Le réseau social fondé par Mark Zuckerberg fête, mardi 4 février, ses dix ans d’existence. Le groupe, qui a publié, mercredi 29 janvier, un bénéfice net annuel de 1,5 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros) en 2013, soit trente fois plus qu’en 2012 (53 millions), compte aujourd’hui plus d’un milliard d’utilisateurs.
Au début, le site était réservé aux étudiants de Harvard (Massachusetts), puis des établissements de l’Ivy League (grandes universités de l’Est américain), puis d’autres écoles et facultés à travers le monde. En 2007, il a ouvert ses portes à tous. Une histoire d’amour et de haine entre les internautes et le « site bleu » commençait. Lemonde.fr a demandé à ses lecteurs de leur raconter comment leur relation à ce réseau avait changé au cours de la décennie et quel avenir ils envisageaient pour leur « profil » Facebook. Pour la majorité des internautes, le réseau est autant une source d’information, de partage et de communication qu’un facteur d’angoisse sociale et de dépendance.
« Facebook, ce sont les infos [politiques, internationales, people…], les photos des amis qui sont loin, souligne Steevy, 23 ans. J’ai déjà fermé mon compte une fois, mais cela donne l’impression d’être coupé du reste du monde. »
« OUTIL DE DIFFUSION CULTURELLE »
Au début réservé aux informations personnelles, le réseau a peu à peu mué, grâce à des outils comme la « timeline », le fil d’actualités, et à la multiplication des pages de médias, d’entreprises, de personnalités, d’associations… en une agora où s’entrecroisent les conversations. Julia, 26 ans, estime à ce titre que la plate-forme permet « l’échange de savoirs, de savoir-faire, d’informations, d’événements, d’images, de textes, de débats… ».
La concentration des informations en un même lieu est appréciée de ceux qui voient en Facebook autre chose qu’un outil pour garder le contact avec ses connaissances : « J’utilise Facebook comme outil de diffusion culturelle, écrit Sébastien, 26 ans, être informé des concerts, suivre des artistes, rencontrer de nouveaux groupes (…). Cela évite d’avoir sa boîte mail remplie de newsletters et de devoir naviguer de site en site. »
L’outil est aussi vanté pour son rôle de « carnet d’adresses », notamment pour ceux qui sont loin et veulent garder le contact avec leur famille et amis : « Facebook est un magnifique moyen de garder un oeil en France et surtout le contact avec mes amis proches et les rencontres que je fais au cours de monvoyage », écrit Louise, 25 ans, en séjour d’études à l’étranger.
« PROUVER LA VALEUR DE SA VIE »
La crispation autour de la frontière entre vie privée et profil Facebook est le facteur numéro un d’agacement chez les utilisateurs. Surtout les plus anciens. « Les premières années, raconte Chloé, 22 ans, le regard d’autrui n’avait aucun impact sur mes publications, et puis cela a changé (…). Une utilisation plus stratégique du réseau a émergé : créer une bulle du paraître, se taguer aux quatre coins du monde, le montrer et compter ses likes… En somme, prouver la valeur de sa vie », résume-t-elle, amère. « Et jauger celle des autres. »
La pression sociale inhérente au fait d’avoir constamment une fenêtre ouverte sur ce que les autres veulent bien montrer de leur vie est mal vécue par la plupart des membres du réseau. Ceux-ci pointent aussi la fameuse « Fear of missing out »(FOMO), ou « la peur de manquer quelque chose » (la fête où il fallait être, l’exposition dont tout le monde parle…) induite par leur présence sur un réseau « où tout le monde est ».
L’exhibitionnisme des membres leur fait lever les yeux au ciel. « J’ai de plus en plus de mal avec les gens qui exposent un peu trop leur vie », admet Raphaël, 23 ans. « J’avais l’impression de ne pas être à la hauteur de toutes ces personnes qui ont des vies palpitantes », regrette Hélène, 20 ans.