« Il ne peut y avoir de développement durable sans démocratie »
Amartya SEN – économiste indien prix Nobel d’économie
Par Docteur Abderrahmane MEBTOUL, expert international, professeur en management stratégique.
Il est admis par la majorité des observateurs nationaux et internationaux que les enjeux fondamentaux de l’élection présidentielle en Algérie du 09 avril 2009 est le taux de participation , taux déjà très faible aux élections locales passées contrairement à l’élection présidentielle du 08 avril 2004 dont les résultats officiels ont donné le candidat Abdelaziz Bouteflika largement vainqueur avec 8.489.487 voix, soit un taux de 83,49% des suffrages exprimés, suivi de Ali Benflis avec 806.458 voix (7,93%). M. Abdellah Djaballah venant en troisième position avec 492.015 voix (4,84%), suivi de Saïd Sadi avec 196.434 (1,93%), puis Louisa Hanoun avec 118.367 voix (1,16%) et enfin Ali Fawzi Rebaïne avec 65.073 voix (0,64%). Le taux de participation a connu une augmentation (59,26%) par rapport aux précédentes consultations électorales (47% lors des législatives de 2002 et 50,11% lors des locales).
Qu’en sera t-il le 09 avril 2009 ? Or il me semble que le taux de participation renvoie à plusieurs fondamentaux dont le soubassement est une meilleure gouvernance tant politique, économique et à une nouvelle régulation sociale. En fait, à la refondation de l’Etat qui doit prendre en considération le couple contradictoire, préservation de la rente /approfondissement des réformes à travers la stratégie des différents acteurs tant internes qu’externes. C’est l’objet de cette modeste contribution .
1-Rappel des résultats de la participation des élections locales de 2007 : un taux mitigé
Le taux de participation des grandes villes lors de l’élection présidentielle précédente a été la suivante : Blida- 54,71% ; Tlemcen 74,47% ; Tizi Ouzou 18,38% ; Alger 43,59% ;Annaba 67,32% ; Constantine 52,08%, ; Oran 64,01% ; Bejaia 16,10% ; Batna 49,90%1, des wilayates comme le Sud Bechar et Ouargla 72,08% et 54,72% . Ces taux contrastent avec le taux de participation des élections locales du 29 novembre 2007 qui ont vu surtout les grandes villes connaître un taux d’abstention inégalée : Blida 29%- Boumerdès 37% ; Alger 23% Constantine 29%, Oran 37% et une wilaya du Sud réputée voter Ouargla seulement 46% y compris les bulletins nuls. Concernant les élections locales du 29 novembre 2007 le taux de participation officiel a été pour les APC de 44% et de 43% pour les APW (conseil de préfecture) assistant à une petite amélioration par rapport aux élections législatives passées.
Les bulletins nuls représentent respectivement environ 4% et 5% du nombre d’inscrits, les voix partisanes étant donc 41% pour les APC et 38% pour les APW soit une moyenne globale de participation de 40% du nombre total des inscrits, plus de 60% de la population inscrite ne faisant pas confiance aux partis traduisant un divorce Etat- citoyens. Si l’on soustrait le FFS pur avoir une comparaison correcte, du fait qu’il s’est abstenu lors des dernières élections ,ayant représenté environ 4% des voix par rapport aux inscrits, nous avons 36% de taux de participation partisane hors FFS, un taux de participation équivalent aux législatives. En nous en tenant aux APC, globalement le FLN représente approximativement 12% avec seulement 2.094.000 voix, le RND 9,8% avec 1.602.000 voix, HMS 4,3% avec 842.000 voix soit un total pour les partis de la coalition de 26% soit le un quart des inscrits et beaucoup plus faible si l’on totalise par rapport à la population totale active en age de voter qui dépasse fin 2007 20 millions alors que le nombre d’inscrit déclaré a été de 18.446.000. Par rapport aux votants , le FLN représente 26%, le RND 20%, MSP 10% soit un total pour les partis de la coalition de 66%, et un parti protestataire le PT a eu 3% par rapport aux inscrits et 7%par rapport aux votants. Ce qui donne pour le nombre de sièges 30% pour le FLN, 24% pour le RND ; HMS 10% ; le FNA 11%, le PT approchant 7% ; le RCD un taux supérieur à 4% et le FFS 4%.
