Se loger à Alger, chronique banale d’une quête impossible

Redaction

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Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le loyer est plus cher à Alger, l’une des villes où il ne fait pas bon vivre selon les récentes études d’organismes internationaux spécialisés, qu’à Paris, la capitale française, ville la plus visitée au monde.

Trouver où loger à Alger lorsque l’on a un revenu faible ou moyen relève du miracle. Voire une impossibilité pour les « petits » salariés qui viennent juste d’entamer leur carrière professionnelle. Si recourir aux services d’une agence immobilière dans sa recherche d’un toit est éliminé d’avance par ces gens, sachant qu’une telle médiation induirait un surcoût du loyer, traiter directement avec les propriétaires n’est pas, pour autant, une meilleure solution.

L’infernal paiement d’une année d’avance 

Quoi qu’on fasse, le loyer est trop cher. En effet, le coût mensuel moyen d’un studio (F1) à Alger-centre et sa périphérie immédiate est d’environ 25 000 DA, soit presque une fois et demie le SNMG, qui est de 18 000 DA. Un appartement coûte évidemment beaucoup plus cher. Le loyer moyen d’un F3 dans le quartier populaire dit « Clauzel », situé à Alger-centre, est ainsi d’environ 40 000 DA le mois, soit plus de deux fois le SNMG. Une aberration. A Paris, la ville la plus visitée au monde, le loyer est beaucoup moins cher si l’on tient compte du pouvoir d’achat du citoyen français. En effet, selon des ressortissants français établis à Alger, le loyer mensuel d’un appartement (l’équivalent d’un F2 chez nous) dans le 14e arrondissement est d’environ 700 euros, soit la moitié du Smic français qui est de 1 445 euros brut et 1  120,43 euros net. Il va sans dire qu’en termes de sécurité et d’état des immeubles, la comparaison entre les deux capitales n’a pas lieu d’être.

D’autre part, ce qui est plus handicapant, les propriétaires exigent du locataire le paiement d’une année d’avance. Une autre aberration. Une telle condition ne devrait être exigée que lorsqu’il s’agit de locaux à usage professionnel ou commercial. Pourtant, elle est une condition sine qua non pour tout prétendant à la location dans la capitale. Ainsi, ce paiement annuel avancé exigé par le propriétaire d’un studio (F1) à Alger-centre ou dans les quartiers périphériques, s’élève à environ 300 000 DA (30 millions de centimes). Pour un appartement plus spacieux, le loyer est double, voire triple. Plus le nombre de pièces augmente, plus le prix monte crescendo. Le loyer d’une année pour un F3 dans le quartier dit « Clauzel » s’élève donc à près de 50 millions de centimes. Un simple salarié, qui peine à boucler ses fin de mois, ne peut évidemment pas se le permettre.

Dortoir ou hôtel bas de gamme 

Si nos interlocuteurs français affirment qu’une caution est exigée à Paris par le propriétaire, ils relèvent avec étonnement qu’elle ne saurait être équivalente à 2 mensualités de loyer. « Cette caution équivaut à environ deux mois de loyer », soulignent-ils, tout en précisant qu’à Paris le loyer « dépend de l’endroit et de la superficie de l’appartement ». A Paris, les règles sont claires, contrairement à Alger, où le loyer, aussi paradoxal que cela puisse paraître, est plus cher à mesure que l’on s’éloigne du cœur de la ville. « Cela se justifierait par la vétusté des immeubles et l’insécurité qui caractérisent Alger-centre », analyse un enseignant universitaire. Et d’enchaîner : « En plus, le parc immobilier au cœur d’Alger n’a été ni renouvelé ni élargi depuis l’indépendance. En face, le nombre d’habitants et d’employés y est en croissance exponentielle depuis. Ce qui expliquerait le forte demande sur ces appartements et, par conséquent, la flambée du prix de location ».

Étant dans l’incapacité de se permettre la location d’un petit appartement à Alger, nombre de salariés se rabattent sur les petits hôtels et les dortoirs. Mais, c’est loin d’être meilleur pour ces employés qui viennent, pour la majorité d’entre eux, des wilayas de l’intérieur du pays. Une nuitée dans ces établissements « bas de gamme», où les conditions de séjours laissent à désirer, coûte en moyenne entre 800 et 1 000 DA. Ce qui représente une journée de salaire de ces travailleurs. « J’ai passé une nuit dans un dortoir à Alger centre à 800 DA. J’avais l’impression d’être dans une cellule de prison », confie Arezki. Originaire de Tizi-Ouzou, Arezki travaille sur Alger depuis bientôt 3 mois et il n’arrive toujours pas à résoudre son problème d’hébergement. Beaucoup d’autres employés à Alger vivent la même situation que lui. Ils finissent souvent par plier bagages et rentrer chez eux. Triste réalité.

Yacine Omar