Un grand quotidien national francophone vient de publier une information d’une très grande importance. Elle est relative à un secteur important de notre économie, qui a été trop longtemps négligé tout comme l’agriculture et l’industrie au profit de la seule rente pétrolière. Telle l’arlésienne, on ressort le sujet toutes les fois que le cours du brut éternue ou s’effondre et on se dit à ce moment-là que nos économistes n’auraient jamais dû mettre tous leurs œufs dans le même panier et auraient dû en bons gestionnaires et en bons pères de famille anticiper les caprices du marché en diversifiant nos investissements.
Vous l’aurez compris, il s’agit du tourisme et nombreux sont nos responsables qui sont convaincus qu’il suffit d’avoir de beaux paysages, un bon climat et des sites magnifiques pour attirer les touristes et arrondir nos revenus annuels, nous mettant ainsi à l’abri des caprices du marché pétrolier trop lié aux spéculations et aux conflits dans le monde.
Beaucoup de voix se sont élevées pour suggérer que nous pourrions faire autant que nos voisins si ce n’est mieux et que nous avons des potentialités beaucoup plus prometteuses qu’il suffit de bien mettre en valeur pour attirer les touristes du monde entier. Il s’est même trouvé un de nos ministres du tourisme qui a prévu de dépasser les dix millions de touristes qui visitent le Maroc en l’espace d’une simple décennie.
Difficile d’expliquer à ce monsieur qu’il y a loin de la coupe aux lèvres, que le tourisme est une véritable profession qui nécessite des investissements, des aménagements, de la formation professionnelle, un système bancaire moderne, une organisation sanitaire à la hauteur des enjeux et surtout la transformation des mentalités. On pensait que le challenge était facile à comprendre et difficile à relever et qu’il fallait prendre le temps d’y penser, et les moyens d’y parvenir.
Or visiblement, on continue chez nous soit à cultiver l’humour au troisième degré soit à faire dans le crétinisme primaire.
La preuve a été publiée. Que dit donc ce quotidien national ?
Il écrit sans rougir qu’en matière de tourisme :
« La demande reste timide ». Il parle du « défi du tourisme saharien » et avance des statistiques qui laissent rêveur. On s’attend d’après les termes employés à des courbes, des chiffres, des statistiques, des études affinées et des prévisions chiffrées.
On découvre que seuls 149 touristes ont visité Tamanrasset durant le premier semestre 2016 contre 419 en 2015 à la même période. 270 touristes ont donc manqué à l’appel, ce qui correspond à une baisse de 70% environ. Cela explique donc le trou énorme dans les prévisions budgétaires de l’année en cours. Et quand on sait que le coût moyen du séjour d’un touriste est de l’ordre de 30 000 dinars, cela ferait un manque à gagner de 7.100.000 dinars, soit environ 80 000 Euros au taux du square Port-Saïd. Autant dire, une catastrophe irrécupérable.
Il reste une solution, c’est d’envoyer une lettre aux 270 touristes qui ne sont pas revenus cette année pour comprendre les raisons de leur défection. Cela nous aiderait certainement à mieux préparer la campagne de promotion de notre pays pour relever le défi lancé par le ministre du tourisme de tailler une croupière au Maroc avec ce chiffre ridicule d’à peine 10 millions de touristes.
Quand on vous dit qu’on est champion du monde et d’Afrique du nord, on sait de quoi on parle.
Aziz Benyahia