Il est utile de signaler qu’au sein de la structure de la coalition , nous assistons à une perte d’influence relative du FLN,perdant plus de 500.000 voix ( régression de plus de 16% alors que le nombre d’inscrits a augmenté de plus de 700.000 passant de 16.726.000 à plus de 18.446.000) et une percée du RND. Quant aux partis dits d’opposition RCD-FNA-PT-FFS, ils représentent un total de 10,50% avec une nette percée du FNA, constitué souvent de militant déçus du FLN et du RND, par rapport aux inscrits (avec ce paradoxe de la loi électorale ayant obtenu 832.000 voix, ayant eu 11,29% des sièges contre 10,69% pour le MSP qui a eu 842.000 voix. Et pour les élections législatives du 17 mai 2007, qui constitue une référence pour toute élection présidentielle , le taux de participation selon l’officiel a été de 35% soit un taux d’abstention de près de 65%, avec les plus grandes villes d’Algérie comme Tizi – Ouzou 16%, Bejaia 17%, Alger 18%, %, Boumerdes 24%, Blida 26%, Jijel 27%, Oran 31%.
Les bulletins nuls représentent plus de 960.000 soit 5% des votants inscrits et près de 13% des votants exprimés donnant ainsi une participation partisane de 22% le 1/5ème des inscrits . Pour les membres de la coalition gouvernementale, par rapport au nombre d’inscrits , le FLN représente 7,5%, le RND 3,1% et le MSP 2,1% soit un total de 12, 7% .
Par rapport au nombre de votants ,exclus les bulletins blancs, le FLN a 23%, le RND 10% et le MSP 9% soit au total 41%, cela par rapport au nombre de voix partisanes et non de sièges où ils sont majoritaires(64%). Par rapport à 2002 le FLN passe pour le nombre de sièges de 51 % à 35%, le RND de 12% à 16% et le MSP de près de 10% à 13%, et par rapport au nombre de voix exprimés les partis de la coalition perdent plus de 34% de voix . Les autres partis , sont négligeables , puisque le Parti des travailleurs ( PT) qui a par rapport au nombre d’inscrits 1,5% et le RCD 1% avec une concentration Bejaia- Tizi Ouzou et Alger) et par rapport au total des voix partisanes exprimées 5,5% et 3,1%.
Quelles leçons tirer de cette démobilisation populaire ? La leçon première fondamentale est la prise en compte tant des mutations mondiales qu’internes à la société algérienne avec le poids de la jeunesse qui parabolé a une autre notion des valeurs de la société. Cela se constate à travers la baisse progressive du poids des tribus , de certaines confréries religieuses et de certaines organisations syndicales,( ces dernières mobilisant uniquement pour des revendications sociales et non pour des actions politiques), du fait de discours en déphasage par rapport aux nouvelles réalités mondiales et locales. Car toutes ces organisations avaient fait un appel massif en faveur du vote mais n’ont pas été suivies. D’où l’importance de revoir le fonctionnement du système partisan et de la société civile .
2-Un système partisan inefficient
La Constitution de 1989 et la loi du 5 juillet de la même année ayant consacré et codifié le droit des citoyens à créer des partis politique, appelés pudiquement ‘‘associations à caractère politique’’, un nombre considérable de formations politique ont vu le jour dans des conditions souvent contestables. Ainsi a-on vu naître des partis n’ayant ni véritable programme, ni perspectives sérieuses à offrir et constituant souvent une source préoccupante de perturbation du champ politique national et de discrédit du pluralisme partisan, se manifestant ponctuellement principalement à l’occasion de rendez-vous électoraux du fait des subventions de l’Etat (instrumentalisation de l’administration).
