L’énorme pagaille que connaît le parti du Front de Libération nationale a ouvert la porte à toutes les interprétations. Des noms de personnalités politiques sont annoncés comme de futurs présidentiables. Mais ce jeu de chat et de souris qui se déroule dans les entrailles du sérail cache, en réalité, une énigme. Et si tout ce brouhaha est uniquement fait pour mettre Abdelmalek Sellal sur les rails ?
Depuis son installation à la chefferie du gouvernement –Premier ministre, selon l’appellation officielle- Abdelamlek Sellal enfile un nouveau costume. A l’ombre d’un président de la République malade et immobile, le Premier ministre est sur tous les fronts. Lui qui était « destiné » à sauver les meubles en remplaçant le chef de l’Etat dans les descentes pré-électorales dans les villes de l’intérieur du pays, a fini par se prêter au jeu. Finies les blagues à l’emporte-pièce, finies les plaisanteries avec les journalistes ! Le temps est désormais sérieux et l’ancien énarque, plusieurs fois walis, adopte un temps solennel, martial.
L’homme se donne une stature
Dans ses discours prononcés dans plusieurs wilayas visitées, Sellal ne s’attarde pas sur le présent. Il s’inscrit souvent dans la durée, comme pour annoncer à son monde que, après les présidentielles de 2014, il sera toujours là. « Refaites-moi tous ça », s’entend-t-il dire dans plusieurs régions visitées. « Je veux le projet avant la saison sportive 2014-2015 », dit-il au chef de chantier du nouveau stade de Tizi-Ouzou.
Élevé dans les rouages de l’administration, Abdelmalek Sellal a touché pratiquement à toutes les responsabilités. Successivement chef de daïra, wali, ambassadeur et plusieurs fois ministre, l’actuel Premier ministre a su attendre son heure. Même lorsqu’il a conduit, à deux reprises, la direction de campagne de Abdelaziz Bouteflika, il a su se contenter de peu : il fut ministre des Ressources en eau.
Si aujourd’hui, Abdelaziz Bouteflika –avec la précieuse aide de son frère Saïd- choisit Abdelmalek Sellal comme « successeur », c’est avant tout grâce au profil du Premier ministre. Ce dernier, proche de l’actuel chef de l’Etat, est également en bon terme avec tous les acteurs qui comptent dans le pays. Une fois président, il va donc préserver les intérêts de tout le monde.
L’image du rassembleur
Au sein de la classe politique, Abdelmalek Sellal a tenté de donner l’image d’un rassembleur : aux démocrates, il a donné des gages de modernité et d’ouverture. N-a-t-il pas cassé des tabous, tels que l’ouverture des débits de boissons alcoolisées au moment où la tendance était plutôt vers la fermeture ? En même temps, Sellal sait se montrer conciliant avec les islamistes et les conservateurs. Il s’est plusieurs fois rendu dans des mosquées et a souvent insisté sur « les valeurs religieuses des Algériens ». Ce arrangement à l’intérieur du FLN ne serait donc qu’un nouveau décorum pour la grande messe d’avril 2014. C’est la route ouverte à un enfant du système qui sera probablement le futur « homme du consensus ».
Essaïd Wakli