PORTRAIT. Rachid Nekkaz, de l’Elysée à El Mouradia

Redaction

De tous les candidats à la présidentielle, déclarés ou prétendument intéressés par la course à la magistrature suprême, Rachid Nekkaz, encore méconnu de la grande majorité des électeurs algériens, est certainement celui qui maîtrise le mieux le sens de la mise en scène. Cet ex-candidat à l’élection présidentielle propose, déclare, mobilise, agissant toujours sous le feu des projecteurs. L’homme reste malgré tout une grande énigme. Portrait.

Né en France, de parents algériens, un père originaire de la région de Chlef et une mère kabyle de Béjaïa, Rachid Nekkaz n’est plus Français aujourd’hui, insiste-t-il sur son site internet de campagne. Pour se porter candidat à l’élection présidentielle algérienne, ce fils d’immigrés, qui a grandi dans un quartier modeste de la banlieue parisienne et est aujourd’hui à la tête d’une fortune estimée à plusieurs millions d’euros, a rendu son passeport bordeaux le 23 octobre dernier. Pour immortaliser sa déchéance de nationalité, Rachid Nekkaz a invité les caméras de chaînes de télévisions devant le palais de l’Elysée à Paris. Parti depuis à la chasse aux signatures individuelles pour valider auprès du Conseil constitutionnel sa candidature, Nekkaz a entrepris un tour d’Algérie. Un tour qu’il a débuté aux portes de l’hôpital du Val-de-Grâce à Paris, alors que le Président Bouteflika était hospitalisé pour un « contrôle routinier« , selon la présidence. Là encore, Rachid Nekkaz s’expose devant les caméras.

Encore méconnu des électeurs algériens, ce fils d’immigrés a décidé de se faire connaître en faisant appel aux télévisions nationales. La méthode Nekkaz détone dans un paysage politique sclérosé, où le Président de la République communique lui-même très peu. Ainsi, pour ses détracteurs, le candidat Nekkaz n’est qu’un rejeton de la vie politique française, qui tente sa chance dans le pays de ses origines, après avoir essuyé un sévère échec lors de l’élection présidentielle française en 2007, où il n’avait pas obtenu suffisamment de parrainages pour mener sa candidature jusqu’au bout. Pire, certains observateurs de la vie politique algérienne vont jusqu’à le considérer comme un amuseur politique, en attendant que les grosses pointures pointent le bout de leur nez.

Tête baissée, Rachid Nekkaz fonce et poursuit sa campagne, faisant parler son cv de militant pour les droits de l’homme et de la femme. Sensible à la situation des jeunes défavorisés, issus des banlieues françaises, Rachid Nekkaz crée avec Hassan Ben M’Barek le Collectif « Banlieues Respect » afin de lancer un appel à la Paix et au Respect dans les quartiers populaires lors d’un rassemblement de 300 personnes devant le Mur de la Paix au Champs de Mars à Paris en présence de la presse internationale. A ce titre, il est reçu en 2005, alors qu’une gronde sociale éclate dans les quartiers périphériques de Paris, par le Premier ministre de l’époque, Dominique de Villepin. Nekkaz est surtout l’une des rares personnalités publiques en France a soutenir s’opposer à la loi interdisant le port du voile intégral. Il crée ainsi un fonds doté d’un million d’euros afin de financer les amendes infligées aux femmes intégralement voilées, où qu’elles soient dans le monde. Sur son site internet de campagne, le candidat se targue d’avoir « été le seul dans le monde entier à réagir efficacement à cette loi ».

Ce multi-millionnaire, domicilié dans un quartier chic de Paris, est de tous les combats. De la défense de prisonniers en Chine, au traitement des Roms en Europe, Rachid Nekkaz s’investit sur tous les terrains, recourant parfois à des méthodes extrêmes. Comme en décembre 2008, où il a entamé une grève de la faim devant la maison d’arrêt de Nanterre pour « exiger la libération immédiate » de son ami avocat Karim Achoui.

Alors, la question demeure : qu’est-ce qui fait vraiment courir Rachid Nekkaz ? Est-il à la recherche de son quart d’heure américain ou est-ce un honnête indigné ? Ou peut-être simplement les deux à la fois …