En raison des crises internes qui les secouent périodiquement, du discrédit qui frappent la majorité d’entre eux, de la défiance nourrie à leur égard et à l’endroit du militantisme partisan, les formations politiques actuelles sont dans l’incapacité aujourd’hui de faire un travail de mobilisation et d’encadrement efficient, de contribuer significativement à la socialisation politique. D’ailleurs le fait de s’attribuer un salaire pour les députés et sénateurs de plus de 300.000 dinars par mois soit trente fois le SMIG ( plus de quatre fois le salaire d’un professeur d’université en fin de carrière ) accroît la non crédibilité des élus auprès de la population, jouant l’effet de repoussoir.
Ce sont là des raisons suffisamment importantes pour envisager sérieusement de réorganiser le système partisan en vue de lui donner les moyens dont il a besoin pour remplir la fonction qui est la sienne dans tout système politique démocratique. Aussi convient-il de se poser la question : quelle restructuration ? Plusieurs axes peuvent être retenus pour atteindre cet objectif.
Premièrement la réhabilitation des partis doit être un acte de reconnaissance de leur rôle institutionnel. Le discrédit qui a frappé les formations politiques nationales, pour les raisons que nous avons brièvement évoquées, doit laisser la place à une appréciation plus juste et pragmatique du statut et du rôle qui doivent être les leurs dans une société qui ambitionne de rejoindre le rang des sociétés démocratiques et modernes.
Deuxièmement, doivent être abordées les questions relatives à la création et à la représentativité. Il s’agit d’introduire d’avantage de rigueur dans la procédure relative à la création des partis, sans pour cela verser dans l’excès qu’induit inévitablement toute approche bureaucratique de la chose politique. Troisièmement, le marché politique doit être conçu comme axe central de la restructuration. En tout état de cause, il nous semble plus équitable, et plus juste politiquement, de raisonner en termes de marché électoral et de laisser, dès lors, les règles du jeu politique et le nombre d’acteurs qui s’y adonnent, se fixer de manière concurrentielle.
Le rôle des pouvoirs publics consistera alors à mettre en place les garde-fous indispensables et à veiller au respect strict des lois et des règles qui régissent le fonctionnement de ce marché. Mais lié à cette restructuration nécessaire, un autre segment est à dynamiser, c’est celui de la société civile.
3- Une société civile impotente
La confusion qui prévaut actuellement dans le mouvement associatif national rend malaisée l’élaboration d’une stratégie visant à sa prise en charge et à sa mobilisation. Sa diversité, les courants politico- idéologiques qui le traverse et sa relation complexe à la société ajoutent à cette confusion, qui est en grande partie liée au contexte politique actuel, et rendent impératif une réflexion qui dépasse le simple cadre de cette contribution.
En raison de la jeunesse très grande de la société civile, des conditions historiques qui ont présidé à sa naissance et des évènements tragiques qu’a connus l’Algérie et auxquels elle a été directement ou indirectement associée, la question qui touche à sa mobilisation doit être traitée avec une attention et une vigilance soutenues. Héritière, dans une certaine mesure, des anciennes organisations de masses du parti unique du FLN – puisqu’elle y puisera une partie substantielle de ses cadres et de ses militants – elle va littéralement exploser dans les tous premiers mois qui ont suivi l’avènement du multipartisme.
Paradoxe : malgré un contexte sécuritaire particulièrement difficile et dissuasif, elle va connaître, à l’instar du système des partis, un développement intensif et débridé durant la décennie écoulée. Constituée dans la foulée des luttes politiques qui ont dominées les premières années de l’ouverture démocratique, elle reflètera les grandes fractures survenue dans le système politique algérien. Ainsi la verra-t-on rapidement se scinder en deux sociétés civiles fondamentalement différentes et antagoniques, porteuses chacune d’un projet de société spécifique : d’une part, une société civile ancrée franchement dans la mouvance islamiste, particulièrement active, formant un maillage dense ; d’autre part, une société civile se réclamant de la mouvance démocratique, faiblement structurée, en dépit du nombre relativement important des associations qui la composent, et minée par des contradictions en rapport, entre autres, avec la question du leadership.
