Réfugiés/ Mais où est donc passée l’hospitalité des Musulmans et des Arabes ? Par Aziz Benyahia 

Redaction

Les Arabes autrefois, peuple de nomades aguerris aux conditions de vie difficiles, étaient réputés pour leur sens légendaire de l’hospitalité. Comme tous les peuples pauvres et vivant dans des contrées désertiques et arides, ils connaissent la valeur de l’eau et de la nourriture et savent ce que signifient la soif et la faim. Comme tous les peuples pauvres, ils savent ce que solidarité veut dire. Chacun des hommes, des femmes et des enfants qui suivaient jadis les routes des caravanes à la recherche de maigres subsistances, était appelé dans le Coran tout juste révélé « Ibnou Assabil ». Qu’on pourrait traduire par : gens de la route, voyageur sans but, gens du voyage, fils du chemin etc…

Dieu sacralisa leur vie et leur destin et les prit sous sa protection au même titre que l’enfant orphelin, la veuve, le miséreux et l’accidenté de la vie. Le Coran nous enjoint de leur venir en aide quel qu’en soit le prix. Sans égard particulier pour leurs croyances ou leurs origines. Seule compte la solidarité devant la détresse. Il n’est pas question d’aumône ni de charité mais bien d’expression de la solidarité humaine à travers le partage des biens que Dieu a bien voulu répartir entre ses créatures. Le Coran est traversé de nombreux versets relatifs à cette manifestation de la fraternité humaine.

« …La piété c’est donner de son bien aux indigents, aux voyageurs, aux mendiants… » Coran 2/177

« Que votre aide aille à vos père et mère, à vos proches, aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs démunis. » Coran 2/ 215

« Donne à chacun ce qu’il lui revient, qu’il soit proche parent, pauvre ou étranger de passage » Coran 30/38

Cela signifie que chacun de nous doit se sentir concerné et faire en sorte de participer, selon ses moyens et ses compétences à rester fidèle à la lettre et à l’esprit du Coran. Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Très loin du compte ! Car ce monde idyllique était encore possible avant la découverte du pétrole. Le raccourci est peut-être facile, probablement brutal, mais tout à fait juste cependant.

C’était avant le déferlement d’une richesse énorme et désordonnée. C’était avant que le bédouin, nomade réputé dynamique et courageux ne devienne sédentaire et ramolli par l’argent facile et une fortune colossale qui bouleversera définitivement son existence. Et pourtant !

Les Arabes et les Musulmans connaissent bien les problèmes des réfugiés. Il suffit d’interroger les Palestiniens pour bien comprendre le déchirement de familles arrachées à leurs foyers par la guerre et les atrocités de toutes sortes. Les Arabes et les Musulmans ont souffert et pleuré avec les Palestiniens. Ils le font de moins en moins, hélas. Les peuples ont été sincères, mais leurs dirigeants beaucoup moins, préférant la réal-politique et la protection d’intérêts immédiats aux injonctions coraniques et aux enseignements de l’islam. Leurs dirigeants se firent généreux tant que cela valait baiser au lépreux. Tant qu’il suffisait d’envoyer de l’argent pour acheter les consciences. Tant que les réfugiés se contentaient d’aller se réfugier ailleurs. A fortiori lorsque ces réfugiés sont les victimes des turpitudes des dirigeants arabes, de leurs propres desseins hégémoniques, de leurs querelles idéologiques et de leurs calculs politiques souvent inspirés par l’Etranger.

Si la honte nous submerge aujourd’hui, c’est parce que, encore une fois, nos dirigeants se montrent toujours déterminés et très « courageux » tant qu’il s’agit de se faire la guerre entre Arabes. Les millions de réfugiés en majorité Syrien et Irakiens sont les victimes de leurs frères ennemis.

L’Occident conseille, arme et commande. Les Arabes écoutent, paient et s’exécutent. L’engrenage est le même depuis toujours.

Les gens de la Péninsule n’auront de cesse de faire disparaître le berceau de la civilisation arabe qui a eu la mauvaise idée de naître en Mésopotamie et dans Bilad-al-Cham, plutôt que dans le décor inhospitalier et rugueux du Hadramaout. On ne sait toujours pas pourquoi, mais on le saura un jour pas lointain. Pour l’instant, là-bas,  on préfère sauver les palaces de Marbella que les manuscrits de Tombouctou.

Si nous devons avoir honte aujourd’hui c’est parce que nous n’avons même plus la reconnaissance du ventre. Parce que nos dirigeants ont oublié que nous devons tant à la Syrie et que les Syriens ont été à nos côtés dans les moments les plus tragiques de notre histoire.

C’est parce que nous ne méritons pas d’être les dignes héritiers de l’Emir Abdelkader qui a sauvé des milliers de Chrétiens d’Orient et qui fit de la Syrie sa seconde patrie.

C’est parce que nous ne sommes pas capables, malgré nos ressources immenses, d’éviter à nos enfants d’aller s’échouer sur les rivages d’en face.

C’est parce que nous ne sommes plus capables de compassion pour nos frères africains qui frappent à nos portes.

Les Arabes doivent avoir honte de se défausser sur l’Europe, même si elle est loin d’être innocente, en tournant le dos aux centaines de milliers de leurs frères abandonnées sur des routes et des rivages inhospitaliers.

Suggérer à l’Arabie Saoudite de consacrer le quart des bénéfices annuels tirés du pèlerinage à La Mecque, suffirait selon les experts, à stopper l’exode massif et à envisager des solutions collectives à long terme.

Suggérer aux princes et aux potentats gavés d’argent, d’échanger un tableau de Picasso contre des tentes et des dispensaires, ou de surseoir à l’achat de yearlings à Deauville, n’aurait rien d’un crime de lèse-majesté. Bien au contraire, cela rappellerait à tous les enfants gâtés du monde arabo-musulman, les fondamentaux coraniques et la fatuité des richesses éphémères et de leur pouvoir de pacotille.