un pont entre deux rives : la ville de Mulhouse et la wilaya de Skikda

Redaction

C’est en discutant avec une de mes collaboratrices que j’entends
parler pour la 1 ère fois de Camélia. Je suis intriguée et surprise par ce qu’elle me dit:  » je pars en Algérie pour accompagner une copine en Septembre 2015 pour la mise en oeuvre et la concrétisation d’un projet solidaire ».
Curieuse, parce que dans les médias, j’entends surtout plus parler à ce moment là, de jeunes femmes qui s’envolent pour la Syrie, pour accomplir le djihad.
Je décide de rencontrer Camélia. Elle accepte de m’accorder  une interview afin de mieux la connaître.
Camélia BELMIR, 24 ans est une jeune « Franco Algérienne », c’est cette appellation qu’elle choisie, cadette d’une fratrie de 9 enfants, elle est née et a grandi à Mulhouse de parents Algériens de la région de l’est. Son père était manutentionnaire dans l’usine Clemmessy dans le Haut Rhin où il a fait toute sa carrière et sa mère était femme au foyer.
Camélia est actuellement en 2ème année de Master en Sciences de l’Education à l’université de Haute Alsace. En parallèle, elle travaille à mi- temps auprès de jeunes enfants au centre Social Papin situé dans un quartier populaire à Mulhouse.  Dans ce cadre, elle anime des ateliers éducatifs.
C’est justement dans la structure du Centre Socioculturel Papin, qu’elle fréquente dès l’âge de 11ans jusqu’à ces 17 ans, qu’elle participe pour la 1ère fois à un projet solidaire. Elle s’investit avec d’autres dans un un chantier d’une rénovation d’une école primaire à Tanger au Maroc. Première expérience réussie, premières satisfactions personnelles de collaborer à rendre la vie meilleure à autrui. Un sentiment d’être utile et ce qui me frappe chez Camélia, un besoin d’action tangible pour faire évoluer les choses et venir en aide aux personnes dans le besoin.
Aussi, c’est naturellement qu’elle participe activement au Forum Internationale de la Jeunesse au Quebec en Août 2013 en partenariat avec le Centre Socioculturel Papin de Mulhouse. Ce forum contribue à rassembler les réflexions et les actions que peuvent entreprendre les jeunes dans leur environnement sociale  afin d’améliorer leur quotidien et leur ouvrir un horizon où tout est possible.
Camélia est leader dans ce groupe de réflexions où sont réunis des jeunes venus de plusieurs pays différents. Cette rencontre est mémorable et primordiale pour elle. Elle acquière de nouvelles compétences: comment convaincre et démarcher des partenaires financiers et pédagogiques. Comment structurer un projet et fédérer des personnes autour de ce projet.
Ce qui est essentiel pour Camélia, c’est d’agir, de rassembler les forces vives que représentent les jeunes, de développer la citoyenneté dans la cité, de manière autonome, sans les contraintes et manœuvres politiques qui peuvent entraver cette volonté.
En 2011 et 2012, son père puis sa mère décède à une année d’intervalle. En septembre 2012, alors qu’elle se trouve à Azzaba pour assister aux obsèques de sa maman, Camélia est alors en BTS et elle doit trouver un stage dans le cadre de ses études pour novembre. Vu les événements familiaux , elle n’a pas eu le temps de prospecter pour ce stage. Elle en touche un mot à son oncle lors d’une discussion. Et là, ce dernier lui dit : « et pourquoi pas faire ton stage ici, en Algérie ? il y a une entreprise espagnole basée dans la commune. Elle n’y avait pas pensé. C’est un concours de circonstance et « hop ! », expression alsacienne, elle est prise pour le stage durant deux mois chez OHL; elle fait signer les conventions par les deux parties, son école en France et la société en Algérie.
C’est une autre relation avec les Algériens qui s’instaure, avec Camélia. Elle connaissait L’Algérie, le village de ses parents, pour y avoir séjourné à plusieurs reprises, pendant les vacances dans sa prime enfance, et le début de l’adolescence. Là, elle découvre les habitants de Azzaba plus en profondeur, elle côtoie différentes personnes qui lui font découvrir le village de ces parents, ce qui s’y passe. Son cercle s’agrandit, elle est agréablement surprise et enchanté par l’ouverture d’esprit des personnes qu’elle rencontre. C’est une révélation pour elle, c’est certainement à ce moment là, qu’elle commence à devenir aussi un peu Algérienne.
Quand je lui ai posé la question , quel rapport elle entretient avec l’ Algérie, elle m’a répondu d’emblée,  » c’est mon pays de coeur! « . Aussi, Camélia s’y rends plus souvent, comme un besoin, un lien qu’elle a envie d’entretenir avec ce pays désormais de cœur et les personnes de « son réseau ».
En septembre 2013, elle y séjourne. Et elle découvre des jeunes qui mendient des fournitures scolaires pour la rentrée des classes. Emue, elle décide de mener une action conjointement avec l’association  » NESS EL KHEIR » de Azzaba et le soutien de la ville de Mulhouse et le Centre Socioculturel Papin. Cette action est nommée  » Educ’ Action ».
L’objectif est d’offrir un cartable  » prêt à étudier » contenant toutes les fournitures nécessaires.