Sollicitée à maintes reprises, et à l’occasion d’échéances parfois cruciales, et souvent instrumentalisée, elle manifestera souvent sa présence d’une manière formelle et ostentatoire, impuissante presque toujours à agir sur le cours des choses et à formuler clairement les préoccupations et les aspirations de la société réelle. Aujourd’hui, l’état de désorganisation et de léthargie dans lequel se trouve la société civile nécessite une action vigoureuse de réorganisation et de redynamisation qui ne pourra être que salutaire pour elle.
Cette action permettra, entre autres à la fois d’offrir un cadre adéquat d’expression collective à des centaines de milliers de jeunes et de moins jeunes qui ne sont pas structurés. Dans cet ordre d’idées, l’Etat, tout en garantissant leur indépendance, doit encourager la création d’associations afin de faire de ce cadre un instrument efficace d’encadrement de forces vives qui agissent dans la société de manière dispersée dont la promotion de la femme signe de vitalité de toute société, et un levier puissant de leur mobilisation en vue de leur implication active dans la mise en œuvre des réformes. Mais cette politique n’a de chance de réussir que si le mouvement associatif est assaini et que si les associations qui le composent ne soit pas au service d’ambitions personnelles inavouables et parfois douteuses. Autre aspect, qui implique des éclaircissements, les relations fonctionnelles entre l’Etat et les gestionnaires d’entreprises publiques.
4- l’instabilité juridique décourage tout investisseur
Les investisseurs tant nationaux qu’étrangers qui misent sur le moyen et long terme (investissement inducteurs de valeur ajoutée contrairement à l’importation solution de facilité) sont totalement désemparés face au changement périodique du cadre juridique en Algérie et risque de faire fuir le peu de capitaux surtout en cette période de crise qui montre le rapatriement massif vers les pays d’origine.
L’on peut se poser la question si une circulaire peut remplacer une loi ou une ordonnance présidentielle remettant en cause l’Etat de droit ? Il faut aller jusqu’au bout de la logique, et remplacer alors les textes en vigueur selon la même procédure. La crise même si elle perdure au-delà de 2013/2014, se terminera bien un jour et faute de visibilité, il ne faut pas s’attendre à une dynamisation de la production et exportation hors, hydrocarbures. IL s’agit de ne pas de ne pas confondre le rôle de l’Etat régulateur stratégique en économie de marché avec le retour à l’étatisme des années 1970 qui, selon mon humble point de vue, serait suicidaire pour le devenir du pays et ne pas diaboliser le secteur privé. Car je précise que sur les 800 milliards de dollars dégagés pour soutenir les activités aux USA, les 600 milliards de dollars pour l’Europe , plus de 80% milliards de dollars sont destinés au secteur privé, certes avec un droit de regard de l’Etat et ce serait une erreur stratégique de croire que la crise actuelle engendrera le retour à l’étatisme stalinien..
Comme il faut être réaliste, que représente le modeste montant de 140 milliards de dollars de réserves de change algériens face de à ces centaines de milliards de dollars injectés pour essayer de sauver la sphère réelle, uniquement des USA, de l’Europe et de la Chine( 0,5% du total uniquement par rapport à ces trois espaces) sans compter les assainissements financiers des banques ce qui donnerait un taux divisé par deux (moins de 0,2 %) et tendant vers zéro pour l’ensemble du système économique mondial ou les pertes de plus de 550 milliards de dollars des pays du Golfe et la sous capitalisation, effet de la crise, estimée à plus de 2500 milliards de dollars ? La réunion du G20 à Londres le 02 avril 2009 devrait s’inscrire dans le cadre d’une mutation profonde du capitalisme , éviter le protectionnisme néfaste, qui pénalise d’ailleurs les pays les plus pauvres, ayant été à l’origine de l’accélération de la crise de 1929, impliquant une plus grande moralité , l’urgence d’une refonte du système économique international pour éviter cette bipolarisation accrue entre le Nord et le Sud, tenant compte de la mondialisation- interdépendance accrue des économies, , éviter cette déconnexion de la sphère réelle et financière,(le véritable capitalisme repose sur l’entrepreneur créateur de richesses durables dans un environnement concurrentiel loin de tout monopole) tout en tenant compte du nouveau poids de pays émergents.
