Le président du conseil Economique et social algérien entame un débat en ce mois de juin 2009 sur le rapport de son institution relative à l’indice de développement humain. Je rappelle que l’ IDH développé en 1990 par l’économiste pakistanais Mahbub ul Haq et l’économiste indien, prix Nobel d’économie Amartya Sen. L’IDH est un indice composite, compris entre 0 (exécrable et 1 (excellent), calculé par la moyenne de trois indices.
Le premier aspect ( A)quantifie la santé] /longévité (mesurées par l’espérance de vie à la naissance), qui permet de mesurer indirectement la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l’accès à une alimentation saine, à l’eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux adopté par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) en 1990. Il est plus fiable que l’indicateur précédent utilisé, le PIB par habitant, qui ne donne pas d’information sur le bien-être individuel ou collectif quantifiant que la production économique. En 2002, la Division de la population des Nations Unies a pris en compte dans son estimation les impacts démographiques de l’épidémie du sida pour 53 pays, contre 45 en 2000.
Le deuxième aspect (B) est le savoir ou niveau d’éducation mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes (pourcentage des 15 ans et plus sachant écrire et comprendre aisément un texte court et simple traitant de la vie quotidienne) et le taux brut de scolarisation (mesure combinée des taux pour le primaire, le secondaire et le supérieur). Il traduit la satisfaction des besoins immatériels tels que la capacité à participer aux prises de décision sur le lieu de travail ou dans la société.
Le troisième aspect (C) est le niveau de vie (logarithme du produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat), afin d’englober les éléments de la qualité de vie qui ne sont pas décrits par les deux premiers indices tels que la mobilité ou l’accès à la culture donnant ainsi IDH = A + D + E/divisé par trois (3).
A l’avenir il devrait inclure le taux de participation de la femme, signe du développement, à la gestion de Cité, des indicateurs environnementaux et démocratiques dont la liberté de la presse et les indices de corruption. Outre la question qu’il faille se poser, est ce la vocation d’un conseil économique et social de se substituer à un organisme statistique, en déplorant l’effritement du système d’information en Algérie, après analyse, il s’avère que le dernier rapport préliminaire du conseil économique et social de 2009, relatif à l’indice du développement humain pour 2008, dont le premier responsable en a donné la teneur le 18 avril 2009 où selon lui «tous les indicateurs sont au vert », verse dans une autosatisfaction inexplicable, étant fortement biaisée pour six raisons que j’évoquerai dans cette présente contribution. S’il faille éviter la sinistrose gratuite et les dénigrements, il faut également éviter l’autosatisfaction source de névrose collective, les autorités du pays ayant besoin d’un rapport objectif afin de corriger les erreurs.
Aussi, il faut éviter de se référer aux masses globales de peu de significations pour toute politique concrète mais réaliser une analyse à la fois structurelle, sectorielle et qualitative liant le processus de l’accumulation à la dynamique de l’emploi, de la répartition du revenu par couches sociales ce qui constitue une faiblesse fondamentale de ce rapport.
I- Nous savons que le taux de croissance du PIB représentant environ 1/3 dans le calcul de l’indice a été d’environ de moins de 3% entre 2006/82008 en Algérie et que les 80% hors hydrocarbures sont eux mêmes tirés indirectement par l’effet des dépenses publiques via les hydrocarbures, les entreprises autonomes créatrice de valeur étant très faibles. D’ailleurs il est inexplicable que les effets de la crise mondiale structurelle , donc durable qui se répercute sur le cours des hydrocarbures donc sur les recettes futures de l’Algérie n’aient pas été abordées sereinement ce qui aura un impact sur le calcul futur de l’indice .Ce qui explique d’ailleurs que les exportations hors hydrocarbures stagnent à environ 2% du total entre 2005/2008. Lié à cet aspect, existe une non clarté dans l‘analyse entre l’importance des dépenses monétaires plus de 150 milliards de dollars entre 2004/2008 et leurs impacts sur la sphère économique et sociale tout en intégrant les normes de coûts/qualités par rapport aux normes internationales pour déterminer les surcoûts et donc la mauvaise gestion.
