Le comité exécutif de la Fifa se réunit jeudi 3 octobre et vendredi pour se prononcer définitivement sur un éventuel déplacement de l’organisation de la Coupe du Monde 2022 au Qatar en hiver. Le monde du football est en ébullition.
Les dirigeants qataris sont plus que jamais dans l’œil du cyclone. Les délégués de la Fifa, réunis à Zurich ce jeudi et vendredi, doivent effectivement trancher : la Coupe du Monde 2022, qui aura lieu au Qatar, sera-t-elle maintenue en été ou déplacée en hiver ? Réfractaire au départ à tout bouleversement du calendrier, le président de la Fifa, Joseph Sepp Blatter, a amorcé cet été un virage à 180 degrés pour contenir la colère de ses adversaires, qui comptent bien lui mener la vie dure en vue de sa réélection à la tête de la Fifa. Il rejoint ainsi le président de l’Union européenne de football (UEFA), Michel Platini, qui milite depuis des mois pour la tenue d’une Coupe du monde en hiver. L’objectif : éviter les chaleurs étouffantes, le thermomètre pouvant monter jusqu’à 50 degrés en juillet dans le minuscule royaume.
De son côté, le Qatar, qui ne veut surtout pas perdre le privilège d’accueillir le deuxième évènement sportif planétaire, en termes d’audience, s’est dit lundi prêt à organiser à n’importe quel moment de l’année la compétition.
Mais un changement de date est loin de faire l’unanimité. Les débats à Zurich s’annoncent longs et houleux. Les plus remontés, les patrons de la Premier League anglaise vont jusqu’à demander la relocalisation de l’épreuve. « Ils doivent changer de lieu s’ils ne peuvent l’organiser en été », a déclaré Richard Scudamore, le patron du championnat britannique. Le championnat français aussi n’est pas avare de critique. « Dans l’hypothèse où la Coupe du monde se jouerait entre le 15 janvier et le 15 février, il nous faudrait déplacer onze matchs : six de championnat et trois de Coupe de France et deux de Coupe de la Ligue, cela nous empêcherait aussi de terminer la saison le 30 juin », avait confié dans les colonnes du quotidien sportif français L’Equipe l’ex-président de la Ligue de football professionnel, Frédéric Thiriez.
Dans les couloirs de l’UEFA, on mesure avec inquiétude les effets d’un changement dans le calendrier du football. « Soit on change la date, et cela peut entraîner un chaos incroyable car cela vient perturber le calendrier de certains championnats domestiques, comme celui du Mexique, soit on considère que jouer en hiver fout le bordel et on décide ce revoter en faveur d’un autre pays organisateur », murmure un fin connaisseur de la Fifa, cité par nos confrères du Monde. Candidate malheureuse à l’organisation de la Coupe du Monde 2022, l’Australie envisage, de son côté, de réclamer un dédommagement, accusant le Qatar de ne pas avoir respecté le règlement de la Fifa qui stipule que la compétition doit se tenir en été et non en hiver.
Accusations d’esclavagisme
Au-delà du débat sur le calendrier, les révélations fracassantes du quotidien britannique The Guardian, qui rapporte cette semaine des cas d’esclavagisme sur les chantiers des stades au Qatar, devraient épicer les discussions à Zurich. D’après des documents confidentiels confiés au journal britannique par l’ambassadeur népalais, quelques 44 maçons népalais sont morts entre le 4 juin et le 8 août sur leur lieu de travail. Le Qatar a aussi tôt démenti les rumeurs de travail forcé, parlant « d’informations fausses » et de « chiffres exagérés ». Le 7 octobre, une délégation internationale de défense des travailleurs se rendra sur place pour « constater les conditions de travail des migrants ».
La polémique autour de la tenue de la Coupe du Monde 2022 ne s’arrête pas là. Le 19 septembre dernier, Joseph Sepp Blatter a lâché une bombe dans le quotidien allemand Die Zeit, reconnaissant que le choix du Qatar comme pays hôte avait été « influencé par des intérêts politiques et économiques ». Ce qui est pourtant formellement interdit par le règlement de la procédure de désignation du pays organisateur.
C’est sûr jamais l’attribution d’une Coupe du monde n’aura autant déchiré l’univers footballistique. Lancée dès la désignation du richissme Etat du Golfe comme pays hôte, la polémique a été si vive depuis 2010 que le mode de scrutin en a même été changé. Désormais, l’attribution du Mondial se fera par vote du Congrès (les 209 fédérations membres de la Fifa) et non plus par vote du comité exécutif.