Le keynésianisme (recettes à court terme alors que la crise actuelle est structurelle) en vogue actuellement s’inscrit dans le cadre de l’économie libérale comme l’atteste l’ouvrage de Keynes « la théorie générale » .Même la Russie et la Chine fondateurs du communisme ne vont pas dans ce sens révolu par l’histoire. Reste la Corée du Nord.
5-L’évoluton de l’organisation économique des entreprises publiques de 1963/2009
Selon les textes en vigueur en Algérie , les entreprises économiques publiques algériennes sont des sociétés commerciales dans lesquelles l’Etat ou tout autre personne morale de droit public détient, directement ou indirectement, la majorité du capital social, le patrimoine est cessible, aliénable conformément aux règles de droit commun et la création, l’organisation et le fonctionnement obéissent aux formes propres aux sociétés de capitaux prévues par le code de commerce. Mais dans la pratique existent souvent des interférences politiques. De cette situation il est utile de rappeler que de l’indépendance politique à nos jours, l’économie algérienne a connu différentes formes d’organisation des entreprises publiques, dont la dernière en date de février 2008.
Avant 1965, la forme d’autogestion était privilégiée ; de 1965 à 1980, nous avons de grandes sociétés nationales et de 1980 à 1988, nous assistons à une première restructuration découpant les grandes sociétés nationales. Comme conséquence de la crise de 1986 qui a vu le cours du pétrole s’effondrer, des réformes timides sont entamées en 1988 : l’Etat crée 8 fonds de participation qui étaient chargés de gérer les portefeuilles de l’Etat.
Comme conséquence de la cessation de paiement en 1994 (avec le rééchelonnement), en 1996, l’Etat crée 11 holdings en plus des 5 régionaux avec un Conseil national des privatisations ; en 2000, nous assistons à leur fusion en 5 mega holdings et la suppression du Conseil national des privatisations ; en 2001, nouvelle organisation et l’on crée 28 sociétés de gestions des participation de l’Etat (SGP) en plus des grandes entreprises considérées comme stratégiques, organisation restée telle quelle puisque le projet de 2004, qui devait regrouper ces SGP en 11 et 4 régionaux n’a jamais vue le jour.
Lors de différents Conseils de gouvernements tenus durant toute l’année 2007, une nouvelle organisation est proposée par le ministère de la Promotion de l’Investissement, ( les deux grandes sociétés hydrocarbures Sonatrach et Sonelgaz, régies par des lois spécifiques n’étant pas concernées) articulée autour de quatre grands segments : des sociétés de développement économique qui relèvent de la gestion exclusive de l’Etat gestionnaire ; des sociétés de promotion et de développement en favorisant le partenariat avec le secteur privé international et national ; des sociétés de participation de l’Etat appelées à être privatisées à terme ; et enfin, une société chargée de la liquidation des entreprises structurellement déficitaires.
Depuis cette date, cette proposition d’organisation, qui n’a pas fait l’unanimité au sein du gouvernement et certainement au niveau de différentes sphères du pouvoir, est abandonnée et une commission qui n’a pas donné des conclusions est créée pour examiner l’avenir des différents sociétés de participation de l’Etat (SGP) qui soit doivent être restructurées ou relèveraient de la tutelle de chaque ministère revenant à l’organisation du socialisme spécifique des années 1970 qui semble être la tendance lourde.
En effet, plusieurs entreprises étatiques de travaux publics sont passées, depuis le début de février 2009 sous la tutelle du ministère des Travaux publics et celui de l’habitat. Par ailleurs, depuis décembre 2008 à ce jour, de nouvelles mesures gouvernementales sont entrées vigueur. Dorénavant, il ne sera plus permis aux investisseurs étrangers de détenir la majorité du capital pour toutes nouvelles créations d’entreprises en Algérie, ou pour toute opération de privatisation, l’Etat devenant majoritaire ce qui nécessitera des besoins de financement croissants sur fonds propres.
