Vaut mieux un résistant, un Moudjahid, qui boit du Whisky qu’un religieux cultivant l’hypocrisie et la soumission à un ordre politique pourri jusqu’à l’os. Ce n’est pas un avis, c’est une vérité que l’histoire de notre pays nous a apprise. Ne vous inquiétez pas, je n’oserais pas me passer dans cette chronique pour un historien spécialisé. Je ne m’appelle pas Cheikh Chemseddine Bouroubi qui confond entre les fatwas et le métier de critique de cinéma.
L’homme des fatwas s’est même arrogé le privilège de nous enseigner l’histoire comme il le souhaite ou plutôt comme le dicte sa vision religieuse de la vie. Ainsi, selon notre Cheikh Chemsou national, «le moudjahid portait un fusil, pas une bouteille de whisky, et il passait la nuit dans un bois et non dans un cabaret». Merveilleux ! Néanmoins, boire de l’alcool n’a jamais stoppé le combat pour l’Indépendance du pays. L’espace dédié à cette chronique ne suffira jamais pour donner la liste des noms de nos glorieux martyrs qui aimaient boire du Whisky, du vin et d’autres liqueurs diabolisées par notre Chemsou. En réalité, le fond du problème est surtout la question de la religiosité et de la lutte pour l’Indépendance de l’Algérie. La révolution algérienne a toujours été une Révolution Nationaliste. Elle n’a jamais été une Révolution Religieuse ou djihadiste.
Cheikh Chemsou, le prédicateur d’Ennahar TV, a du mal à l’avouer, d’ailleurs il ne pourra jamais le dire sur les écrans de la télévision privée qui l’emploie, mais notre révolution fut portée par des gens de gauche nourris à la mamelle de la doctrine socialiste et communiste. Beaucoup d’entre eux buvaient du Whisky. Les 22 qui ont préparé et pensé notre Révolution ne furent guère des prédicateurs ou des religieux fanatiques. Lorsqu’au début des années 30, le mouvement nationaliste de Messali El-Hadj, l’Etoile Nord-Africaine, réclamait et se battait pour l’Indépendance, un mouvement religieux comme l’association des Oulémas musulmans se contentaient de défendre uniquement l’Arabe et l’Islam sans jamais revendiquer ouvertement la fin du colonialisme français en Algérie.
Certaines des figures religieuses de l’Algérie colonisée ont tout simplement pris position contre les Moudjahidine et leur combat à l’instar du certain Cheikh El-Okbi. Il suffit de lire les mémoires du défunt historien et homme politique Ahmed Taoufik El Madani pour connaitre les dessous de cette période de l’Algérie. Cheikh Chemsou est trop religieux pour connaître cet épisode de l’histoire. Le sacrifice pour la liberté, la dignité et l’amour de la patrie ne sont guère des valeurs propres uniquement au religieux. Loin s’en faut…
Rappelons encore ce que Cheikh Chemsou n’a pas encore compris : «L’Oranais» est d’abord un film et non pas un travail d’exégèse coranique. Un film est diffusé dans une salle de cinéma. Un cinéma n’est pas une mosquée. La prédication religieuse n’y a aucune place. Le cinéma ne connaît ni les normes religieuses ni les interdits coraniques. Dans la fiction, on a le droit, sinon même le devoir, de traiter de tout et de raconter tout. Celui, ou celle, qui n’apprécie pas une fiction, il, ou elle, n’a qu’à zapper sur les chaines religieuses moyen-orientales qui bombardent nos écrans. Appeler à l’interdiction d’un film est un crime contre l’imagination, l’art et la liberté de penser.
Le whisky et le cabaret dérangent à ce point ? Qu’attend donc Cheikh Chemsou pour s’attaquer à ces hauts dirigeants, très connus du public, qui boivent comme un trou ! Pourquoi il ne déclame dans ses prédications télévisées les noms de ces juges, députés, sénateurs, officiers de l’armée, Walis, du renseignement et cadres de la Présidence et des ministères qui savourent des soirées entières en buvant des liqueurs diaboliques et en reluquant les jolies filles des cabarets ? Pourquoi il ne s’en prend à ces Présidents de la Républiques qui furent en personne des gros buveurs ! C’est tellement facile, et bas, de s’attaquer à un réalisateur désarmé et qui n’a que sa caméra pour se défendre. Ennahar TV ne lui permettra jamais de délivrer ses reproches religieux aux puissants décideurs. Ce sont pour toutes ces raisons que l’ivresse d’un combattant sera toujours plus noble que l’hypocrisie d’un religieux…