II- Les derniers rapports du PNUD montrent que l’Algérie est classée à la 102ème position sur un total de 177 pays, améliorant timidement sa position par rapport à 2005/2006 (103ème) au niveau de l’indice du développement humain et a t-on calculé le PIB hors hydrocarbures où la position reculerait d’environ de 20 points la ramenant à la 153ème position sur 177 soit parmi les pays les plus pauvres de la planète ? Cela explique également la faiblesse du pouvoir d’achat (le Smig étant à 120 euros contre une moyenne de 150/200 au Maroc et en Tunisie). Le rapport aurait du analyser le ratio global masse salariale sur le PIB total qui passe de 22,10% en 1991 à 20% en 2001 et à moins de 19% entre en 2006/2008 ce qui aurait permis de montrer que la salarisation est en nette baisse ( qui est d’ailleurs une des explications de la crise mondiale actuelle) accusant une régression au profit des emplois rentes alors que pour 2006/2007 le ratio masse salariale sur le PIB est supérieur à 30% au Maroc et 37% en Tunisie, et varie entre 40/60% selon les pays développés oubliant ainsi que le salaire est un prix et que le travail est la seule source de la richesse .
III- Comme le rapport omet d’analyser objectivement l’indice des prix à la consommation et donc les raisons du processus inflationniste ? Le taux d’inflation est –il réellement de 3 % – moyenne 2006/2007 et de 4% en 2008 selon l’officiel mais dépassant les 10% selon certains organismes internationaux récents (enquête sur la région Mena) ? Car le besoin est historiquement daté et doit tenir compte de la structuration sociale, les ménages algériens ne mangeant pas des chiffres erronés mais étant confrontés à la dure réalité quotidienne. Et, phénomène nouveau, a-t-on, pris en compte les crédits à la consommation, où on assiste à l’endettement constant des ménages pour certains biens durables ( pr êts voiture, logement par exemple), un pr êt de 100 millions de centimes algériens en 2009 traduit un remboursement, tenant compte des intérêts composés, de 150 en 2012 dont l’effet à terme est une détérioration du pouvoir d’achat avec un SNMG ne dépassant pas 120 euros. Où en est l’analyse de la concentration du revenu source d’injustice sociale au profit de couches spéculatives au détriment à la fois des producteurs de richesses et de la majorité des ménages algériens , tout cela renvoyant à une lutte contre la corruption et donc à l’urgence d’une bonne gouvernance ?
IV- Le traitement de la sphère informelle, produit du système bureaucratique facteur bloquant, où il s’agit de distinguer la sphère informelle productive, de la sphère marchande spéculative drainant plus de 40% de la masse monétaire en circulation et employant des millions de personnes laisse à désirer. Ce qui nous renvoie à l’indicateur du calcul du taux de chômage devant tenir compte de la dynamique féminine (entre 400.000/450.000 de demandes par an qui s ‘ajoute au stock de chômage actuel ), où selon l’officiel, il serait passé de 29% en 2000 à 23,7% en 2003, de 17,7% en 2004 , de 15,3% en 2005 e t à moins de 12% en 2008 alors que selon certains organismes internationaux il serait de plus de 20% .Est ce les emplois rentes fictifs contribuent à la création de valeur d’une part , d’autre part, et est ce que les emplois précaires dominants ( 3 à 6 mois pour un jeune parfois universitaire à 6000 dinars par mois ) sont ils un signe d’amélioration de la situation sociale ? Est-ce que le rapport a fait une analyse objective à la fois sociologique et économique de l’essence de l’extension des harragas qu’il faillite éviter de banaliser ? Paradoxalement, la crise du logement et des distribution de revenus sans création de valeur au nom de la solidarité absorbant plus de 10% du PIB (bien que la destination des transferts sociaux ne concerne pas toujours les plus défavorisées, ) ne permettent –elles pas à une famille de disposer de plusieurs revenus reportant dans le temps provisoirement les tensions sociales. Comme le rapport omet l’analyse des couches moyennes productives pilier de tout développement en voie de disparition , des enquêtes sur le terrain montrant en comparaison au Maroc et à la Tunisie (il existe des disparités par strates du fait que la politique salariale dans ces deux pays favorise les couches moyennes productives et non les rentières comme en Algérie), que le niveau de vie des fonctionnaires algériens en termes de parité du pouvoir d’achat (tenant compte qu’en moyenne 80/90 dinars = 1 euro, avec la dévaluation récente , 11 dirhams marocains = 1 euro et 1,60 dinar tunisien = 1 euro) est plus élevé au Maroc et beaucoup plus en Tunisie.