Le coût du projet a été évalué à 2665 euros. Il a été financé à hauteur de 800 euros par la ville de Mulhouse dans le cadre de l’ Opération Initiation de Jeunes. Car Camélia a souhaité impliquer les jeunes du Centre Socioculturel Papin dans cette ce nouvel engagement. Le reste du financement a d’ailleurs été collecté par ces jeunes mulhousiens à partir de dons et d’autofinancement.
L’argent collecté, Melle BELMIR se rend en Algérie en septembre 2014 et après avoir étudié plusieurs devis avec les fournisseurs locaux afin d’obtenir le meilleur rapport qualité prix, elle acquière 243 cartables qu’elle distribue aux écoliers, collégiens et lycéens de Azzaba avec les membres de l’association NESS EL KHEIR. C’est une fierté et un aboutissement pour elle qui souhaitait déjà, à 16 ans apporter une contribution en Algérie alors qu’elle venait de finir le projet solidaire au Maroc. Elle avait déjà partagé ce souhait à l’époque avec une des personnes du Centre Papin, on lui avait répondu que L’Algérie était dans la  » blacklist ». Sans doute, faisant référence à la décennie noire que ce pays a dû traverser.
Camélia ne s’arrête pas là. Durant un autre séjour en septembre 2014, elle rencontre la Présidente d’une autre association FOREM à Azzaba, Mme GUERIB, lors de l’inauguration d’une toute nouvelle structure dédiée à l’accueil de jour pour les orphelins . Elle visite les lieux. L’espace est important et elle imagine le potentiel à offrir à ces orphelins. Elle décide d’exploiter une pièce dédiée à l’informatique qui permettrait aux jeunes de s’initier à tous ce que peux offrir le web. Educ’ Action 2 est né. Le but: acquérir une quinzaine d’ordinateurs, des imprimantes, du mobilier de bureau. Le financement est évalué à 16700 euros. Camélia prévoit également une formation d’apprentissage à l’usage de l’outil multimédia destiné aux jeunes orphelins.
Dans le cadre de la dynamique des jeunes adultes du quartier Francklin à Mulhouse, quartier classé ZUS ( zone urbaine sensible) par la Politique de La Ville , Camélia s’entoure de de Melle Emilie RIETHMULLER-27ans-, animatrice à mi-temps, et de Melle Chainez KHENNAOUI, d’origine algérienne, demandeur d’emploi, 22 ans  pour mener à bien ce projet . Elle entend par là, favoriser et initier d’autres personnes à s’impliquer dans des projets solidaires, « par et pour les jeunes », me dit-elle. Aussi, on parle de ce projet solidaire dans la presse locale.
A cet effet, Mme Houria YOUSFI,  Consul Algérie à Strasbourg a tenu à rencontrer Camélia et l’a félicitée pour ce future projet. Elle a faîte une promesse de dons d’ordinateurs et d’imprimantes d’occasions ( le nombre n’a pas été encore quantifié) et d’en assurer le transport jusqu’à Azzaba. Mme YOUSSI s’est également engagé, à titre personnelle, à financer le passeport algérien à l’une des collaboratrices de Camélia.
algerie-focus soutient le projet de Camélia. Nous serons présent en septembre 2015 lors de l’inauguration de la salle informatique à Azzaba. Et nous ne manquerons pas alors de partager avec vous cet évènement.
Camélia a inscrit en sous titre de son projet  » Educ’ Action 2  » : « des projets solidaires pour un avenir moins galère », les valeurs qui l’animent sont  » Solidarité, Fraternité et Citoyenneté ».
Et personnellement, je suis admirative devant ce petit bout de femme de 24 ans lucide, déterminée, bien ancrée des deux côtés de la Méditerranée. Je dis Bravo et bonne chance au projet » Educ’ Action 2″.
Pour les lecteurs d’Algérie-Focus qui veulent soutenir financièrement à ce projet : [email protected]
Partenaires officiels du projet » Educ’ Action 2″ sont: la Ville de Mulhouse, la CAF de Mulhouse, Le centre Papin Mulhouse, Le Consulat Général Algérie de Strasbourg, Air Algérie, iMadrassa.com, Hôtel BELLE VUE de Skikda, Fatiha AFFRET.
Fatiha AFFRET