Algérie : le changement sera fait par la jeunesse ou ne sera pas

Redaction

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Quelle richesse ont en commun les pays de la zone Mena (Middle East North Africa) ? Les hydrocarbures, le soleil, le tourisme ? La jeunesse ! Avec une population de plus en plus jeune, les Etats de la Méditerranée et du Moyen Orient doivent relever un défi de taille, celui de valoriser sa jeunesse et de lui offrir des ambitions « concrétisables ». L’Algérie est la première concernée.

Laissez votre jeunesse travailler ! Ce fut l’une des principales conclusions du Mena Economic Forum qui s’est déroulé à Marseille les 7 et 8 novembre. Les intervenants de ce rendez-vous socio-économique ont mis l’accent sur la nécessité de former et d’insérer la jeunesse dans les économies de chaque pays. En effet la zone Mena est l’une des régions géographiques qui compte la population la plus jeune, mais aussi qui détient l’un des plus forts taux de chômage chez les moins de 25 ans. En Algérie, d’après les dernières estimations officielles, le taux chômage est de 10 %, quant à celui des jeunes diplômés il est de 21,4% seulement pour le secteur tertiaire. Or les entreprises se plaignent de plus en plus du manque de cadres, et de compétences en Algérie. Une dissonance qui ne trouve pas de solution. Chérif Rahmani l’ancien ministre de l’Industrie algérien qui a prononcé le discours d’ouverture de ces deux jours dédiés à l’économie du Mena a insisté de son côté sur la nécessité de mettre en place une bonne gouvernance pour aider  « la jeunesse, à aspirer à un dessein plus ambitieux », en Algérie, mais également dans toute la Méditerranée.

Valoriser la jeunesse a été l’un des conseils les plus donnés lors du MENA Economic Forum. De nombreux experts de la Méditerranée et du monde arabe ont rappelé l’importance d’une population jeune, qui est loin d’être un fardeau. La réussite est au bout de cette jeune génération qui ne parvient pas à trouver sa place dans le monde professionnel ou tout simplement à avoir même envie d’en faire partie. C’est sans doute le premier problème majeur, reconnaît Thami Ghorfi, président de l’ESCA School of Management à Casablanca. « Le sud de la Méditerranée a besoin de créer des modèles de réussite. Si vous demandez à un jeune à Casablanca, à Alger, à Tunis ou à Beyrouth, ils n’ont pas de modèle auquel ils peuvent s’identifier », déplore-t-il. Or pour Thami Ghorfi, la jeunesse est la clé, et cela vaut pour toute cette aire géographique.

Mieux former, pour mieux travailler

La jeunesse est donc un diamant brut mais qu’il reste à tailler. Au vu du taux de chômage élevé des jeunes diplômés algériens, il est clair que l’offre de formation n’est pas adaptée au marché du travail. Bernard Belletante, directeur général de la Kedge Business School, l’un des organisateurs du Mena Forum Economic connaît bien le terrain algérien. Ce dernier estime que les entreprises algériennes manquent cruellement de « middle management ». Concernant le top management et la main d’oeuvre, les entreprises implantées en Algérie parviennent à insérer des locaux, mais les hauts cadres avec des compétences spécifiques sont difficiles à trouver.

C’est pourquoi Bernard Belletante a annoncé en marge du forum qu’il ambitionnait de renforcer des partenariats avec l’Algérie, dont les nombreux diplômés ne répondent pas toujours à la demande. L’école qui est déjà partenaire, car elle co-fondatrice de l’Ecole Supérieure Algérienne des Affaires d’Alger (ESAA) promet de « s’investir massivement encore plus en Algérie par le biais de l’ESAA en 2014. » « En tout cas le projet est en bonne voie. Nous espérons offrir une formation efficace et adaptée à l’Algérie. Nous n’allons pas les former comme en Europe, mais ils devront acquérir des compétences adéquates avec le terrain algérien sinon on ne produira pas de bons managers en Algérie. En tout cas nous sommes prêts à accueillir des partenaires pour investir et former. »

L’Algérie a des talents !

