Malgré le poids des traditions, les jeunes algériens sont loin d’être des novices en matière de sexualité, surtout lorsque le sujet traite du sexe opposé. C’est en tout cas l’impression qu’ils donnent tous les jours dans les rues des grandes villes. En effet, dans sa splendeur, toute femme se promenant seule est, tour à tour, décrite, décriée, saluée, souillée, insultée, vociférée quand elle n’est pas malmenée physiquement. Son physique lui, est passé au crible au fil par des bandes de jeunes rencontrées tout au long de son périple, et son anatomie récitée. Loin d’être exagérée, cette situation est celle qui est promise à toute femme qui a pris la dure décision d’affronter la faune algérienne (la rue). Elle voie ses congénères qui à défaut de se reproduire « seuls », se dédoublent dans cet environnement urbain apparemment propice, défiant toutes les règles de la nature et de la génétique. Pour les rares nantis dont les odeurs pestilentielles dans les transports en commun découragent, mais encouragés par l’annulation des crédits pour les voitures, les rares lieux de loisirs, les endroit de non droits et autres taxe sur la téléphonie mobile n’ont pas mis en péril les love story à l’algérienne. L’avenir qu’on leur prépare à défaut des leur donner les moyens de le faire eux même, risque d’être en inadéquation avec les mousselssel (séries télé) à l’eau de rose que leur sert la télévision algérienne. Frustration au quotidien, avortement, tactique moyenâgeuse pour contourner les lois de la République en matière de mœurs, le sexe en Algérie reste un sujet circoncit.
Jardins publics à usage privé
Les jardins publics ont servi pendant longtemps de nid d’amour aux jeunes algériens. Dépourvus de lieux de tranquillité et de discrétion, cette nouvelle génération de couple, bercée par « Hélène et les garçons » et autres séries étrangères importées sans mode d’emploi, s’était approprié les places publics, forêts et jardins. Dans les années 2000, le phénomène avait pris des proportions énormes. Se transformant en lieu de débauche, ces lieux sont délaissés petit à petit par les familles et deviennent des zones de non droit. Des chaines interminables à l’entrée de certains lieux publics laissaient paraître une situation de débauche sans précédent, cautionnées un temps soit peu par les autorités qui n’avaient jadis pris aucune disposition dans ce sens. Même les télévisons étrangères s’y sont intéressés, filmant en camera cachée les flirts et autre ébats amoureux en pleine nature. Décision hâtive pour certains, appropriées pour d’autre, les autorités au bout de quelques temps avaient lancé la chasse aux couples. Des brigades spécialisées traquaient les jeunes tourtereaux, et honte et déshonneur étaient promis pour les tristes capturés.
Des « love hotel » made in Algeria
Quelques séries américaines plus tard, une astuce dont l’efficacité a été prouvée a fait son apparition. Les jeunes couples en usent à volonté au vu et au su de tout le monde. Le procédé est simple: alors que le couple ne peut accéder à une chambre d’hôtel que sur présentation du livret de famille attestant du mariage des deux demandeurs, la réservation est faite par des couples de même sexe. La loi n’interdisant pas de réserver des chambres entre amis de même sexe. Mais dès la nuit tombée, les échanges se font et les amoureux (ou pas) peuvent désormais profiter tranquillement de leur lit à une place, couchés côte à côte. La difficulté du procédé réside dans le fait qu’il est rare de se procurer des chambres à l’étage à l’abri des regards indiscrets et si possible l’une à côté de l’autre, pour ne pas éveiller les soupçons. Autre difficulté de la manœuvre, la formation d’un groupe, car même si le procédé est bien rodé, il impose la formation d’un groupe (2 filles et deux garçon minimum). Étonnement les gérants d’hôtels conscients depuis longtemps du manège, ferment les yeux. D’après l’un d’eux, il est en infraction dans le cas où il aurait permis à ces derniers d’avoir une chambre pour deux. Du moment que le formulaire et les réservations ont été fait en respectant la loi (pour des personne de même sexe par exemple), le reste lui importe peu. Rarement embêté par la police, il s’en méfie quand même. Rien que dans le quartier où se trouve son hôtel, quatre établissements ont été contrôlés et sanctionnés par la gendarmerie l’été dernier.
