Soigner ou réprimer la toxicomanie en Algérie ? Triste dilemme

Redaction

Cannabis Toxicomanie Algérie

En quelques années, la toxicomanie est devenue l’un des principaux problèmes de la santé publique et un enjeu majeur de la société. Les ravages de la drogue au sein des populations, particulièrement les jeunes, constituent une véritable hécatombe.

Nos quartiers et cités, nos villages et douars, nos bidonvilles et quartiers riches sont sérieusement touchés. Il y aurait actuellement en Algérie près de 300. 000 toxicomanes et plus d’un million de consommateurs occasionnels. Le plan national de lutte contre la drogue appliqué depuis deux ans a, certes, donné ses fruits en matière de répression, mais demeure insuffisant en matière de prise en charge des jeunes dans les centres de désintoxication et de sevrage.

A ce sujet, M. Yazid Heddar, psychologue clinicien en France contacté par téléphone a insisté sur  » la nécessité de privilégier le traitement médical plutôt que la répression du toxicomane. ». Ce spécialiste affirme que le toxicomane est avant tout un malade auquel il faut donner des soins. Et d’ajouter dans le même sillage, Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, assurait qu’il n’est pas métier plus difficile à exercer que celui d’être parent :

Beaucoup de parents, par orgueil, tentent d’ignorer le danger. Car en acceptant de regarder le problème en face, ils accepteraient aussi de voir leurs incapacités et leurs failles. Ils se sentent coupables. Ils préfèrent fermer les yeux plutôt que de parler. Les parents doivent avoir le courage de parler et de prendre leur enfant en tête-à- tête. Demander ce qui se passe. Il est capital que l’adolescent s’exprime et crache tout ce qu’il a à dire

Par ailleurs, les spécialistes de la santé, notamment ceux qui s’occupent de ces toxicomanes en cure de désintoxication, estiment que « l’aggravation de la situation sanitaire des consommateurs dépendants doivent modifier les modalités de prise en charge. La justice doit tenir sa place au carrefour des politiques sanitaires et sociales, d’une part, et répressive, d’autre part. Les dispositifs pénaux et sociaux doivent permettre le dialogue entre les intervenants en toxicomanie, le personnel médical et les magistrats, l’objectif est de favoriser l’intégration dans un processus de prise en charge et de recourir en dernier ressort à des sanctions pénales pour les toxicomanes ».

Ces spécialistes affirment que le toxicomane est avant tout un malade auquel il faut donner des soins. La FOREM, qui s’implique totalement dans la lutte contre la toxicomanie par l’organisation de campagnes de sensibilisation et des études sur le terrain, appelle par le biais de son président, M. Khiati, de remplacer les peines d’emprisonnement des jeunes drogués par des travaux d’intérêt généra! :

Il faut considérer le toxicomane comme une victime et non comme un criminel

Il estime, par ailleurs, que la prise en charge de cette catégorie de citoyens est inappropriée, dans la mesure où elle s’articule essentiellement autour de la médicalisation.  » Dans la majorité des cas, les Algériens consomment du cannabis. Nous n’avons alors pas besoin de médicaments ou de lits d’hospitalisation, mais d’un suivi sur le plan psychologique », commente le Pr Khiati. De son point de vue, les autorités nationales ne focalisent se pas assez sur le volet de la sensibilisation, d’autant qu’il est avéré que les accros aux drogues sont âgés, majoritairement, entre 13 et 35 ans.

Dans ce sens justement, et en matière de sensibilisation, l’Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie annonce que l’Algérie met en oeuvre un plan de lutte contre la drogue, auxquels contribuent quatorze ministères, en sus de la Police et de la Gendarmerie nationale. En dépit des efforts consentis par les pouvoirs publics et la société civile, à travers des innombrables actions de sensibilisation, force est de constater que le trafic de drogue en Algérie est désormais une réalité implacable, et ce ne sont pas les statistiques officielles qui contredisent les faits, du reste bien dramatiques.

Comme les spécialistes tiennent à le mettre en garde depuis un certain temps, notre pays ne se contente plus du statut du pays de transit mais tend petit à petit à devenir consommateur. L’on estime à cet effet à plus de 20% le taux de l’ensemble de la drogue saisie qui est destinée à la consommation. A cet état des faits, aux autorités concernées de retrousser leurs manches pour une meilleure prise en charge de ces toxicomanes car mieux vaut récupérer une personne touchée par ce phénomène que de la perdre à jamais. Cela par recours aux moyens thérapeutiques, à l’instar de la création de centres communautaires thérapeutiques.

Cependant, la justice doit tenir sa place au carrefour des politiques sanitaires et sociales, d’une part, et répressive, d’autre part. Les dispositifs pénaux et sociaux doivent permettre le dialogue entre les intervenants en toxicomanie, le personnel médical et les magistrats, l’objectif est de favoriser l’intégration dans un processus de prise en charge et de recourir en dernier ressort à des sanctions pénales pour les toxicomanes.

Lu sur La Tribune

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