Le suicide, un phénomène tabou en Algérie

Redaction

À Sidi Bel-Abbès, à l’ouest du pays, une femme âgée d’une cinquantaine d’année à tenté mercredi de mettre fin à ses jours en se jetant de la terrasse d’un bâtiment situé au cœur d’une cité populaire, la cité des 400 logements. Il aura fallu l’intervention de la Protection Civile et des policiers pour la dissuader de commettre l’irréparable.

Cette tentative de suicide n’est pas un acte isolé. Au contraire, elle fait suite à de nombreuses autres tentatives survenues un peu partout à travers le pays. Il n’existe pas de statistiques officielles en Algérie sur le suicide mais les faits relatés au quotidien par les médias reflètent l’ampleur du phénomène.

Plusieurs cas de suicide sont déplorés chaque jour en Algérie. Désespoir, conditions sociales difficiles, déception affective, sentiment de solitude et d’incompréhension de la part de son entourage poussent des personnes au bord du gouffre à commettre l’irréparable. En novembre 2013, un suicide tragique avait défrayé la chronique et créé une véritable polémique à Jijel. Deux amoureux, âgés de 18 et 19 ans, avaient choisi de mettre fin à leurs jours pour échapper à l’incompréhension et au conservatisme des leurs. La même année, la ville d’Oran avait connu une importante vague de suicides. Quatorze personnes s’étaient donnés la mort, et une centaine de tentatives avaient été recensées par la direction du centre hospitalo-universitaire. En octobre 2013, le fils d’une ancienne députée du RND s’était suicidé dans son appartement de Said Hamdine, à Alger. Le jeune de 24 ans avait utilisé l’arme à feu de sa mère pour mettre fin à ses jours.

Briser le tabou

En 2012, lors d’un colloque intitulé « Algérie, changement social ou crise sociétale totale », organisé à Oran, plusieurs spécialistes ont insisté sur l’importance de prendre très au sérieux la progression du phénomène du suicide en Algérie. Traduisant un mal-être social, familial et sociétal, le suicide peut concerner tous les Algériens.

Pour ce qui est des chiffres, les intervenants ont souligné le tabou qui prédomine toujours, et qui pousse de nombreuses familles à dissimuler la vérité à leur entourage de peur du qu’on dira-t-on. Les chiffres sont donc imprécis, et probablement inférieurs à la réalité. « Rien qu’en 2009, quelque 203 cas de suicide ont été recensés. Parmi ces suicides, 69% sont des hommes et 65% sont des célibataires », a déclaré le docteur Hadj Hacène Fethi, psychiatre à l’EHS de Sidi Chahmi.

Le suicide en Algérie demeure un phénomène nécessitant une sérieuse prise en charge qui devrait commencer par la multiplication des cellules d’écoute et d’accompagnement psychologique au niveau des écoles et des entreprises, pour assister les personnes les plus fragiles.