Ces changements d’organisation périodiques démobilisent les cadres du secteur économique public, et même les investisseurs locaux et étrangers montrant clairement la dominance de la démarche administrative.
6 – Le paradoxe de l’aisance financière et de la régression économique et sociale
L’aisance financière par le passé est due essentiellement à l’envolée du cours du pétrole (le cours du gaz lui étant indexé : la moyenne a été de plus de 60 dollars en 2006, 75 dollars en 2007 et plus de 100dollars le baril moyenne 2008 , le cours ayant atteint le pic de 147 dollars en juillet 2008, et fluctue entre 40/45 dollars depuis quelques mois , les actions de l’OPEP qui représente moins de 40% de la production commercialisée mondiale , s’étant avérées peu inefficaces, en raison de la crise financière et des récessions annoncées des plus grandes économies mondiales, qui provoquent un ralentissement économique et une baisse de la demande.
La récession de l’économie mondiale prolongée entraînerait inéluctablement une baisse de la demande mondiale des hydrocarbures (les économies asiatiques étant fortement connectés à l’économie mondiale) et par là une chute du cours du pétrole. Certains analystes prévoient une contraction de la demande mondiale de pétrole entre 30/50% pour les prochaines années tant en raison de la crise actuelle qui pourrait se prolonger avec les ondes de chocs jusqu’ en 2013/2014 minimum et du changement du modèle de consommation énergétique. Aussi, comme je l’ai rappelé par ailleurs, si elle devait à persister la crise financière aurait un impact évident à terme sur l’économie algérienne totalement extériorisée au niveau de la sphère réelle car au niveau de la sphère financière, le système financier algérien et la bourse qui est totalement embryonnaire est totalement déconnectée de l’économie mondiale. Car avec la production actuelle exportable, la baise d’un dollar par baril entraîne un manque à gagner pour l’Algérie de 650 millions de dollars moyenne annuelle (pétrole et gaz qui lui est indexé), et pour 2009, il faut s’attendre à des recettes de Sonatrach inférieur à 36 milliards de dollars sous réserve d’un cours moyen de 50 dollars le baril et de la stabilité du dollar , Sonatrach/Sonlegaz réunis nécessitant ayant un autofinancement de 20 milliards de dollars par an entre 2009/2013. Au vu des dépenses actuelles un cours en dessous de 70 dollars entraînerait une révision déchirante de tous les programmes de développement et ce malgré les réserves de cange d’environ 140 milliards de dollars et un stock de la dette inférieur à 5 milliards de dollars. Or malgré l’importance des dépenses par le passé, le taux de croissance en termes réels selon les données tant de la banque mondiale dans son rapport de 2007 que du gouvernement algérien connaissent une régression, ayant atteint plus de 5% entre 2002/2005, pour revenir à environ 2% en 2006, 3% en 2007/2008, et pour les années 2009/2010 devrait être revu à la baisse car 98% des exportations (recettes en devises) proviennent des hydrocarbures, environ 50% du produit intérieur brut , 80% des autres 50% étant tirés par les dépenses publiques via les hydrocarbures, et 98% des exportations provenant des hydrocarbures payés en dollars et 50% d’importation payés en euros ) avec une extension de la sphère informelle, qui selon la méthode résiduelle de la banque mondiale draine en moyenne pour 2006/2008 40% de la masse monétaire en circulation. Cette situation est amplifiée par les obstacles à la mise en œuvre d’affaires donc l’entreprise source de la création de la richesse comme le note le classement du 11 octobre 2008 du World Economic Forum sur la compétitivité mondiale 2008-2009 où l’Algérie est classée à la 99ème place sur 131 reculant de 18 places alors que le rapport de 2007/2008 elle était à la 81 ème position l’accès au financement, la bureaucratie gouvernementale et la corruption étant les facteurs les plus problématiques pour faire des affaires en Algérie.
Le document cite aussi la fiscalité, les taxes de régulation, une main-d’œuvre non qualifiée et peu adaptée, une réglementation de travail restrictive et surtout le manque de visibilité et de cohérence dans la politique socio-économique et le frein à la réforme globale. Cette chute du cours du pétrole a des résultats négatifs sur la poursuite des dépenses publiques qui permettent d’atténuer le malaise social.