No parking, No sex
L’algérien connu pour son originalité, nous fait encore une fois profiter de ses idées saugrenues mais efficaces surtout lorsque il s’agit de sexe. Depuis quelques temps, garages, parkings, aire de repos, sont devenus des lieux jalousement gardés et cela où qu’ils soient. Trop bien diront certains. Non pas que la conscience des gérants vis-à-vis de leurs clients ait du jour au lendemain devenue vive, mais simplement parce que que le cadre discret de ces endroits clos a donné lieux à des scènes amoureuses des plus torrides d’après certains gardiens. « D’ailleurs, depuis nous avons décidé qu’il n’est autorisé qu’au conducteur de rentrer dans le garage, le passager, si passager il y a, doit l’attendre à l’extérieur. » explique un gardien.
Des plaques sont là à l’entrée pour confirmer ce nouveau dispositif. D’autres ont préféré investir dans des caméras, instruments des plus dissuasifs pour clients à la recherche de discrétion.
Reste les appartements privés. Réservés à une certaines catégorie de privilégiés, ils donnent lieu aux plus dangereuses opérations d’avortements. Rarement dénoncées, les conséquences sont souvent irréversibles. La police découvre régulièrement des cadavres de bébés jetés dans les poubelles ou les bennes a ordure dans des sacs noirs. Un sale boulot dont certains en ont fait leur spécialisté dans les milieux initiés.
Alger : la communauté Gay ne se cache plus
On les dits dangereux car suspicieux, certains quartier de la capitale sont connus pour abriter des colocations de cette communauté. Ils ont leur portes voix, leurs stars, et leurs ghettos. Effet de mode ou réalité des changements de mœurs en Algérie, ils sont de plus en plus nombreux surtout dans les couches aisées de la population. L’une des plus grandes stars du Rai du moment revendique haut et fort son homosexualité. Le chanteur est convoité par les réalisateurs franco-algériens, invité à tous les festivals régionaux pour sa popularité, un bon filon selon certains.
« C’est une manière de s’affirmer ou de créer un buzz autour de sa personne » explique un jeune étudiant.
Loin sont les années où es homos ne sortaient pas ou très peu. Eux qui étaient pris à partie par tout le monde dès qu’ils montraient le bout de leur nez, s’affichent entre eux dans certains ghetto bien précis, on les trouve aujourd’hui dans les soirées branchées de la capitale. Loin d’avoir accepté les homosexuels les algériens semblent s’en accommoder, les temps changent.
Virginité, Visa pour le mariage
L’affaire a fait les choux gras de la presse nationale durant toute la semaine dernière. Un service d’état civil aurait exigé pour des jeunes mariés le certificat de virginité de la future mariée. Polémique : alors que les mentalités évoluent, et que cette pratique a été bannie officiellement sous la pression des associations féministes, voilà que des gardiens du temple des traditions tentent tant bien que mal de faire de la résistance. A coup de réactions et de contre réactions, le service d’état civile concerné revient sur ces directives et publie un droit de réponse où il nie avoir émis toute instructions de ce type. Le mal est fait, la rue en parle comme si cet article avait remué le couteau dans la plaie. Un sujet sensible que l’on croyait révolu, mais qui pourtant fait régulièrement sensation dans les pages faits divers des journaux. Une femme qu’on raccompagnée chez elle le soir de la nuit de noce., une autre qui raconte son périple pour se refaire une virginité dans un pays voisin. Les récits sont nombreux et variés et ils montrent bien la difficulté de rallier progressisme et traditions. Même si les mentalités changent, les habitudes elles ne suivent pas. La crise du logement et le chômage n’aidant pas, ce sont des algériens tentés par le rejet de certaines traditions encombrantes qui font face à la réalité des choses. C’est ce que constate un jeune étudiant en sociologie : « Peut-on vivre en concubinage alors qu’on est encore chez ses parents ? Peut-on aspirer à une vie sexuelle alors que la virginité est une condition sine qua non avant le mariage ? La réponse est peut être ailleurs…. De l’autre côté de la mer!!! »
Témoignages
Youcef, informaticien
Le sexe, c’est tabou, mais ça dépend avec qui on en parle. En général entre jeunes ça ne l’est pas vraiment, mais avec la famille ça l’est incontestablement. Même entre jeunes de sexes opposés, les mœurs évoluent, Il suffit d’y mettre la forme, ne pas être très cru. Dans leur majorité les jeunes n’ont pas de relations sexuelles proprement dites. La plupart du temps pour des raisons religieuses ou parce que les jeunes filles sont réticentes pour des raisons familiales ou pour garder leur virginité, leur passeport pour le mariage.