Yazid Chir, président et fondateur de l’association « Nos Quartiers ont du talent » lassé de rencontrer des jeunes diplômés compétents sans travail à cause de leur origine sociale ou géographique a décidé de lancé cette organisation il y a 7 ans en banlieue parisienne, en Seine-Saint Denis plus précisément.  Au départ il était question de valoriser les jeunes du département qui souffraient d’une les coachant dans un premier temps puis en les intégrant à un réseau professionnel afin qu’ils trouvent un emploi à la hauteur de leurs compétences. « On a identifié les talents de ce territoire, de moins de 30 ans. Ces jeunes là avaient 5 fois de chances d’obtenir un job d’après un rapport sur la discrimination. Avec un ou parfois deux masters en poche ils restent un an sans emploi ». Ainsi l’association convainc des hauts cadres de grandes entreprises de participer et de devenir les parrains de ces jeunes diplômés en fonction de leur secteur d’activité.  Ils les coachent et leur ouvre leur réseau.

L’association avait alors, à l’époque commencé avec une opération pilote qui regroupait 200 personnes, désormais elle dispose de 650 partenaires, 2000 parrains et recrute des talents dans toutes la France. « Si on ne les prépare pas, on ne les coach pas, ils se déconsidèrent », estime Yazid Chir. Ce dernier prévoit d’ailleurs comme prochaine étape est « de développer ce concept à l’international et c’est pour ça que je suis là. « Nous allons commencer par l’Algérie où nous avons le soutien du gouvernement français et algérien depuis l’an dernier, lors de la venue de François Hollande en Algérie ». En effet, le pays dont est originaire Yazid observe le même phénomène des diplômés chômeurs qui restent avec sans emploi pendant des années. Or le contexte est également le même qu’en Seine-Saint Denis, il y a 6 ans. Le département devenait alors un pôle d’attraction pour les entreprises à l’époque, l’occasion ou jamais d’offrir des opportunités aux jeunes diplômés. Désormais c’est à l’Algérie d’être le nouvel eldorado. « En Algérie beaucoup d’entreprises françaises veulent y prospérer, mais sans ancrage local c’est difficile. Alors nous allons proposer un deal c’est business contre recrutement local. Nous serons l’interface » explique Yazid Chir. L’équipe de « Nos quartiers ont des talents » a déjà entamé les premières démarches et devrait à courte échéance lancer le premier « Nos quartiers ont du talent » en Algérie.

Un coup de pouce ?

Promouvoir les jeunes Algériens est devenu une priorité pour des chefs d’entreprise algériens et étrangers. D’ailleurs ce fut la conclusion de ce rendez-vous de tous les pays de la zone Mena. Le mot de la fin vendredi 8 novembre a été donné à un Algérien, Kamel Haddar qui est intervenu au nom de l’association ATLAS, dont il est le président. Ce dernier promeut justement le renforcement des compétences des jeunes algériens en leur offrant, par le biais d’un programme de développement des Talent up! qui offre un coaching aux Algériens, pour qu’ils intègrent des grandes écoles à l’étranger. L’association permet également aux jeunes diplômés d’étendre leur réseau professionnel, car elle réunit des cadres et hauts cadre du monde entier.

« La jeunesse est une opportunité. Elle est source de créativité et d’innovation, de profit pour vos entreprises. Il faut donc la cultiver. Mais la jeunesse représente aussi un risque. Une jeunesse frustrée est un danger. L’histoire nous l’a déjà démontré en Europe et récemment dans les pays arabes. La prise en compte de leur aspirations est donc fondamentale pour vos entreprises », a-t-il lancé lors de son intervention lors du Mena Forum Economic.  Ce dernier a insisté sur « la priorité de se rapprocher des écoles et des universités pour qu’elles répondent au mieux aux besoins de vos entreprises qui évoluent si vite.  Il faudrait également être attentif aux formations professionnalisantes et à l’alternance. Enfin, je vous invite vivement à faire confiance aux jeunes entrepreneurs et à investir dans leur Start Up à l’image de celles qui changent le monde en Californie, en Israël, en Jordanie, en Chine et à Singapour ! »