Le marché de la drogue a changé de main…

Redaction

Par Saber Wahid

Le désormais ex directeur des renseignements généraux de la sûreté de wilaya d’Oran, actuellement en détention provisoire, doit comparaître devant la justice entre autres pour « détention de stupéfiants dans le but de sa commercialisation ». Selon des comptes rendus de la presse locale oranaise, la commission d’enquête dépêchée par la DGSN pour enquêter sur ce responsable, resté trop longtemps en poste à Oran, a découvert une quantité de 19 grs de cannabis dans les tiroirs de son bureau. Or, il est de notoriété publique que ce commis de l’Etat ne fume même pas. Ce qui laisse supposer que « la marchandise » surprise dans son bureau est destiné à un autre usage. Probablement pour faire chanter des citoyens, estiment certains et non à la commercialisation. La thèse de la commercialisation n’a pas convaincu grand monde. Un autre fait, se rapportant à la drogue, rapporté par le quotidien arabophone « El Khabar » concerne un résidant turc, patron d’une petite PME.

Actuellement, il purge une peine de six mois de prison pour découverte d’une petite quantité de kif et de cocaïne dans sa voiture personnelle. Or, le chroniqueur judiciaire le moins averti sait pertinemment que la Justice algérienne se montre particulièrement intraitable dans les affaires de la cocaïne : les peines qu’elle prononce s’échelonne entre cinq et dix ans. Selon plusieurs sources, cet étranger a été victime d’un complot monté par des gens de son entourage disposant « d’entrées » au niveau des services de police. Ces deux faits rappellent un autre beaucoup plus grave : celui d’un ex chef de sûreté de wilaya d’Oran qui avait accusé, et devant le tribunal, un ex officier de la DRS d’être derrière une cargaison de 900 kgs de kif destinée à « l’exportation », cargaison découverte sur les quais du port d’Oran. Zendjabil, un énigmatique personnage lié à cette affaire et d’autres du même genre n’a jamais été jugé, quoique appréhendé, selon certaines sources, par les services de police.

Ces faits, et tant d’autres, montrent que le commerce de la drogue a changé de main. L’ère des petites gens, qui se rendaient au Maroc en traversant frauduleusement les frontières pour ramener tout au plus un pain de kif d’un kilo, est bien révolue. Certes, ce genre de dealers doit exister encore et survivre notamment à Maghnia et les villes frontalières. Mais l’Algérie est devenue depuis quelques années un pays de transit de la production marocaine de la « zetla » vers les autres pays du Maghreb et surtout vers l’Europe. Ce constat est réitéré par plus d’un observateur. Et cette orientation du commerce de la drogue remonte à une dizaine d’années. Ce qui laisse supposer l’émergence de nouveaux « acteurs » et surtout de nouvelles complicités dans les appareils et institutions chargés de surveiller les frontières. De dealers de seconde zone, nous sommes passés à une mafia bien organisée, chapeautée par moment par de hauts responsables tapis dans les appareils de la sécurité de l’Etat. Conséquence : de temps en temps, la presse rapporte des informations concernant des prises importantes. La dernière en date celle de la semaine dernière de sept tonnes de résine de cannabis. Dans ce cadre, les observateurs ont noté que même les circuits du transit de la drogue a changé depuis quelques années. Les voies passant par les hauts plateaux sont de plus en plus empruntées au détriment de celles du nord ouest. Ceci est valable notamment pour les quantités destinées à être acheminées vers la Libye ou la Tunisie.

Mais l’autre nouveauté dans la galaxie de la drogue en Algérie est l’élargissement de la consommation locale de la cocaïne. Les oranais se souviennent encore de ce fils de notable, surpris il y a deux ans en possession de quelques grammes de poudre. Il a été condamné à dix ans de prison ferme avec d’autres. Selon certains, les endroits de l’usage et surtout de la commercialisation de la « blanche » se sont multipliés à Oran depuis les quatre dernières années. Les mêmes observateurs notent que les « usagers » de cette drogue se recrutent exclusivement parmi les enfants de la nomenklatura. Dans ce sens, on cite les fils de certains walis (gouverneurs) et de certains généraux. Le prix de la ligne (filet) est hors porté des jeunes désoeuvrés ou même des cadres moyens des entreprises et de l’administration. Ceux là, et fort heureusement d’ailleurs, se contentent du petit joint.
De manière globale, la consommation du kif prend de plus en plus de l’ampleur.

Des rapports de police, de la Gendarmerie et de l’Office chargé de la répression de la drogue signalent de plus en plus que les lycéens et les lycéennes sont de plus en plus nombreux à « goûter » au kif. Aussi, le trafic de cette drogue échappe de plus en plus aux petits dealers au profit de « grosse pointures » bénéficiant de complicités au niveau des institutions de sécurité de l’Etat. Ce qui fait dire à un observateur que les prises de drogue signalées de temps à autre concernent ceux qui veulent parasiter des réseaux et des circuits bien établis, ou se rapportent à des luttes de clans se disputant un marché brassant des centaines de milliards de cts. Des clans opposants des fois des services de sécurité eux même…….