Yasmine, journaliste
Je me fais embêter une trentaine de fois à chaque fois que j’engrange 10 mètres sur une grande artère. C’est de la folie, du coup je ne sors plus ou avec un gare du corps. C’est frustrant à la fin.
Imene, pharmacienne
Nous sommes un peuple de frustré, garçons et filles, et c’est tout à fait normal. Comment ne pas être frustré de s’abstenir. Je ne blâme personne. D’un autre côt , les familles sont plus tolérantes, surtout dans les grandes villes, elles parlent de sexe à leurs filles et même à leurs garçons. C’est bien ça avance.
Djazil, Dj
Le sujet ne peut être abordé de la même manière d’une classe à l’autre. Il vous suffit de poser la question aux pharmaciens par exemple, vous verrez que la vente de préservatifs est très importante. Maintenant faites le dans le sens inverse et posez la question directement aux jeunes, vous en jugerez qu’ils vont tous faire vœux de chasteté. Résultat, le sujet reste sensible et tabou.
Amel, médecin
On a vraiment affaire à deux mondes distincts. Les gens sont tellement différents. Une fois nous faisions de la sensibilisation en partenariat avec les pompiers le 1er Décembre (journée mondiale de lutte contre le sida). Nous avions exposé des préservatifs et expliquions comment les utiliser et quand. J’ai vraiment été subjuguée, d’un coté les jeunes qui n’en avaient jamais entendu parler. Ils devenaient rouge dès qu’ils entrevoyaient un préservatif. Certains quittaient le stand subitement. Les autres, gênés, me laissaient terminer. Quant à une autre catégorie de jeunes et de moins jeunes d’ailleurs, ils m’en demandaient carrément. J’ai du en distribuer quelques milliers ce jour là.
Fouad, étudiant
Après on se demande pourquoi on chope autant de maladie, c’est à cause de pratiques comme celle-ci. Arrêtez de faire passer les gens pour des victimes.
Ahlem, déléguée commerciale
Moi quand je sors, je fais le maximum pour ne pas être provocante. Même si je ne cautionne pas les agissements de nos jeunes dehors, il ne demeure pas moins que je les comprends. Ils n’ont aucun moyen de se dépenser, pas les moyens de se marier, encore moins d’avoir une copine. Ils se rabattent sur ce qu’ils peuvent, la parole souvent agressive. Si ça n’existe pas autre part que chez nous, c’est pour les raisons que j’ai énuméré.
Habib, marchand de journaux
Vous ne pouvez pas vous imaginez ce que les apparences sont trompeuses. Les mœurs ont vraiment changé, regardez juste ce qui se passe dans les endroits publics. Ne vous fiez surtout pas à un voile ou une barbe, encore moins à des paroles. La tenue vestimentaire c’est un laissé-passé. Les avortements même si on en parle pas vraiment sont en hausse vertigineuse. Certains ont en fait leur spécialité.
K Louna