En effet au titre de la loi de finances 2009, les dépenses publiques algériennes sont trop lourdes par rapport aux moyens réels du pays, car les dépenses retenues pour l’année 2009 représentent l’équivalent de 80 milliards de dollars, et le seul budget de fonctionnement équivaut à 40 milliards de dollars. Le rapport élaboré à la demande du gouvernement algérien pour le bilan du programme de soutien à la relance économique 2004/2009 par la banque mondiale en 2007 , dont le montant est passé successivement de 55 en 2004, à 100 fin 2005, à 140 fin 2006 et selon la déclaration officielle du chef de gouvernement algérien en date du 12 novembre 2007 à 200 milliards de dollars US, montre une non corrélation entre les dépenses monétaires et les impacts économiques et sociaux.
Le rapport souligne que malgré les dépenses publiques qui sont passées de 62% du PIB fin 2007 contre 34% fin 1999, du fait de l’inefficacité des institutions, ce dernier n’a pas réussi, à inverser les tendances profondes de la crise économique que connaît l’Algérie assistant à un gaspillage des ressources financières et à un renforcement de la dynamique rentière. Le constat est que chaque projet a fait l’objet de six (6) réévaluations en moyenne avec des retards de 6,5 ans.
La Banque mondiale doute que ce programme, qui n’a pas de cohérence mais serait une compilation de projets avec des affectations budgétaires spécifiques sans objectifs précis sur les impacts économiques et sociaux puisse pérenniser la croissance , de promouvoir un développement fiable à moyen et long terme,avec le risque d’un gaspillage croissant, faute d’une bonne gouvernance et d’un secteur privé algérien concurrentiel dont l’émergence est freinée par de multiples contraintes d’environnement (bureaucratie), système socio-éducatif et financier inadaptés et l’inexistence d’un marché du foncier libre. Aussi, face à une population de plus de 33 millions d’habitants fin 2007, ( allant vers les 40 millions dans quelques années) et une population active estimée à 10, 51 millions ( taux de croissance de 2,5%) avec une demande additionnelle d’emplois annuelle de 500.000 unités , nous assistons à un taux de chômage en croissance en 2007 par rapport à 2006 selon les statistiques officielles de l’ONS de janvier/février 2008 (passant de 12,5% à près de 14%, le FMI l’estimant à plus de 20%) , un taux d’inflation officiel (de 3,5% selon l’organisme officiel de la statistique( ONS) mais corrigé par le gouverneur de la banque d’Algérie à 4,7% (montrant les contradictions du système d’information par deux voies officielles) et selon un document du centre de recherche américain , Casey Research , publié le 06 mars 2008, l’estimant 12% en 2007.
Nous assistons donc à une nette détérioration du pouvoir d’achat de la majorité de la population conséquence de la décroissance du PIB connue des économistes, de stagflation. Selon l’enquête du centre d’Etudes officiel CNEAP, organisme relevant du Ministère de l’intérieur (septembre 2006) le ménage moyen algérien consacre plus de 58,22% de son budget aux dépenses alimentaires dont seulement 10% pour la viande (ce taux ayant certainement augmenté avec la poussée de l’inflation entre 2007/2008) et avec un endettement croissant auprès des banques, (prêts pour l’achat des voitures, logements, électro- ménagers) donc un appauvrissement à terme. Cette détérioration du pouvoir d’achat de la majorité de la population est accentuée par une nette concentration des revenus au profit d’une minorité spéculative rentière , du fait d’une politique salariale biaisée et incohérente, la nouvelle grille des salaires de 2007 encourageant les rentes,décourageant les couches sociales utiles productrices de valeur ajoutée directement (la sphère économique ) et indirectement notamment l’éducation et la santé , segments porteurs d’une véritable croissance durable à même de combattre à terme le chômage et la pauvreté. Cela explique la démobilisation de la population face à ce paradoxe de l’aisance financière et d’une relative régression économique et sociale.
