Séparation entre hommes et femmes/Éloge de l’idiotie

Redaction

Un message circule actuellement sur la toile. Un groupe d’étudiants appelle à un apartheid dans les bus universitaires. Les hommes d’un côté, les femmes de l’autre. Eh oui !

Qui a dit que nos universités n’étaient pas des couveuses de génie, des pépinières de talents hors-normes, capables d’innover, d’inventer et de sans cesse nous surprendre ?

Ceux qui ont encore des doutes sur les capacités de nos jeunes pousses, doivent savoir qu’en attendant de finir de mettre la dernière touche au vaccin contre le cancer et les semences pour faire repousser les cheveux, certains parmi nos étudiants préparent la société de demain, jusque dans le moindre détail ; le non moins important étant l’amélioration des conditions de vie dans les campus, là où se joue notre avenir ; que dis-je ? L’avenir de l’humanité.

Ceux-là procèdent dans ce domaine aussi, aux derniers réglages pour assurer à leurs camarades étudiants et étudiantes la plus grande harmonie dans leur environnement, y compris dans les moyens de transport spécifiques.

Leur dernière trouvaille est tout simplement géniale. Il suffisait d’y penser. Comment en effet protéger nos jeunes filles étudiantes des regards lubriques de leurs camarades mâles propres à les perturber et à les détourner de leurs études ? Comment leur éviter d’être tentées d’aguicher les hommes puisque comme chacun sait, elles portent en elles les tentations de tous les diables ? Eh bien, en commençant par les isoler dans les transports universitaires, en attendant de le faire dans les amphithéâtres, et plus tard dans la rue.

Ainsi un groupe parmi nos jeunes cerveaux vient de suggérer, schéma à l’appui, la séparation dans les bus qui leur sont réservés: le devant étant réservé aux hommes et l’arrière aux femmes avec deux entrées séparées, mais sans toutefois préciser s’il y aura une barrière au milieu du bus afin d’éviter le contact physique en cas de coup de frein brusque ou de coup de foudre brutal ; les oeillades étant encore libres de sévirà ce stade de l’avancement des recherches.Il reste enfin à préciser que pour mieux nous édifier quant à leur noble intention, ils souhaitent que la généralisation de cette mesure permette à « nos étudiants de donnerune magnifique image du modèle qu’ils représenteraient pour la jeunesse du monde entier ». Tout ceci est mis en exergue dans leur communiqué qui circule sur la toile, pour mieux prendre date, puisque ce genre d’innovation est tout modestement la dernière contribution de nos élites dans leurs recherches pour préfigurer la cité idéale de demain.

En effet il ne leur reste plus, pour parachever la marche triomphale vers des lendemains radieux, qu’à faire travailler leurs méninges pour procéder à la même séparation de la société de demain dans la rue. D’aucuns diront que c’est impossible. Erreur ! Il n’y a aucun risque à parier qu’ils ne manqueront pas d’imagination comme de proposer par exemple :

  • Les trottoirs numéros pairs pour femmes et numéros impairs pour les hommes.
  • Ou alors, afin d’éviter les protestations des commerçants, une circulation alternée : jours pairs numéros pairs pours les uns et jours impairs numéros impairs pour les autres.
  • Ou mieux encore, un jour avec femmes et un jour sans femmes ; le vendredi étant réservé exclusivement aux hommes conviés à se promener pendant que les femmes font le ménage. Inconvénient majeur : les marchands de dessous féminins travailleront trois jours par semaine.

Il faudra aussi leur suggérer de procéder à une mise au point précise afin d’éviter de possibles malentendus. Leur demander de rendre publique la liste des dispositions prises en matière de séparation des sexes dans les bureaux de postes, les administrations, les restaurants, les salles de spectacles et les salles de sport et la circulation dans les marchés entre autres. Tiens à ce propos, ont-ils pensé aux souks, aux marchés aux fruits et légumes ? A priori cela paraît compliqué, mais nul besoin de douter quant à la capacité de ces étudiants novateurs à trouver des solutions géniales. A ce stade, on pourrait leur suggérer, pour éviter le contact inévitable et la bousculade habituelle, de doter les hijabs, les niqabs et autres accoutrements d’un dispositif électrique pareil à ceux qui équipent les escrimeurs comme on les a vus récemment à Rio. Le moindre contact déclencherait un signal lumineux accompagné d’un autre sonore qui permettrait aux brigades des bonnes mœurs d’identifier rapidement le badaud à la main baladeuse.

Enfin, on n’insistera jamais assez en demandant à nos lecteurs de faire part de leurs suggestions afin d’aider nos jeunes génies à éliminer tout contact entre les hommes et les femmes ; l’objectif final étant de rendre les femmes définitivement inaccessibles et protégées dans des réserves où, selon leurs besoins, les hommes iraient faire leurs emplettes. Bref le bonheur pour tous !

Aziz Benyahia

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