Amar Saadani vient de lâcher un gros morceau. Le secrétaire général du FLN, qui a pris l’habitude de réclamer un Etat civil, vient de s’attaquer frontalement au chef du Département de renseignement et de sécurité, le Général Mohamed Mediène dit Toufik.
Jamais dans les annales politiques algériennes, un responsable d’un parti du pouvoir ne s’est attaqué avec une si grande véhémence à un des piliers de l’institution militaire. Et plus qu’une attaque, l’interview accordée à TSA est truffée de graves accusations contre le DRS à qui il porte – presque – la responsabilité de certains assassinats politiques. C’est le cas de Abdelhak Benhamouda, de Mohamed Boudiaf et, plus récemment, des attentats conte le siège des Nations-Unies et le Palais du gouvernement à Alger. Pis, le service de sécurité intérieure du DRS est particulièrement accusé de vouloir déstabiliser des partis politiques, y compris le FLN. Et pour boucler la boucle, Amar Saâdani reproche au Général Toufik nommément tous les maux de l’Algérie. « Il aurait dû démissionner », dit-il. Pour conclure avec ce qui semble être une menace déguisée : son intégrité physique dépend désormais de Général Toufik !
Il est évident que cette interview n’aura jamais lieu avec le seul bon vouloir de Saâdani. Les accusations de Saâdani sont suffisamment graves pour conclure à une initiative personnelle. Pis, le secrétaire général du FLN a même profité de cette sortie médiatique pour donner des réponses à des questions que se posent beaucoup d’Algériens sur le rôle des membres du clan Bouteflika. Cela démontre, in fine, que cette sortie est une preuve que la guerre que se livrent les deux clans à propos de la présidentielle sort des salons feutrés d’Alger pour se retrouver dans la rue.
L’élément le plus grave dans la sortie de Saâdani est cette menace, à peine voilée, de déstabiliser le pays si jamais Bouteflika ne pouvait pas se représenter pour un quatrième mandat. Pis, la violence dans le langage de Saâdani est perceptible dans la référence à un risque d’élimination physique qui plane sur sa personne. Tous les scénarii, y compris les plus dangereux, sont donc d’actualité. Sinon, comment se fait-il que le secrétaire général du FLN sorte l’affaire Tibhirine à un moment crucial du jugement de l’affaire en France ?
Une chose est certaine : cette sortie médiatique marque la fin d’une époque et le début d’une autre. Et l’un des clans finira par prendre le dessus. Quant à l’Algérie, elle a l’habitude de s’accommoder de tous les dangers.
Essaïd Wakli