« Bouteflika sera hors-la-loi s’il ne convoque pas le corps électoral avant le 19 janvier »

Redaction

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L’hospitalisation du Président Abdelaziz Bouteflika, admis lundi à l’hôpital militaire Val-de-Grâce à Paris, ne cesse de susciter des interrogations, à quelques jours de la date butoir de convocation du corps électoral. Le président sera-t-il de retour à temps ? Et s’il venait à prolonger son séjour hospitalier, pour un contrôle médical « routinier », que prévoit la Constitution? Pour comprendre les différents scénarios possibles, Algérie-Focus a rencontré Amar Rkheila, ex-membre du Conseil constitutionnel et avocat.

S’il s’avère qu’Abdelaziz Bouteflika est incapable de diriger le pays, quel dispositif est prévu par la Constitution algérienne?

Amar Rkheila : Si le Président est dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions pour cause de maladie grave, l’article 88 de la Constitution doit être appliqué. Mais il existe un vide juridique au niveau de la déclaration de vacance du Président. En effet, le Conseil constitutionnel est chargé de vérifier la « réalité de cet empêchement par tous moyens appropriés » selon le texte constitutionnel. Qu’est-ce cela veut dire ? Quelle institution doit le Conseil constitutionnel doit consulter pour se rendre compte de cette « réalité » ? A quels médecins doit-il faire appel ? Ces détails ne sont pas précisés dans la Loi fondamentale. Ensuite, les deux chambres parlementaires, l’Assemblée populaire nationale et le Conseil de la nation, se réunissent pour déclarer à la majorité des deux tiers l’état d’empêchement. Le président du Conseil de la nation assume le rôle de Président de la République par intérim. L’intérim ne peut excéder 60 jours.

Il a 45 jours pour convoquer le corps électoral. Il n’est pas autorisé à être candidat à l’élection présidentielle et ne peut pas remanier le gouvernement durant son intérim. La procédure électorale classique s’enclenche une fois la convocation du corps électoral entreprise, sauf que les délais sont réduits de quasi moitié. Les candidats ont 30 jours pour recueillir le parrainage de 600 élus ou, à défaut, de 60 000 citoyens dans au moins 25 wilayas différentes avec un minimum de 1500 signatures par wilaya. Et le vote doit avoir lieu deux mois après la convocation du corps électoral au lieu de 90 jours dans des circonstances normales. Comme il n’existe pas de précédent, les modalités d’application de ce texte reste flou. De toute façon, le recours à l’article 88 n’est pas d’actualité. On en parlait cet été, après l’hospitalisation de Bouteflika en avril dernier. L’urgence aujourd’hui c’est de convoquer le corps électoral. A mon avis, il a déjà signé le décret de convocation du corps électoral

Justement de combien de temps dispose le Président pour convoquer le corps électoral ?

A. R. : Abdelaziz Bouteflika a été investi Président de la République pour la troisième fois le 19 avril 2009. Il sera donc Président d’Algérie au moins jusqu’au 19 avril 2014, soit un mandat de cinq ans. Etant donné que la convocation du corps électoral doit se produire au moins 90 jours avant la fin du mandat du président en exercice, conformément à l’article 133 de la loi organique du 12 janvier 2012 relative au régime électoral, Bouteflika a jusqu’au 19 janvier, au soir, pour convoquer le corps électoral. Passé ce délais, il sera un hors-la-loi. Du jamais vu pour un Président d’un Etat de droit !

Abdelaziz Bouteflika a quitté l’hôpital du Val-de-Grâce à Paris. La convocation du corps électoral nécessite-t-elle la présence physique du Chef de l’Etat ?

A. R. : Non, d’après la loi organique du 12 janvier 2012, la présence physique du Président de la République n’est pas requise car la convocation du corps électoral se fait par décret présidentiel. A mon avis, le Président a déjà signé le décret présidentiel avant son transfert au Val-de-Grâce et il sera publié le 18 janvier, dans les délais, pour éviter les commentaires et les écueils juridiques.

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