L’acteur français né à Alger Roger Hanin, décédé le 11 février dernier, a été enterré ce vendredi matin au cimetière israélite de Saint-Eugène, lors d’une cérémonie religieuse intimiste. À l’extérieur du cimetière, ses « amis de quartiers » sont venus saluer la dépouille de l’un des « fils d’Algérie ».
La tête couverte d’un chapeau ou d’un béret, pour se protéger de la fine pluie, qui tombe sur Alger, ce vendredi matin, en petit comité ou seul, une cinquantaine d’habitants de Saint-Eugène ou des quartiers environnants de la capitale sont venus à pied dire au revoir à celui qu’ils considèrent comme l’un des « fils d’Algérie ». « Roger Hanin ce n’est pas un ami de l’Algérie, c’est un fils de l’Algérie. C’est un Algérois, ça ne se discute pas ! », lance la gorge nouée un habitant de Saint-Eugène d’une cinquantaine d’années, affublé de lunettes rectangulaires, planté à l’entrée du cimetière juif. À ses côtés, un groupe de seniors acquiescent. « Quand on pense qu’il y a de « vrais » Algériens qui passent leur temps à critiquer l’Algérie et à vouloir la fuir et lui, qui est parti bien avant l’Indépendance, a toujours défendu l’Algérie, il ne l’a jamais reniée ! C’est une leçon », renchérit l’un d’eux. « Il a toujours eu cette algérianité en lui. D’ailleurs, il n’a jamais perdu son accent », ajoute un autre.
« Retour au bercail »
Le regard tourné vers le portail noir, repeint pour l’occasion, ils espèrent entrapercevoir la dépouille de celui qu’ils avaient l’habitude de croiser au café du coin, situé à quelques pas du cimetière. « Il venait souvent visiter la tombe de son père et après il faisait une halte dans ce café », raconte un autre habitant de Saint-Eugène, les cheveux grisonnants, en pointant du doigt le bout de la rue du cimetière juif. « C’était un mec humble et modeste », glisse un monsieur à ses côtés. En attendant le « retour au bercail » de l’acteur du « Grand sirocco », décédé le 11 février à l’âge de 89 ans, la foule parle de de tolérance inter-communautaire et d’amitié franco-algérienne.
Une cérémonie religieuse dans la plus grande intimité
Sous une fine pluie, le cortège funèbre fait ensuite son apparition. Il est presque 11H lorsque deux bus et plusieurs voitures se dirigent vers le cimetière israélite de Saint-Eugène, là où le père du célèbre « commissaire Navarro » avait été enterré. Un peu plus tôt dans la matinée, la dépouille de Roger Hanin, rapatriée de Paris, était arrivée à bord d’un vol régulier d’Air Algérie et non de l’avion présidentiel, contrairement aux rumeurs qui avaient circulé sur la toile algérienne durant les deux jours passés.
La famille du défunt, des amis de l’acteur, tels que le réalisateur français Alexandre Arcady, l’ambassadeur de France en Algérie, Bernard Emié ainsi que des personnalités algériennes, telles que la ministre de la Culture Nadia Labidi, le wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, Farouk Ksentini président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH) et Mohamed Seghir Babès, président du Conseil national économique et social (CNES), font une entrée discrète par une porte dérobée. Devant l’entrée principale du cimetière, la garde de la protection civile fait une haie d’honneur pour saluer la mémoire du « môme » d’Alger. Derrière les barreaux du portail du cimetière, la foule, voyant au loin le cercueil de Roger Hanin porté jusqu’à proximité de celle de son père, l’applaudit.
À l’ombre des hauts murs du cimetière juif d’Alger, la cérémonie religieuse s’est déroulée dans la plus grande l’intimité, selon le souhait de la famille. À l’extérieur, certains dans la foule, bien qu’ils disent respecter ce choix, regrettent de ne pas avoir pu y assister. Un portrait de Roger Hanin à la main et les larmes aux yeux, un vieil homme, qui se présente comme l’un de ses amis d’enfance, ne comprend pas pourquoi il n’a pas été convié. « Ce n’est pas grave ça ne m’empêchera pas d’aller le voir tous les jours », lâche-t-il d’un ton emprunt à la fois d’amertume et de tristesse. Un peu après midi, le cortège funèbre quitte le cimetière d’Alger et la foule se disperse, promettant de venir régulièrement fleurir la tombe de l’un des « fils d’Algérie ».