Le président Boudiaf a été tué par ceux « qui l’ont ramené » en Algérie. C’est là une conviction de Tayeb Taalibi, un ancien compagnon de feu Boudiaf.
L’ancien moudjahid, qui fait partie de la commission d’enquête sur l’assassinat de l’ancien président du Haut Comité d’Etat (HCE, crée en janvier 1992 pour faire face à la démission de Chadli Bendjedid), a affirmé, hier, à des journalistes que le président Boudiaf avait été « assassiné par ceux qui l’ont ramené » parce qu’il «refusait de répondre à leurs ordres », a-t-il dit.
Taalibi n’a cependant cité personne dans ses accusations. Mais les flèches sont directement orientées au commandement militaire de l’époque qui avait ramené au pays Tayeb El-Watani. Il a par contre précisé, dans une autre déclaration rapportée par Ennahar, que « Boudiaf était en entente parfaite avec Khaled Nezzar que le président considérait comme un homme honnête ».
L’accusation n’est pas nouvelle. D’anciens compagnons de Mohamed-Boudiaf et des personnalités politiques nationales, notamment celles du camp démocratique, avaient souvent porté des accusations contre « les décideurs » qui seraient derrière le meurtre de celui qui était venu en janvier 1992 répondre à « l’appel de l’Algérie ».
Les représentants de l’armée, à leur tête le ministre de la Défense de l’époque, le Général Khaled Nezzar, ont toujours réfuté cette accusation. « Pourquoi le tuer ? », avait répondu l’ancien homme fort du régime de l’époque.
La thèse de l’acte isolé
Le président du HCE avait fait appel à Mohamed Boudiaf, un membre des six dirigeants qui avaient déclenché la guerre d’indépendance en 1994, pour diriger le pays pour une période de transition. L’Homme avait été assassiné le 29 juin 1992 alors qu’il prononçait un discours au Palais de la Culture de Annaba. La cérémonie était transmise en directe à la télévision nationale. Le rapport officiel conclut que l’assassin, le sous-lieutenant Mebarek Boumaârafi, avait agi «seul». « Il se murait dans le silence », explique, plus tard, Khaled Nezar.
Interrogé récemment, le Premier ministre de l’époque, Sid-Ahmed Ghozali, devenu entre temps opposant, affirme qu’il ne peut rien avancer. « C’est du 50/50. D’un coté, je ne vois pas pourquoi les militaires devaient tuer Boudiaf. Mais quand je vois leurs agissements, je me dis que cela est possible », a-t-il dit.
Une chose est certaine : 21 ans après le crime, l’assassinat de Mohamed Boudiaf reste une énigme pour des millions d’Algériens qui voyaient en l’homme le sauveur du pays.
E. W.