Revue de presse. En Algérie, l’élection présidentielle vue comme une « mascarade »

Redaction

Lu sur Le Monde

Trois partis d’opposition algériens ont appelé, mardi 25 février, à boycotter l’élection présidentielle du 17 avril après l’annonce de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat après quinze années au pouvoir. L’annonce de la candidature du président sortant, âgé de 76 ans et victime d’un accident vasculaire cérébral en avril 2013, a suscité une polémique en Algérie, dont la presse nationale s’est fait l’écho. Des Algériens, vivant en Algérie et à l’étranger, ont partagé sur Lemonde.fr leur sentiment face au scrutin présidentiel auquel ils sont appelés à participer.

VOTER BOUTEFLIKA, LA SEULE ISSUE

  • Je vote pour le panarabisme arabe, par Toto

Mon vote ira à M. Bouteflika, car je préfère le panarabisme arabe au panislamisme des Frères musulmans et autres islamistes qui s’élèvent contre le droit et l’égalité, au nom du Coran.

  • J’ai trop peur de voter pour quelqu’un d’autre, par Lila, 33 ans, responsable commerciale, Paris

Ayant la double nationalité, je voterai. Malheureusement, personne d’autre que M. Bouteflika au sein du gouvernement ne me paraît être de confiance ou avoir l’expérience pour « maintenir » le pays. J’ai trop peur de voter ou de soutenir une personne autre que le president actuel car il y a beaucoup trop de corruption en Algérie.

  • Nous vivons en paix, par Omar, 58 ans, Tlemcen, employé dans une société étatique

Je voterai pour le président Bouteflika car je veux la continuité. Il a beaucoup apporté à l’Algérie et grâce à lui, nous vivons en paix.

PARTICIPER AU FRONT DU NON

  • Se mobiliser contre Bouteflika, par Sid, 40 ans

Etant contre la candidature de Bouteflika, je vais participer à l’élection. J’espère qu’il y aura un vote massif pour le candidat le mieux placé contre lui, peu importe son camp. Je suis contre l’idée que les dés soient pipés. Il y a une chance de battre Bouteflika si les électeurs se mobilisent et si le taux d’abstention est faible.

  • Je voterai pour le candidat le plus moderne, par Ghani B., 24 ans,Avignon, militaire

Je trouve honteux que Bouteflika brigue un quatrième mandat ! (…) Ayant la double nationalité, je vais essayer de voter et ce sera anti-Bouteflika. Il doit passer la main et arrêter d’être égoïste pour le bien de son peuple. (…) Je ne connais pas les autres prétendants mais je ferai des recherches et voterai pour celui qui me semble le plus moderne.

  • Voter blanc, par Ferhat B., 65 ans, retraité

Le droit de vote est un droit que j’exercerai quelles que soient les circonstances. Mais, cette fois-ci, je voterai blanc car la prochaine élection constituera le summum de la mascarade.

  • Dire stop !, par Louhibi, 43 ans, Amiens, cadre dans l’industrie

Le contexte dramatique, ridicule et théâtral dans lequel va se dérouler l’élection présidentielle me pousse naturellement à m’en détourner et à ne pas êtrecomplice de cette mascarade. Est-ce pour autant une sage décision ? Non, je ne le pense pas. Le président actuel et son entourage font tout pour avoir le champ libre pour continuer à diriger l’Algérie vers un avenir toujours plus sombre. Pardevoir, mais sans aucune illusion, j’irai voter pour dire « Stop ! »

  • L’abstention profite au gouvernement, par Lynda B., 20 ans, étudiante

Malheureusement l’issue du scrutin ne fait aucun doute : Bouteflika sera encore président. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut s’abstenir de voter. L’abstention profite au gouvernement. Elle le conforte dans l’idée que le peuple est endormi et apolitique. Nous devons montrer que nous sommes politiquement présents et concernés et que, même réélu, des voix se sont élevées contre lui et en faveur d’autres candidats.

