-t-il. Pour ce faire, il avait présidé une commission composée des représentants des services de renseignements, DRS, du chef de la région militaire et de la gendarmerie nationale. A l’instar de tous les autres walis, Bachir Frik avait pris le soin de doter le «candidat du système » des permanences électorales, de comités de soutien et de toute la logistique nécessaire. Bref, cet ancien wali a avoué tout simplement la complicité de tous les appareils de l’Etat algérien dans le bourrage des urnes et le détournement des voix des électeurs Algériens.

Même scénario en 1999 où Bachir Frik, explique-t-il, avait reçu l’ordre de truquer l’élection dans sa wilaya pour faire gagner Abdelaziz Bouteflika. Et qui lui avait donné cet ordre ? Un certain Ali Benflis, celui-là même qui prône le changement et la transparence, chef de cabinet à l’époque et directeur de campagne de Bouteflika.

Ces révélations font mal, très mal. Elles confirment, certainement, ce que tous les Algériens savaient depuis longtemps. Mais là, ces vérités sont dites sur un ton méprisant, humiliant et rabaissant pour les Algériens. On nous explique enfin que notre parole n’a aucune valeur. Que nos voix sont de simples jouets entre les mains d’un régime obsédé par sa survie. Notre existence est à peine protocolaire dans ce pays où se décide d’en haut et à travers des commissions secrètes où personne n’a le droit de discuter les orientations données par le DRS et les autorités militaires. Ces révélations accablantes interviennent au moment où le régime algérien nous promet des concessions, de la transparence et un avenir différent de ce passé troublant et lugubre. Comment peut-on nous dire encore des mensonges et insulter notre intelligence ? Comment peut-on nous demander encore de croire en la sincérité de ce régime alors qu’il fallait attendre 2014 pour nous expliquer publiquement que toutes les précédentes élections présidentielles ont été «jouées d’avance» ? Et pourquoi en 2014, les mêmes pratiques ne seront pas reconduites ? Un voleur restera un voleur. Un menteur demeurera un menteur. Un tricheur, même s’il fait son mea culpa, ne pourrai jamais être digne de confiance.

Cet ancien Wali explique très bien les raisons de cette fraude électorale : «l’intérêt de l’Etat et de la Nation». Oui, l’intérêt, le leur, et jamais le nôtre. La nation, la patrie, la leur et jamais la notre. Ces décideurs, les hauts responsables du DRS et de l’armée, s’arrogent le droit de définir l’intérêt de notre pays. Enfin, celui où nous vivons, aimons et chérissons. Mais l’intérêt de ce pays ne nous concerne pas. Ils nous le disent clairement. On fraude, on triche, on détourne pour votre intérêt. C’est le comble de l’ignominie. C’est comme si un pervers viole une femme pour lui faire croire qu’il voulait, au final, lui prouver son grand amour. On nous a violés et on nous viole toujours. Bachir Frik, cet ancien wali, a eu au moins le mérite de nous expliquer que nous ne pouvons rien décider pour notre pays. Et puisque tout est joué d’avance, il faut se taire et accepter les règles du jeu. Au nom de «l’intérêt de la nation et de l’Etat», il faut accepter ce «viol électoral». Sauf qu’en 2014, ce discours n’est plus tolérable. La posture victimaire ne fait plus unanimité au sein des Algériens. Beaucoup d’entre eux comptent bien réclamer leur droit au respect, à la liberté et à la transparence dans la gestion des affaires de l’Etat.

Monsieur Bachir Frik ne sera certainement pas convoqué par notre justice pour enquêter sur ses révélations. La justice est tout bonnement inexistante. Mais ce n’est pas grave. Un jour viendra où nous serons nous-mêmes leurs juges et leur tribunal. Et ce jour-là, vous les violeurs des urnes et des voix des électeurs, vous serez tous condamnés à la perpétuelle déchéance et jetés dans les poubelles de l’histoire.

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