Le mouvement de protestation des policiers, parti de Ghardaïa, pour atteindre ensuite Alger et d’autres villes du pays, est un non-événement pour les Mozabites. Pour eux, les services de sécurité « sont toujours en grève à Ghardaïa ». Pire, ils les accusent de « passivité », de « complicité », voire « de mercenariat » pour certains.
Militant « indépendant » des Droits de l’Homme, docteur Kameleddine Fekhar souligne d’emblée que « les policiers ont toujours été en grève sélective à Ghardaïa ». « Lorsqu’il s’agit de protéger les Mozabites ou leurs biens, les policiers sont en grève. Mais quand les Mozabites essaient de se défendre contre les Châambis, les policiers sont de service », accuse-t-il. Et d’ajouter que, dans ce deuxième cas de figure, « il y a un parti pris flagrant de la part des services de sécurité en faveur des Châambis ». Le militant des droits de l’homme estime que ce « parti pris » n’est pas innocent. « Cela est programmé par l’Etat, qui envoie ces éléments des services de sécurité en mercenaires dans le M’zab tout en leur assurant l’impunité ». D’où, selon lui, les nombreux «assassinats de jeunes Mozabites par les services de sécurité ». « Le dernier en date est celui de Chekhar Yacine, 22 ans, assassiné à bout portant par un gendarme qui lui a tiré une bombe lacrymogène en pleine poitrine, avant-hier (mardi 14 octobre 2014) au quartier d’Echaâba, où un jeune père de famille de 35 ans a été tué par la police en janvier dernier, laissant derrière lui deux enfants », s’indigne le docteur Fekhar.
Nacereddine Hadjadj, membre de la direction du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), abonde dans le même sens. L’ex-P/APC de Berriane estime ainsi que « la grève des policiers est de nature politique, plutôt que d’ordre socioprofessionnel, contrairement à ce qu’ils essaient de le faire croire. C’est une manière de dire à leur concitoyen que nous aussi sommes victimes d’injustices et du coup se disculper de leurs crimes », analyse-t-il. « Pas plus loin qu’hier, il y a eu des affrontements entre les deux communautés, suite à l’enterrement de deux jeunes arabes. Au lieu d’encadrer la foule et éviter toute confrontation directe entre les deux communautés, les policiers sont restés pacifs et ont laissé faire. Il y a eu beaucoup de blessés, dont des cas très grave », déplore-t-il. Et de conclure, avec amertume : « Avant-hier (mardi 14 octobre), à leur retour de la marche de Ghardaïa, les policiers qui criaient victoire se sont rendus coupable de provocation. Arrivés à hauteur du quartier mozabite Leksar, ils scandaient à l’adresse des habitants « on est revenu, maintenant on va bien s’occuper de vous » ».
Yacine Omar