Conclusion générale : Consolider l’Etat de droit et la bonne gouvernance
Le passage de l’Etat de « soutien contre la rente » à l’Etat de droit « basé sur le travail et l’intelligence » est un pari politique majeur car il implique tout simplement un nouveau contrat social et un nouveau contrat politique entre la Nation et l’Etat, en fait la refondation de l’Etat.
A cet effet Concilier l’efficacité économique et une profonde justice sociale dans le cadre d’une économie ouverte, la maîtrise du temps étant le principal défi des gouvernants au XXIème siècle en cette ère de mondialisation irréversible , constitue en fin de parcours, le défi principal de l’Algérie entre 2009/2014, cette période étant une période de gestion de la crise si l’on veut mobiliser la population loin des discours populistes qui ont un effet démobilisateur.
Du fait de la profondeur et la durabilité de la crise actuelle, et de ses effets inévitables sur l’ensemble de la société algérienne, éviter la cacophonie et la légèreté des déclarations des différentes responsables sur ce sujet, il y a urgence, loin des fonctionnaires aux ordres, de la création d’un comité indépendant de sauvegarde contre les effets de la crise. La sécurité nationale étant posée, ce comité restreint , loin de toute lourdeur bureaucratique sous l’autorité directe du président de la république( comme dans tous les pays développés) sera composé d’experts nationaux de hauts niveaux,ne dépassant pas dix( 10) , évitant ces séminaires qui s’assimilent à des foires et à de l’activisme de peu d’utilité pour des actions concrètes, pouvant faire appel exceptionnellement à des expertises extérieures, devra travailler en réseaux avec les structures locales directement concernées :ministère de la défense nationale , ministère de l’intérieur, des finances, de la banque centrale d’Algérie et du Ministère de l‘énergie et des Mines.
La communication étant fondamentale, ce comité devra utiliser l’ensemble des médias lourds et notamment la télévision officielle en donnant ses résultats tous les deux mois par un dialogue direct avec la société afin de la sensibiliser. Et ce afin d’éviter les erreurs de la crise de 1986 et ses effets dévastateurs pendant plus de 10 années. Toute occultation de l’impact de la crise mondiale sur l’Algérie et comment y faire face concrètement discréditerait encore davantage cette élection.
En fait, cela implique que le pouvoir bienfaisant inauguré comme contrat politique implicite par les tenants du socialisme de la mamelle afin de légitimer l’échange d’une partie de la rente contre la dépendance et la soumission politique et qui efface tout esprit de citoyenneté active, ce pouvoir doit céder la place à un pouvoir juste, justicier et de justice.
AM le 08 mars 2009 pour algerie-focus.com
NB- Références biographiques de la contribution
– Toutes ces données ont été calculées par l’auteur à partir des résultats officiels établis par le Ministère de l’intérieur. Sous la direction de Théodore O. Ahlers- région Moyen Orient et Afrique du Nord, groupe pour le développement socio économique 15 août 2007 « rapport n°36270_DZ( 2 volumes – rapport et annexe statistique rapport intitulé « une revue des dépenses publiques de l’Algérie »
– voir également les interviews données par le docteur Abderrahmane Mebtoul au quotidien économique français « les Echos » 20 août 2008 et à la télévision internationale Al Djazeera le 12 octobre 2008, interview à l’hebdomadaire international Jeune Afrique( 20 janvier 2009) sur l’impact la chute du prix du pétrole et les perspectives de l’économie algérienne – Jacques Attali Rapport pour le président de la république française « face à la mondialisation, 300 propositions pour redresser la France » Janvier 2008 Présidence de la république française( synthèse par A. Mebtoul quotidien d’Oran janvier 2008)- Intervention du docteur A. Mebtoul à la rencontre internationale de Burgos (Espagne- 08/12 octobre 2008) organisée par les jeunes entrepreneurs euro-maghrébins sur le devenir de la gouvernance au Maghreb « Face à la crise financière mondiale : une seule solution pur les pays du Maghreb ; l’intégration économique » Et la contribution parue dans le quotidien d’Oran du 09 février 2009 « les effets de la crise d’octobre 2008 ».