La langue amazighe était au centre d’un débat animé par plusieurs chercheurs lors d’une rencontre organisée par le Conseil supérieur de la langue arabe (CSLA) sous le thème de « La langue maternelle dans la société algérienne ». Les thèses développées à l’occasion confortent l’idée selon laquelle tamazight a fait l’objet de discrimination et ce, depuis l’indépendance.
C’est pour évaluer les effets des nouvelles dispositions constitutionnelles sur les langues arabe et amazighe que cette rencontre a été organisée. Sans surprise, la nouvelle constitution a été singulièrement louée par les conférenciers qui ont estimé que les dispositions relatives aux deux langues auront pour répercussion le renforcement de la cohésion nationale. C’est en tout cas, ce qui ressort des propos tenus par le secrétaire général du Conseil supérieur de la langue arabe (CSLA), Djilali Taleb Ali, qui a mis en exergue le fait que «la promotion des langues arabe et amazighe à la faveur de la révision constitutionnelle renforce les constantes et l’unité nationales».
Les thèses énoncées par les conférenciers sous-entendaient que la langue amazighe a été stigmatisée depuis indépendance pour des raisons idéologiques. En effet, un processus d’arabisation a été mis en place au lendemain du recouvrement de la souveraineté nationale dans le but d’imposer la langue arabe et par-delà, une identité. La volonté manifeste des autorités était d’effacer e façon définitive tout ce qui se rapportait à l’identité amazighe. On risquait, rappelons-le, la prison si on était surpris à écrire en tifinagh.
Les autorités semblent vouloir dire aujourd’hui que cette page obscure de notre histoire est bel et bien tournée. Les propos du spécialiste en linguistique à l’université de Tlemcen, Abdennacer Bouali, qui a affirmé que «la langue amazighe transmise oralement de génération en génération aurait dû être promue langue nationale au lendemain de l’indépendance pour éviter toute équivoque», s’inscrivent en droite ligne dans la nouvelle doctrine du régime.
Quoi qu’il en soit, les dispositions de la nouvelle constitution ne garantissent nullement une généralisation ni un épanouissement de la langue amazighe, tant les esprits à l’intérieur du régime et dans de larges pans de la société sont encore marqués par l’exclusion. La création d’une académie «officielle» de la langue amazighe aura, selon la majorité des spécialistes, un effet dévastateur sur cette langue qui risque d’être coupée de son milieu naturel pour entre cloîtrée dans une institution sujette à toutes les instrumentalisations.
Massi Mansour