NE PAS PARTICIPER À LA « MASCARADE »

  • Il n’y aura pas d’élection avec la momie, par Mourad, Alger, 44 ans, journaliste

En décidant de se présenter à un quatrième mandat, Bouteflika annule de facto l’élection, puisqu’il est déjà élu. Toute l’administration travaillera pour lui, la télé, les partis proches du pouvoir. Il ne parle plus, il ne bouge plus, on se demande s’il a même conscience d’être candidat. Déjà qu’il ne gouverne plus depuis longtemps, comment fera t-il après le 17 avril ? Qui prêtera serment le jour de l’investiture ? Qui gouvernera à sa place, son frère ou un autre ? Le 17 avril, on assistera à l’intronisation d’une momie « roi d’Algérie ». Lui et son clan feront tout pour humilier l’Algérie.

  • 15 ans, ça suffit !, par Rami

Non, je ne participerai pas à cette mascarade.Voter pour un président hyper malade qui n’arrive même pas à parler est un cirque. Quinze ans, ça suffit !

  • Pour la première fois, je boycotterai, par Ben Aziz

Participer à cette mascarade : impossible ! Et ce sera bien la première fois que je boycotterai des élections. Voter est un devoir citoyen mais en Algérie, c’est de ne pas voter qui l’est. Voter, c’est cautionnerLaisser ces comiques sans foi ni loifaire leur cirque tout seul, c’est résister.

  • La présidentielle de trop, par Ferradj M., 67 ans, Rosny-sous-Bois

J’ai toujours voté Bouteflika mais là, je ne suivrai pas un président malade qui se fait manipuler. Il a beaucoup fait pour son pays mais il a besoin de repos. Aurevoir, merci monsieur le président !

  • Une tragi-comédie, par Brahim D.

Plus que de prendre les Algériens pour de simples faire-valoir comme à chaque élection, cette fois-ci on pousse l’outrecuidance jusqu’à leur faire accepter d’être la risée du monde aussi. (…) L’Algérie a souvent été le pays des paradoxes, aujourd’hui elle devient celui du ridicule et, pour une fois, j’aurais souhaité qu’il tue ! Quelle honte de partager la même nationalité que ces décideurs et faiseurs de rois ! Par cette blague de mauvais goût, « ils » approfondissent davantage le fossé qui nous sépare. Nous ne sommes pas du même bord et j’attends avec une grande curiosité les prochains actes de cette tragi-comédie (…).

  • On veut nous faire vivre la déchéance, par Mohamed S., 60 ans, directeur de projets pétroliers

C’est la première fois de ma vie que je ne me sens plus fier de mon pays. Pourtant, je suis nationaliste depuis mon plus jeune âge et issu d’une famille de militants indépendantistes (…). Je me suis toujours gardé d’être critique envers les dirigeants qui se sont succédé à la tête du pays, malgré leur indélicatesse et autres malversations, la mauvaise gouvernance, le manque de transparence et de vision. Je me disais que nous étions libres et dignes et que tant que la souveraineté de mon pays était préservée, le peuple survivrait. (…) Aujourd’hui, ce n’est point une dictature que l’on subit, ce n’est plus un pouvoir qui fait fausse route, ce n’est plus un coup d’Etat ou une violation de la Constitution dont nous nous sommes accommodés (…). Ce qu’on veut nous faire vivre, c’est la déchéance.

  • Cette fois, c’est le début de la fin, par Zahir B., 40 ans, Paris

Depuis la mort de Boumédiène en 1978, le « système » algérien a toujours trouvé un successeur aux présidents morts, démis ou assassinés. Cette fois-ci, ils se sont montré incapables de désigner un remplaçant à un Bouteflika qui n’est plus apte à assurer ses fonctions. Ce système a visiblement atteint ses limites et sesfaiblesses vont désormais apparaître de plus en plus. La mauvaise nouvelle est que l’on n’a pas encore touché le fond. La bonne nouvelle est que, peut-être, une nouvelle Algérie se dessinera dans les années à venir.

VOTER NE SERT PLUS DEPUIS LONGTEMPS

  • Je ne vote plus depuis 1991, par Zoubir A.

Je n’ai plus voté aux élections de mon pays depuis les législatives de 1991 et  je ne regrette pas ce choix. Malheureusement, nous ne sommes pas dans un pays de droit où la liberté d’expression est en vigueur. Les commanditaires du pouvoirarrangent tout un système leur permettant de choisir un président, sans sesoucier de l’avis d’un peuple exaspéré par les magouilles de ses dirigeants.

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