Rabah Boucetta est porte-parole de la coordination pour un Congrès extraordinaire au RCD. Cet ancien militant du RCD parle dans cet entretien des intentions et plan d’action du groupe de dissidents qu’il représente.
Algérie Focus : M. Boucetta, vous avez lancé, en compagnie de nombreux autres cadres du parti un mouvement de « redressement » du RCD. En quoi consistent vos revendications ? Pourquoi avoir attendu tout ce temps ?
Rabah Boucetta : Est-ce que vous savez que beaucoup de sections de base étaient privées de l’habilitation de dépôt de listes lors des dernières élections? Si les unes ont choisi la collecte des signatures de citoyens avant la clôture de l’opération, suite à la pression populaire, pour pouvoir participer en tant que listes indépendantes, d’autres par contre n’ont pu déposer leurs dossiers. Cette pénalisation arbitraire, qui a frustrée pas seulement le militant mais les citoyens en général n’a aucune justification réglementaire. Je peux continuer à citer autant d’exemples d’abus de pouvoir et de violation des statuts. Avant de prendre l’opinion à témoin, nous avons privilégié toutes les voix de recours, mais le mépris était omniprésent. Comment se taire quand des cas disciplinaires, au lieu d’être traduits devant la structure habilitée de la gestion des conflits, se retrouvent promus à la direction nationale parce qu’ils sont membre du clan? L’auteur de ce comportement a cessé délibérément d’être Président du Rassemblement dès lors qu’il a assumé l’incarnation du statut du chef de clan. Face au vide réglementaire et statutaire, la CNCE (Coordination nationale pour un Congrès extraordinaire, NDLR) est l’unique réponse à ces dérives totalitaires.
Mais les responsables du parti refusent de répondre à vos doléances. Said Sadi en personne a refusé votre appel à son retour. Comment comptez-vous agir si toutes les voies sont bouchées ?
Depuis le 9 février à ce jour, les responsables n’arrêtent pas d’exercer des pressions sur les militants. La réponse nous la recevons quotidiennement : l’intox, l’invective, l’insulte. Quant à l’ex président, nous n’avons jamais demandé son retour, c’est une manipulation de la direction du parti avec la complicité d’un militant, rédacteur en chef d’un quotidien national, qui fait diversion de l’intervention d’un militant d’Akbou qui avait, en effet, demandé le retour de l’ancien président. D’ailleurs, ce militant a rendu public une lettre de repentance par rapport à la rencontre d’Akbou; ce qui confirma la manœuvre de la direction nationale. Ceci dit, le congrès extraordinaire aura lieu avec eux, sans eux ou contre eux. C’est une des missions de la CNCE.
Mohcen Bellabas que vous accusez de rouler pour un « quatrième mandat » a pourtant appelé à la destitution de l’actuel chef de l’Etat pour des raisons de santé. Vos critiques ne semblent- elles pas être dépassées ?
Je remarque qu’il le fait avec excès de zèle. En tant qu’observateur de la scène politique, vous savez très bien que, par le passé, nous avons intégré le gouvernement après avoir boycotté la « dernière fraude du siècle ». Cette gymnastique est à l’origine de la déperdition du collectif militant et elle n’est pas nouvelle dans le RCD. Seulement, vous constatez avec moi qu’il ne répond pas à ma question : j’ai dit que nous avons exclu Ali Brahimi parce qu’il s’est opposé à la l’installation du au drapeau noir à l’intérieur des bureaux du parti. Au même moment, un président d’APC a voté pour Bouteflika en 2009 et je n’ai pas pu le traduire devant la commission des conflits parce que son président de section avait assumé son acte, une solidarité élargie au président du BR puis au chef du groupe parlementaire qui sont désormais depuis deux mois les plus proches collaborateurs de l’actuel président. Ma question à ce dernier : – Est-ce pas là une offre de service à Bouteflika ?
Les responsables du RCD vous accusent d’être à la solde du pouvoir qui n’aurait pas apprécié les attaques du parti. Que répondez-vous ?
«Quand on veut tuer son chien on l’accuse de rage ». Voilà la devise de Said Sadi depuis le printemps berbère de 1980. A l’entendre parler, depuis l’affaire Babouche à ce jour, le RCD a formé plus d’agent de DRS que le DRS lui-même ! Pour un exploit pareil, il mérite une médaille. Enfin, on a bien taxé Matoub Lounes d’agent des services spéciaux dans les années quatre-vingt, mais quant il est devenu sympathisant du parti, il est qualifié de rebelle. Alors si le fait de dire son opinion, d’assumer ses responsabilités… est une allégeance au DRS, alors j’assume !
Des articles de presse, vous prêtent une attention de créer un nouveau parti. Est-ce vrai ?
Nous sommes des militants du RCD, un parti, pour lequel plus de 120 militantes et militants ont payé de leur vie pour arriver un jour à un état démocratique et social, comme l’a voulu le signataire des accords d’Évian, Monsieur Krim Belkacem. Notre mission aujourd’hui serait de prouver le bien-fondé du serment qui nous avait guidé durant cet exaltant parcours dans le Rassemblement, à défendre en tout temps et en toutes circonstances les mémoires de ses valeureux martyrs, de Mustapha Bacha à Salah Boukrif. Je suis persuadé que les responsables de l’appareil d’El-Biar (siège du RCD, NDLR) excellent dans la manipulation, avec l’aide d’une certaine presse indigente. D’autres articles de ce genre seront certainement commandés et cela n’engage en rien notre coordination dont le but est claire : la Réappropriation du RCD. Et c’est possible ? Yes we can.
Entretien réalisé par Essaïd Wakli