Au sommet de l’Etat algérien, la situation suscite des craintes. Les informations les plus effrayantes circulent. Les rumeurs les plus folles sont diffusées. Pendant ce temps, les officiels s’enferment dans un mutisme strict, laissant les Algériens livrés à eux-mêmes face à des faits d’une extrême gravité.
Tout a commencé le 16 juillet dernier. Dans la nuit du mercredi au jeudi, à 2 H du matin plus exactement, des explosifs avaient été découverts dans les jardins de la résidence présidentielle de Zéralda où séjourne régulièrement Abdelaziz Bouteflika. Passée sous silence, cette affaire refait surface et l’information se propage comme une traînée de poudre. Des médias électroniques, des blogs s’interrogent : « A-t-on déjoué un attentat contre le président Abdelaziz Bouteflika ? »
Sur les réseaux sociaux, la polémique n’a cessé d’enfler et les internautes partagèrent les informations les plus extravagantes. Mais jusqu’à ce stade, aucune instance officielle n’a voulu réagir. Ni le ministère de l’Intérieur, ni le ministère de la Défense nationale n’ont infirmé ou confirmé ces informations. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, n’a eu aucune réaction. Officiellement, la classe politique ne fait aucune allusion à cette menace contre la sécurité d’Abdelaziz Bouteflika. Officieusement, toutes les chapelles politiques y allaient de leurs lectures et interprétations les plus saugrenues. Et soudain cette affaire d’explosifs trouva un autre retentissement lorsqu’à la surprise générale, le Président Bouteflika limogea, au cours de la troisième semaine du mois de juillet, le chef de la Garde Républicaine, le général-major Ahmed Mouley Melliani, le responsable de la Direction générale de la sécurité et de la protection présidentielle (DSPP), le général-major Djamel Kehal Medjdoub, ainsi que le patron de la Direction de la sécurité intérieure, le général-major Ali Bendaoud.
Des décisions qui n’ont été accompagnées d’aucune communication officielle. Le mystère a donné naissance aux soupçons les plus fantaisistes. Si personne n’avait attenté à la sécurité de Bouteflika, pourquoi limoger tous ces généraux ? Deux de ces hauts gradés avaient pour mission de veiller directement sur la sécurité du président. Le troisième, le général-major Ali Bendaoud est l’homme qui avait le devoir d’anticiper et faire face à toutes les menaces contre le sécurité intérieure du pays. Ce général du DRS a été longtemps présenté comme un proche apprécié par Bouteflika et le clan présidentiel. Or, son limogeage est intervenu dans des conditions très intrigantes.
Sommes-nous au coeur d’une nouvelle guerre de clans qui enflamme le haut de la pyramide ? Fort probable, selon de nombreuses sources proches des différents cercles décisionnels qui composent le régime algérien. Certaines de ces sources n’hésitent pas à crier au complot en arguant que cette histoire d’explosifs retrouvés à la résidence présidentielle de Zéralda est une machination créée de toutes pièces pour justifier la mise à l’écart de trois puissants généraux.
Mais pourquoi s’en prendre à eux ? Parce qu’ils se sont rapprochés du général Toufik, le patron du DRS et ennemi tant craint du clan présidentiel, avancent les uns. Parce que ces hauts gradés ont exprimé leur indignation face au vide politique qui plombe l’Etat algérien en raison du maintien au pouvoir d’un Abdelaziz Bouteflika malade et affaibli, croient savoir les autres. D’autres sources politiques expliquent que ces trois généraux-majors entretenaient des relations houleuses avec Saïd Bouteflika, le conseiller et frère influent d’Abdelaziz Bouteflika.
Mais qui dit vrai dans toute cette histoire ? Impossible de le vérifier au regard du caractère obscur du régime algérien. La multiplicité des versions correspond parfaitement à la multitude des centres de décisions. Pour leur part, les Algériens cherchent toujours la vérité sur ce qui se passe dans leur propre pays. Une vérité à laquelle ils ne semblent pas avoir droit, puisque tout se décide, se gère sans qu’ils ne soient avisés…