V- Autre problème abordé superficiellement, inclus dans le calcul de l’indice, une politique cohérente l’un des pilier du développement du XXIème siècle, la revalorisation du savoir et l’urgence de la réforme de l’école, mère de toute les réformes en se limitant aux dépenses monétaires dans l’éducation. Alors que les enquêtes sur le terrain montrent clairement l’effritement du niveau scolaire, ayant plus de chance d’être chômeurs au fur et à mesure que l‘on gravite dans la hiérarchie scolaire, des sureffectifs dans les classes et amphithéâtres, des déperditions croissantes du primaire, secondaire au supérieur, ,une gestion défectueuse des établissements scolaires avec des bâtiments délabrés et un environnement sans âme. Dans ce cadre, comment ne pas rappeler que le nombre de chercheurs par habitant est de 236 en Algérie, 540 en Tunisie et 2.000 aux USA, la norme internationale selon l’Unesco étant de 600, que la mensualité d’un professeur et maître de conférences, en fin de carrière, est environ d’un tiers de celles de ses collègues marocain et tunisien, avec les nouvelles augmentations de 2008( moins du un tiers par rapport au salaire d’un simple député ou sénateur ) et 80% de ce montant en retraite, sans compter les conditions de travail bien plus meilleures et surtout la considération (statut de l’élite au niveau de la société en Algérie dévalorisé). Nous ne parlerons pas des enseignants du primaire et secondaire encore plus dérisoire. Où en sont concrètement ces fameuses applications du CNES, loin des séminaires, sur la revalorisation de la connaissance ? Quant au budget de la recherche par rapport au PIB, il est, selon l’Unesco pour 2006 de 0,36% alors qu’il est de 1% pour la moyenne Afrique, 2% pour les pays asiatiques et 3 à 4% pour les pays occidentaux.
VI- En ce qui concerne le système de santé, inclus également dans le calcul de l’indice, le rapport du CNES fait une analyse globale quantitative, loin des réalités, en ignorant des aspects qualitatifs fondamentaux. Bien qu’existe des compétences avérées,(mais est ce que le professeur de médecine a-t-il un réel pouvoir ?) la gestion du système de santé est défectueuse, bon nombre algériens prenant en charge souvent médicaments,couvertures, et nourriture ),Paradoxalement certains à faibles revenus , se dirigent vers des cliniques privées n’ayant pas de relations de clientèles, la médecine gratuite favorisant certains responsables et donc n’ayant de gratuit que le nom.. Pour, preuve, bien que louant la médecine algérienne, bon nombre de responsables se font soigner à l’étranger. Ainsi, le rapport du CNES fait tune analyse globale quantitative, loin des réalités, ignore ces aspects qualitatifs fondamentaux.
En résumé, la majorité des observateurs nationaux et internationaux convergent vers ce constat : la réforme globale source de croissance durable est en panne ce qui contredît le rapport du CNES qui se limite aux dépenses monétaires et à partir d’agrégats globaux de peu de significations pour toute politique concrète, sans analyser la structuration sociale du produit et du revenu national. Les rapports du FMI, de la banque mondiale, de l’OCDE de début 2009 contrastent avec le rapport du CNES, tablant sur un taux de croissance en Algérie de 2% en 2009 et environ 3% en 2010 ( provisoire alors que la population active dépasse les 3,5% annuellement ) du essentiellement à la dépense publique( les infrastructures n’étant qu ’un moyen ) alors qu’il est reconnu internationalement y compris le gouvernement algérien que l’Algérie doit avoir sur 5/7 années minimum 6/7% de taux de croissance pour créer 3 millions d’emplois à majorité composée de travail utiles. Toute la problématique est intiment lié à une plus grande cohérence et visibilité de la politique économique et sociale au sein d‘une économie de plus en plus ouverte. Comme je précise que le CNES n’étant pas un bureau d’études, et ne saurait se substituer ni aux organismes nationaux de la statistique, ni aux organismes internationaux qui ont leurs propres méthodes redressements et de comparaisons internationales. Sa vocation est autre à l’instar de tous les CNES du monde étant de favoriser le dialogue économique et social grâce à une composante représentative et diversifiée de la société pour une meilleure cohésion sociale en principe pour sensibiliser l’opinion sur l’approfondissement des réformes nécessaires mais difficiles à court terme du fait de leur coût social. En bref le président de la république a besoin d’un rapport objectif car il engage l’avenir du pays.AM
Le 14 juin 2009 Docteur Abderrahmane MEBTOUL pour Algerie-Focus.com